M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Jean-Jacques Michau. Vendredi dernier, au terme d'une semaine où toutes les rumeurs ont couru, il a été décidé, à la surprise générale, que la situation sanitaire dans notre pays n'imposait pas de confinement. Cette annonce a surpris, tant les demandes exprimées par les élus qui réclamaient des mesures plus restrictives étaient nombreuses.
Lors de l'examen du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire, nous avons été nombreux au Sénat à défendre l'idée que ces mesures devaient pouvoir se prendre à l'échelle territoriale. En effet, face à une épidémie qui circule de manière différenciée sur le territoire, il semble opportun de favoriser une approche basée sur la différenciation.
Un confinement national reste une décision très délicate à prendre et ne fait pas nécessairement sens. D'autres solutions existent et doivent être examinées attentivement.
Pourquoi ne pas agir en concertation à l'échelle de la région, de certains départements ou de certaines métropoles sur l'opportunité de mesures territorialisées ? Pourquoi ne pas laisser aux préfets, en concertation avec les élus, la possibilité de décider, en fonction de la densité de population ou du taux d'incidence du virus, des assouplissements ou au contraire des mesures plus restrictives à prendre ?
Certes, nous comprenons qu'il soit plus simple et plus lisible d'appliquer des mesures uniformes pour l'ensemble des Français. Toutefois, alors que nous entrons de nouveau dans une période où de nombreuses inquiétudes minent le moral de nos compatriotes, cette règle paraît disproportionnée dans les territoires les moins touchés par l'épidémie…
M. Jean Castex, Premier ministre. Lesquels ?
M. Jean-Jacques Michau. … ou lorsque leurs spécificités rendent l'application de certaines mesures inappropriée.
Monsieur le ministre, allez-vous examiner la possibilité de recourir, dans la mesure du possible, à une gestion territorialisée de la crise sanitaire en associant les élus locaux à la prise de décision ?
(Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Michau, la territorialisation est généralement la règle dans la gestion de la crise sanitaire depuis un an. Ainsi, le 2 janvier, quinze départements ont été placés sous couvre-feu à dix-huit heures, puis une vingtaine d'autres le 11 janvier, parce que la situation le nécessitait. L'évolution de l'épidémie a ensuite justifié que nous appliquions ce couvre-feu à l'ensemble du pays.
Sur le fond, vous avez raison : territorialiser, considérer différemment les régions, ne pas appliquer une règle uniforme avec des contraintes trop lourdes par endroits, c'est évidemment du bon sens. Mais la réalité est plus complexe qu'il n'y paraît. Ainsi, la Dordogne – loin de moi l'idée de pointer du doigt ce magnifique département, encore moins d'inquiéter ses habitants – connaît cette semaine une hausse de 53 % des cas, alors qu'il s'agit plutôt d'un territoire semi-rural. Je pourrais prendre aussi l'exemple du Tarn-et-Garonne ou de la Corse, deux territoires où le virus est en train de progresser.
De même, lorsque je me suis entretenu le 24 décembre dernier avec les présidents des conseils départementaux et régionaux, les responsables d'ARS et les préfets des régions Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté, tous constataient que les contaminations touchaient avant tout des personnes âgées dans les parties les plus rurales de ces régions.
S'il existait une règle simple permettant d'identifier par avance les endroits où le virus va principalement circuler, croyez bien que nous l'appliquerions, afin d'éviter des contraintes à l'ensemble des Français.
Par ailleurs, la concertation est la règle. J'étais présent lorsque le Premier ministre a reçu l'ensemble des présidents de groupes parlementaires et d'associations d'élus la semaine dernière. Nous essayons toujours de tracer nos mesures au cordeau.
Lorsqu'il a fallu confiner, les taux d'incidence étaient supérieurs aux seuils d'alerte sur tout le territoire national et la dynamique épidémique partout présente. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, raison pour laquelle le Président de la République nous a invités à nous mobiliser encore plus ensemble pour nous donner une chance d'éviter une situation épidémique qui nécessiterait l'application de mesures nationales que ni vous ni nous ne souhaitons. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
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