M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Richard Yung. Ma question porte sur les relations transatlantiques et, plus particulièrement, sur celles qui lient la France et les États-Unis.
Nous avons été nombreux à saluer l'arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche le 20 janvier. Donald Trump, par ses excès, sa méconnaissance des enjeux géopolitiques – son désintérêt aussi, peut-être –, ainsi que par son agressivité, a exacerbé et suscité des tensions entre l'Europe et les États-Unis. Bien sûr, il faudrait évoquer de nombreux autres sujets s'agissant des États-Unis – l'Iran, la Palestine, etc. –, mais on ne peut pas tout couvrir en une seule question…
Certaines divergences stratégiques étaient certes antérieures à la présidence Trump, mais durant ces quatre dernières années, à notre grand regret, la relation transatlantique s'est effritée.
Le quarante-sixième président des États-Unis semble, lui, très attaché au multilatéralisme, et veut rétablir un dialogue étroit avec ses alliés européens. Il a notamment envoyé des signaux forts dès le début de son mandat, en renouant l'accord de Paris sur le climat.
Les premiers échanges entre le président Macron et son homologue américain ont permis de dessiner des points de convergence. C'est positif, car une alliance transatlantique forte contribuera au dénouement d'un certain nombre de dossiers multilatéraux.
Nous nous inquiétons toutefois de points de tension apparus au cours du mandat de son prédécesseur, qui ne vont pas disparaître du jour au lendemain : les tendances protectionnistes, la législation sur les géants du numérique, la taxe carbone aux frontières ou la tentation américaine d'imposer sa législation partout dans le monde.
Pourtant, nous en sommes convaincus, il est nécessaire que les États-Unis et l'Europe s'allient sur le plan commercial.
Monsieur le ministre, quelles initiatives la France pourra-t-elle porter pour rétablir des relations « normales » avec les États-Unis ? Plus largement, quelle vision voulez-vous pour la France, dans le choix des coopérations prioritaires à mettre en œuvre ? Quels premiers sujets seront inscrits sur votre agenda ?
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Vous l'avez souligné, monsieur le sénateur Yung, un nouveau chapitre de la relation transatlantique vient de s'ouvrir. Le Président de la République s'est longuement entretenu avec le président Joe Biden dimanche dernier et j'aurai moi-même l'occasion, tout à l'heure, de m'entretenir avec mon nouveau collègue Antony Blinken, confirmé par le Sénat américain hier soir – comme vous le voyez, les choses vont vite…
Nous constatons que les premiers gestes de l'administration américaine marquent un retour des États-Unis au multilatéralisme. Vous avez évoqué l'accord de Paris sur le climat, mais on peut mentionner, aussi, le retour au sein de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la volonté de revenir dans l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien et – une nouvelle restée assez confidentielle, mais très importante – l'accord avec le président Poutine sur la prolongation pour cinq ans du traité New Start, permettant la maîtrise des armements nucléaires stratégiques.
Nous devons donc construire sur cette nouvelle base, et nous devons essayer de le faire également dans le domaine économique. Vous avez cité certains exemples. Il faut effectivement mettre fin à l'escalade tarifaire et revenir à la négociation pour gérer nos différends commerciaux, dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il faut aussi parvenir à un compromis sur la régulation des plateformes numériques, notamment sur la fiscalité appliquée à leurs activités.
Nous y travaillons et allons continuer d'y travailler ; ce sont les sujets que j'aborderai dans le cadre de mon entretien avec M. Blinken.
Je voudrais surtout vous dire qu'on ne peut pas parler d'une parenthèse de quatre ans… Depuis quatre ans, le monde a changé. L'Europe a changé. Elle n'est plus la même. Ce que nous devons faire, donc, c'est poursuivre la construction d'une Europe forte et souveraine. C'est la condition d'une alliance transatlantique et d'une Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) rééquilibrées et refondées, au mieux des intérêts de chacun, que nous devons, les uns et les autres, respecter. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
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