M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. Monsieur le Premier ministre, au-delà du Sahel, la Haute Assemblée serait très intéressée de connaître votre détermination à lutter contre le djihadisme et le terrorisme islamiste partout dans le monde.
Depuis des années, les gouvernements successifs ont dit à la Haute Assemblée que lutter partout dans le monde, c'était garantir l'intégrité du territoire français et la sécurité des Français en général.
Dès lors, quelle est votre détermination à lutter, partout dans le monde, contre le djihadisme ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur Karoutchi, vous avez raison de rappeler l'ampleur de la menace. Il est nécessaire de faire preuve d'une vigilance extrême et de considérer la lutte contre le terrorisme comme une priorité absolue.
On voit bien ce terrorisme se répandre, et pas uniquement au Sahel. Depuis quelques jours, nous observons certains événements autour du lac Tchad, avec la montée en puissance de l'Iswap, l'État islamique en Afrique de l'Ouest, et de Boko Haram. Nous constatons la montée en puissance des shebabs dans le nord du Mozambique. Il y a un risque de résurgence de Daech, en Syrie comme en Irak. Il existe, enfin, des risques liés à la situation en Afghanistan.
Face à cela, la réponse doit être internationale et globale. Nous devons intégrer les éléments de renseignement et nous avons, depuis quelques années, au niveau national et grâce à la coopération internationale, singulièrement renforcé nos capacités et nos moyens de collaboration. Cette action signifie aussi l'intervention armée, quand c'est nécessaire.
Nous le faisons au Sahel, et Mme la ministre des armées vient de confirmer cette orientation contre-terroriste de l'inflexion de notre organisation au Sahel.
Nous le faisons aussi toujours en Syrie, par l'intervention de nos forces basées en Jordanie.
Nous le faisons également viales Nations unies, puisque, en ce moment même, est en train d'être définie la stratégie antiterroriste qui devrait réunir l'ensemble des États membres des Nations unies, sur la base d'éléments juridiques et de la nécessité des sanctions, qu'il faudra mettre en place à partir de listes.
Nous le faisons en luttant contre le financement : nous avons pris l'initiative de la coalition No Money For Terroravec les Australiens, il y a quelques mois. Cela a permis d'adoption d'une résolution au Conseil de sécurité, qui fixe des normes et prévoit des sanctions à l'égard de toute complicité sur le financement du terrorisme.
Nous le faisons aussi en luttant contre la diffusion du terrorisme en ligne, en particulier depuis les événements de Christchurch. Vous le savez, avec la Première ministre de Nouvelle-Zélande, l'initiative a été prise d'une coalition, appelée « L'Appel de Christchurch », qui a permis des avancées significatives.
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Tout cela constitue une action globale, régulièrement révisée au niveau national, dans les conseils de défense que tient le Président de la République.
(Mme Patricia Schillinger et M. François Patriat applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, la grande absente de votre réponse, c'est l'Europe.
En réalité, vous l'avez dit, les actes djihadistes se multiplient un peu partout dans le monde : Niger, Mali, Burkina Faso, Mozambique, Tanzanie, Irak, Syrie, etc.
Par ailleurs, la Turquie n'hésite pas à dire qu'elle utilise des mercenaires djihadistes syriens contre l'Arménie, contre les Kurdes, en Afghanistan ou en Libye. Nos amis arméniens, nos amis kurdes, nos amis libyens, auprès de qui nous intervenons pour que la démocratie soit rétablie, se demandent où est l'Europe et où est la France.
Bien sûr, nous protestons ! Bien sûr, nous nous indignons ! Mais c'est insuffisant pour préserver la liberté de ces peuples menacés.
Lorsque l'Europe et la France ne défendent pas avec suffisamment de fermeté les valeurs démocratiques, lorsque notre jeu diplomatique, notamment par rapport à la Turquie, n'est pas d'une netteté absolue – c'est le moins que l'on puisse dire ces derniers jours – (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.), nous remettons en cause nos propres valeurs de liberté et de démocratie.
J'espère que nous n'en paierons pas un jour le prix. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
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