M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste.
(Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nadia Sollogoub. Les agriculteurs attendaient avec impatience, ce 20 janvier, l'instruction des dossiers départementaux de reconnaissance des calamités agricoles, à la suite de la sécheresse de 2020. La réunion vient d'être reportée d'un mois.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, les paysans sont en colère. Ils le sont d'autant plus que l'administration semble avoir changé les règles de calcul des pertes d'exploitation, et la prise en compte des années de référence.
La terrible crise sanitaire que nous traversons ne doit pas nous faire oublier que la France connaît également, pour l'ensemble de ses filières, une grave crise agricole. C'est un immense « plan social » que connaît notre agriculture ! Pour exemple, 2 000 éleveurs bovins disparaissent chaque année. Des productions d'excellence françaises sont menacées.
Dans ce contexte, les agriculteurs, épuisés et découragés, n'acceptent pas qu'on les « achève » avec des contingences bureaucratiques et administratives, avec des réunions différées, avec des règles de calcul qui changent, avec des normes, des règlements et des doctrines.
Ils vont descendre dans la rue, car ils ont un besoin urgent et vital d'une indemnisation loyale des calamités agricoles.
Monsieur le ministre, après les espoirs déçus de la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, la loi Égalim, alors que les inquiétudes concernant le CETA subsistent, que les agriculteurs se sentent lâchés et lynchés, avez-vous la volonté que l'instruction des dossiers de calamité agricole se tienne de toute urgence, sans en changer les règles ?
(Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Je suis désolé, madame la sénatrice Sollogoub, mais je ne peux pas vous laisser tenir de tels propos sur notre action. Je crois que je n'ai plus à démontrer à quel point nous faisons preuve, parfois, d'un grand courage politique pour aider le monde agricole, auquel nous sommes tellement attachés.
Aujourd'hui, nous avons à relever un certain nombre de défis et la mère des batailles – j'enlève ici mon habit de ministre de l'agriculture pour prendre celui d'ingénieur agronome –, c'est la question de l'eau.
Trop souvent, depuis des années, on a mis cette question sous le tapis et nous nous sommes tous perdus dans d'autres sujets concernant le monde agricole. Pourtant, c'est la question essentielle !
Depuis que l'homme est sédentaire, dès que l'on parle gestion de l'eau, on en vient systématiquement à des questions de conflits autour de cet usage. Voilà pourquoi il est beaucoup plus facile de mettre le sujet sous le tapis. Moi, je n'ai pas l'intention de le faire !
Oui, quand il y a ces épisodes de sécheresse, il faut indemniser. Il s'avère que le comité auquel vous faites allusion s'est bien tenu en janvier, mais que les cas étaient si nombreux qu'il a fallu prévoir une deuxième session. Il y a donc eu un comité en janvier, et il y en aura un en février, au sein duquel sera traitée la situation du département de la Nièvre.
Autrement dit, ce n'est plus occasionnel ; c'est récurrent. Voilà la réalité ! Ce n'est pas une question de lourdeur administrative… Moi, je soutiens notre administration. Je peux vous dire que, dans les territoires, des hommes et des femmes se battent pour nos agriculteurs. Cet « administration bashing »est insupportable ; mettons-y un terme !
Au-delà de ces indemnisations, il faut prendre le problème à la racine.
Un, il faut développer les retenues d'eau. C'est difficile, compliqué, et cela demande du courage politique. Cela demande même, mesdames, messieurs les sénateurs, du courage politique aux niveaux national et local, et vous le savez bien !
(MM. Bruno Retailleau et Philippe Mouiller opinent.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Julien Denormandie, ministre. Combien sont-ils ceux qui vont manifester sur les retenues d'eau, ici ou là, pour en faire des éléments de campagne électorale ? C'est insupportable ! Donc, même si c'est difficile et si cela nécessite de la concertation, il faut le faire !
Deux, il faut accompagner nos agriculteurs. Ainsi, le plan de relance prévoit une ligne de 100 millions d'euros pour les aider à investir. Notre volonté est forte en la matière.
N'oublions pas, chaque fois, de revenir à la racine des problèmes, et la racine des problèmes, c'est la question de l'eau. Nous allons la traiter. Nous le ferons avec force et courage, et avec vous !
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.
Mme Nadia Sollogoub. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et partage totalement votre conviction. Je siège au Comité national de l'eau et travaille sur tous ces sujets. Mais je vous parle de trésorerie… Je sais que le plan de relance prévoit des lignes de crédits d'investissement. Ce qui m'occupe, ici, c'est la trésorerie, dont les agriculteurs ont besoin de façon urgente !
Par ailleurs, si la moitié des dossiers ont été instruits, pourquoi les agriculteurs s'inquiètent-ils d'un changement éventuel des règles du jeu ? J'entends aussi ce qu'ils me font remonter…
Nous avons besoin, tous ensemble, de travailler sur la gestion de l'eau, sachant que certaines demandes formulées par les agriculteurs dans ce cadre sont difficiles à traiter. Mais il y a un sujet très urgent sur la table – la trésorerie –, et je vous remercie de comprendre l'urgence de ce dossier. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
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