M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
(Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, personne ici ne méconnaît ce fait déplorable et insupportable : bon nombre d'agriculteurs de notre pays ne vivent pas de la vente de leur production et la loi Égalim 1 (loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), qui est un échec, ainsi que les timides avancées de la loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite Égalim 2, n'auront qu'un effet limité sur le revenu des agriculteurs.
Ainsi, depuis de nombreuses années, c'est grâce à la PAC (politique agricole commune) que ces agriculteurs vivent ou plutôt survivent. Ce sont ces aides qui constituent leur vrai revenu, qui leur permettent de boucler leurs fins de mois et de faire face à leurs obligations.
Par conséquent, quand ces aides ne sont pas versées à la date prévue, les agriculteurs doivent négocier des emprunts auprès des banques pour combler leur besoin de trésorerie.
C'est justement le cas au moment où je parle, car les aides qui devaient être versées au 15 octobre dernier, dans mon département, l'Ariège, mais également dans d'autres territoires, notamment en Occitanie, n'ont pas encore été versées. Vos services, monsieur le ministre de l'agriculture, annoncent qu'elles ne le seront pas avant le 15 décembre prochain ! Deux mois ! Deux mois sans aide, et encore, seulement si les promesses sont tenues !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, doit-on incriminer l'Europe pour ces retards, comme on a si souvent tendance à le faire, parfois à raison ? Dans ce cas d'espèce, ce n'est pas Bruxelles qui est en cause : l'argent est bien disponible, mais, pour qu'il soit versé aux agriculteurs, il faut que l'État français ait contrôlé l'exploitation de ces derniers.
S'agissant d'argent public, personne ici ne remet en cause la légitimité de ces contrôles, qui permettent de vérifier la conformité des productions agricoles. Ce que je déplore et qui est inadmissible, c'est que l'administration française n'ait pas les moyens d'effectuer ces contrôles dans les délais requis pour que les agriculteurs reçoivent les aides nécessaires à leur survie aux dates que vous aviez annoncées, monsieur le ministre.
Par conséquent, qu'allez-vous faire pour que nos agriculteurs reçoivent leur prime le plus rapidement possible ?
(Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. Pierre Louault et Bruno Sido applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. D'abord, monsieur le sénateur Michau, le plus important, c'est de faire en sorte que, « à la fin des fins des fins », nos agriculteurs vivent de la juste rémunération de leur activité et non des aides. À cet égard, je crois pouvoir dire que les avancées que nous avons fait adopter à l'unanimité, ici, au Sénat, dans le cadre de la loi Égalim 2 vont dans le bon sens.
Ensuite, les aides de la PAC restent, effectivement, très importantes, et elles le restent d'autant plus que la bataille de la rémunération n'est pas encore gagnée, même si l'on s'y emploie.
Toutefois, votre question, monsieur le sénateur, ne reflète en aucun cas la réalité et, je dois vous le dire, venant d'un représentant de l'ancienne majorité, je trouve ça vraiment fort de café !
M. Marc Fesneau, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne. Oui !
M. Julien Denormandie, ministre. Aussi vais-je vous donner les vrais chiffres, monsieur le sénateur, et ils sont vérifiables partout !
Au 19 octobre dernier, dans le département de l'Ariège, 95 % des bénéficiaires avaient perçu les avances de paiement de la PAC. Sur 1 800 dossiers, il y avait donc, à cette date, 83 exploitants qui ne les avaient pas encore reçues, pour deux raisons possibles : soit parce que des contrôles étaient en cours, comme il y en a dans tous les départements ; soit du fait des dérogations liées aux SIE (surfaces d'intérêt écologique) – ceux qui connaissent ce sujet comprendront bien –, qui entraînent un décalage dans le versement.
À présent, monsieur le sénateur, je vais vous donner les chiffres nationaux : en 2020, 99,7 % des paiements de la PAC ont été faits dans les délais ; en 2017, le taux s'élevait à 4,45 % (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.) ; et en 2015, il s'établissait à 0 %…
(Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – MM. Arnaud de Belenet et Pierre Louault applaudissent également.)
M. Marc Fesneau, ministre délégué. Voilà !
M. Julien Denormandie, ministre. Alors, ces leçons de morale, quand on ne donne pas les vrais chiffres, sont insupportables !
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Jean-Marc Todeschini. C'est un peu facile !
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.