M. Martial Bourquin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.
Monsieur le ministre, le taux du livret A est aujourd'hui à 0,75 % ; nous apprenons qu'il risque de passer, au 1er février, à 0,5 %. Il avait été gelé sous le précédent quinquennat, pour éviter une baisse.
Ma question est simple : restera-t-il une épargne populaire dans notre pays ?
Quoi qu'en disent les statistiques, le pouvoir d'achat des Français les plus fragiles ne cesse de diminuer. Les prix de l'électricité vont fortement augmenter en 2020 ; le prix des carburants connaît des hausses insoutenables, qui ne sont pas seulement dues au coût du pétrole brut, mais aussi aux taxes ; les frais bancaires, qui devaient être encadrés, ne le sont toujours pas, malgré vos engagements, et risquent d'exploser.
Vous allez me répondre, monsieur le ministre, que vous baissez les impôts. Mais la moitié des Français ne paient pas d'impôts !
M. André Reichardt. C'est bien le problème !
M. Martial Bourquin. Les Français les plus précaires ont besoin de politiques publiques, et vous les oubliez !
Cette année, 30 % seulement des entreprises ont accordé la fameuse prime Macron, créée à la suite de la crise des « gilets jaunes ». Et je ne saurais oublier la baisse des APL (aides personnalisées au logement), la désindexation des prestations familiales,…
M. Philippe Dallier. C'est qu'il faut les financer, les baisses d'impôts !
M. Martial Bourquin. … la réforme de l'assurance chômage, dont un syndicaliste a dit qu'elle serait une « tuerie ».
Monsieur le ministre, quand allez-vous véritablement lutter contre la pauvreté plutôt que de sans cesse l'aggraver ?
(Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Bourquin, les Français les plus modestes ont eux aussi besoin de logements sociaux. (Exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.) Et vous savez aussi bien que moi que le logement social est financé par le livret A. Si vous voulez davantage de logements sociaux en France, il faut que le taux du livret A soit raisonnable, afin de libérer des ressources pour le logement social !
(Brouhaha sur les mêmes travées.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Rendez l'argent à Action Logement !
M. Bruno Le Maire, ministre. Aujourd'hui – je ne vous apprends rien, monsieur Bourquin –, l'État emprunte à 0,1 % à échéance de dix ans. Les taux d'intérêt de la Banque centrale européenne sont négatifs. Si nous voulons que le secteur du logement social puisse construire des dizaines de milliers de logements nouveaux pour les Français les plus modestes, il faut que la ressource du livret A soit la moins coûteuse possible pour ledit logement social.
(Protestations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
Existera-t-il encore, à l'avenir, une épargne populaire ? Je réponds à votre question : bien sûr ! Cela s'appelle le livret d'épargne populaire, dont le taux d'intérêt n'est jamais inférieur au niveau de l'inflation. Et j'incite le maximum de Français à faire appel à ce livret d'épargne populaire dont nous garantissons que le taux ne sera jamais, je le répète, inférieur au niveau de l'inflation.
Quant au pouvoir d'achat – vous avez raison d'insister sur cette question, mais, là aussi, faites preuve d'honnêteté ! –, son augmentation moyenne a été, en France, très modeste au cours des dix dernières années, de l'ordre de 1 % par an ; en 2018, elle a été de 2,3 %, et, en 2019, de 2,3 % également.
(Exclamations ironiques sur les travées des groupes SOCR et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Le pouvoir d'achat a augmenté, en France, grâce à la politique du Gouvernement !
(Vives protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Louis Tourenne. Il a augmenté pour les riches !
M. Bruno Le Maire, ministre. S'agissant de la pauvreté, je voudrais rappeler une chose simple, monsieur Bourquin : 14 % des Français vivent sous le seuil de pauvreté ; c'est trop, c'est beaucoup trop ! Mais ils sont 34 % parmi les chômeurs. Quand nous faisons baisser le chômage en France, nous apportons donc la meilleure réponse au problème de la pauvreté dans notre pays.
(Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.
M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre, c'est la masse des Français qui a financé la baisse du déficit public et la baisse des charges sociales. Vous avez plombé votre quinquennat avec la fin de l'ISF et la double année du CICE. Vous avez opéré un basculement inédit de la fiscalité des plus riches et des entreprises vers les ménages, et cela au prix de la précarité, du chômage et de la pauvreté. C'est une honte pour une société comme la nôtre ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
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