M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Monsieur le Premier ministre, lundi dernier, le fabricant de silicium Ferropem annonçait la suppression de 360 emplois en Savoie et en Isère. C'est un savoir-faire centenaire qui est menacé. Le silicium est un produit essentiel pour de nombreuses activités industrielles, notamment pour la fabrication de panneaux photovoltaïques.
En Isère toujours, c'est l'entreprise Photowatt, l'un des rares producteurs français de panneaux solaires, ses 215 salariés et leur immense savoir-faire, qui sont également menacés. Après avoir acheté ses panneaux solaires en Chine pendant des années, sa maison mère, EDF, se désengage. On marche sur la tête !
Sur l'autel de la rentabilité capitaliste, c'est toute la filière photovoltaïque française, voire européenne, qui est sacrifiée.
L'énergie solaire est pourtant indispensable, tant pour la transition énergétique que pour la souveraineté de la France. Ne plus produire de panneaux photovoltaïques en France, c'est aggraver notre bilan carbone et notre dépendance à la Chine. Un comble en pleine discussion du projet de loi Climat !
Cela témoigne de l'absence totale de stratégie en matière de transition énergétique de la France. L'ombre colossale d'Hercule plane sur cette triste affaire. Alors que l'on s'apprête à nationaliser et à financer à fonds perdu la filière nucléaire, qui ne sera jamais rentable, on continue à confier au privé tout l'effort de transition énergétique. Sacrée réussite : nous sommes déjà en retard sur les objectifs 2020 !
Monsieur le Premier ministre, allez-vous agir pour sauver le panneau solaire français ?
Allez-vous enfin déployer une stratégie publique de développement des énergies renouvelables et respecter les objectifs de votre propre programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ?
Allez-vous consulter le Parlement et le peuple avant d'engager, avec le projet Hercule, l'avenir énergétique de la France pour les trente prochaines années ?
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le président Gontard, merci de votre question qui me donne l'occasion de m'exprimer sur un sujet majeur : la production d'électricité photovoltaïque et ses conséquences industrielles pour notre pays et pour l'Europe.
Vous l'avez rappelé, nous avons des ambitions fortes, décrites dans la programmation pluriannuelle de l'énergie qui a été adoptée, dans le cadre de la loi relative à l'énergie et au climat, le 21 avril 2020 par décret et que nous essayons de mettre en œuvre. L'électricité d'origine photovoltaïque progresse sans cesse, année après année, à un rythme soutenu et nous devons poursuivre dans cette voie.
Votre question renvoie à un autre sujet, celui de l'origine des panneaux, des tuiles et des cellules photovoltaïques qui génèrent cette électricité, lesquels, nous le savons comme vous, sont depuis très longtemps importés de très loin, souvent d'Extrême-Orient, avec un bilan carbone extrêmement défavorable. Nous devons changer cela.
Vous vous souvenez que, pour encourager la consommation d'électricité d'origine photovoltaïque, plusieurs gouvernements successifs avaient augmenté les tarifs d'achat, qu'ils ont ensuite été obligés de baisser à nouveau, précisément parce que cela faisait surtout l'affaire de producteurs étrangers. Cela suppose donc une vraie stratégie industrielle.
C'est sur ce point que je me démarquerai des observations que vous avez faites. Cette stratégie industrielle, qui a longtemps manqué, nous la mettons progressivement en place.
D'abord, nous veillons à ce que tous les appels d'offres pour l'achat de ces matériels comportent des critères en matière de contenu carbone, afin de favoriser les panneaux les plus performants, c'est-à-dire produits avec l'impact climatique le plus réduit, ce qui conduira, vous le savez, à écarter un certain nombre de ces produits importés qui ne répondent pas à ses conditions.
Ensuite, cette stratégie industrielle doit aussi être menée dans un cadre européen et nous travaillons avec la Commission sur la possibilité d'introduire des critères de contenu de production locale dans tous les appels d'offres pour le solaire conduits à l'échelle du territoire communautaire.
La France est également positionnée comme un État moteur pour le lancement d'une alliance européenne pour le photovoltaïque, qui entre exactement dans les objectifs que vous avez appelés de vos vœux, alliance européenne qui a été annoncée par la ministre déléguée chargée de l'industrie le 22 février dernier, aux côtés du commissaire chargé de l'énergie.
Enfin, la France elle-même consacre des moyens pour avoir la capacité de développer et de promouvoir cette filière. Nous soutenons ainsi beaucoup de petites et moyennes entreprises (PME) et d'entreprises de taille intermédiaire (ETI), comme le projet Akuo, le projet Bélénos ou encore le projet Photowatt, que nous avons sauvé.
Lorsque j'ai pris mes fonctions de chef du Gouvernement, vous avez raison de le rappeler, EDF voulait fermer Photowatt, nous l'en avons empêché, je le dis devant le Sénat, et Photowatt vit toujours. Nous allons soutenir le projet REC Solar à Sarreguemines, pour lequel le Gouvernement est pleinement mobilisé et qui va exiger beaucoup d'argent public.
Bref, mesdames, messieurs les sénateurs, ce gouvernement est pleinement mobilisé pour la construction d'une filière photovoltaïque souveraine et durable.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Merci, monsieur le Premier ministre, mais vous ne m'avez pas répondu, notamment, sur Hercule et sur la place d'EDF.
Oui, EDF a repris Photowatt en 2012, mais aujourd'hui, allez-vous faire pression sur EDF pour qu'il conserve cette filiale à 100 % et lui achète ses panneaux ? Vous ne m'avez pas répondu à ce sujet.
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