M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
(Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Christian Redon-Sarrazy. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance ; j'y associe mon collègue Jean-Claude Tissot, sénateur de la Loire.
Les fédérations des entreprises de l'artisanat et du bâtiment nous ont alertés quant à la pénurie de matériaux et à la flambée des prix qui les frappent.
En dépit de leur mobilisation auprès des pouvoirs publics ces derniers mois, rien ne semble avoir été fait pour anticiper cette situation. Elles connaissent en effet les plus grandes difficultés à s'approvisionner en bois et dérivés de bois, polyuréthane, polystyrène et plaques de plâtre, pour ne citer que quelques exemples. Les prix de l'acier et du PVC ont augmenté respectivement de 106 % et de 114 %, celui du cuivre de 51 %.
Tout le paradoxe est là : les demandes des particuliers et la commande publique en matière de construction sont en hausse, mais les entreprises risquent de ne pas pouvoir les satisfaire faute d'approvisionnements corrects.
Ces pénuries entraînent déjà l'arrêt de certains chantiers. Elles vont certainement affecter de nombreux corps de métiers en conséquence, dans un contexte de relance économique et de préservation impérative de l'emploi.
Certes, la crise sanitaire n'est pas étrangère à ces difficultés. Mais elles n'en étaient pas moins prévisibles, puisque, dans de nombreux secteurs, nous ne maîtrisons plus les chaînes d'approvisionnement de matières premières ou de produits semi-transformés.
Le cas du bois est révélateur : depuis plusieurs années, les grumes françaises, le chêne en particulier, sont massivement exportées vers l'Asie et la Chine, à un prix supérieur de 25 % à 30 % à ce que les scieries françaises sont en mesure de proposer, pour être ensuite importées – si la Chine le veut bien ! – une fois transformées.
Les professionnels de la filière bois ont pourtant maintes fois alerté sur le manque croissant de matières premières pour les transformateurs locaux, sans être pour autant entendus. Aujourd'hui, nous en voyons le résultat : c'est tout le tissu manufacturier français qui est menacé et, une fois de plus, cette situation met fortement en cause notre souveraineté industrielle.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour garantir cette autonomie nécessaire au bon fonctionnement de notre industrie si l'avenir nous réserve de nouveaux épisodes de crise, quelle que soit leur nature ?
(Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Redon-Sarrazy, je fais miennes un grand nombre de vos interrogations et vos préoccupations sont aussi celles du Gouvernement. La reprise économique extrêmement rapide en Asie, pour ne pas dire la reprise mondiale, entraîne des tensions sur le prix des matières premières et des difficultés d'approvisionnement.
Vous avez cité un certain nombre d'exemples. Nous pourrions y ajouter l'augmentation du prix du baril de pétrole, qui se traduit à la fois par une hausse des prix de revient pour les secteurs énergivores et par une augmentation du prix de production des matières plastiques, avec des difficultés identiques à celles que vous avez évoquées.
Face à cette situation, nous apportons deux types de réponses.
À court terme, il s'agit tout d'abord d'assurer un suivi extrêmement précis de ces difficultés, secteur par secteur. Il s'agit ensuite de fluidifier les transports et les échanges en activant un certain nombre de mesures douanières ; en menant des actions diplomatiques auprès des pays concernés ; ou encore en réunissant les filières, pour les inciter à mutualiser un certain nombre de moyens et à dissuader les plus grands donneurs d'ordre de constituer des stocks de précaution qui priveraient de plus petits acheteurs. Nous veillons aussi à ce que les acheteurs publics, dans le respect de leurs prérogatives, puissent faire preuve de bienveillance en cas de difficulté sur les chantiers.
Au-delà, nous devons travailler à plus long terme : c'est le but premier du plan de relance et des mesures de résilience. Ainsi, Bruno Le Maire et moi-même nous sommes rendus dans votre département il y a quelques jours pour accompagner un projet de production de matériels médicaux.
Vous évoquez la filière bois : vous savez qu'en la matière nous consacrons beaucoup de moyens à la relocalisation. D'ores et déjà, l'État finance plus de 273 projets à ce titre, notamment pour la reconquête de souveraineté industrielle. Ils sont accompagnés à hauteur de 462 millions d'euros. Au total, ils représentent surtout 1,8 milliard d'euros d'investissements et 25 000 créations d'emplois prévues.
Ce qui se trouve derrière ces emplois et ces investissements, c'est la reconquête de notre souveraineté, c'est la reconstitution des chaînes de valeur, pour qu'à l'avenir nous ne soyons plus dépendants d'autres pays ou d'autres continents pour les matières premières que vous avez évoquées ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Arnaud de Belenet applaudit également.)
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