M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)
M. Alain Milon. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé – ou à son remplaçant.
Les projections Pasteur du 13 décembre concernant l'évolution du nombre de patients covid dans les services hospitaliers sont extrêmement préoccupantes. Les besoins en lit croissent chaque jour. Pour armer ces lits, il faut pouvoir recourir à des personnels médicaux supplémentaires.
Or le contexte vous est connu : épuisement des personnels hospitaliers, urgences engorgées, hôpital proche de la saturation.
Par la force des choses, les hôpitaux doivent déprogrammer des activités chirurgicales et médicales pour redéployer des personnels. Les renforts sont difficiles, pour ne pas dire même impossibles. Les médecins hospitaliers sont quant à eux contraints de prioriser les patients, avec le désarroi de devoir encore différer des soins programmés.
Tout cela s'apparente à une bombe à retardement en termes de santé publique.
Dans ce contexte, l'agacement des soignants croît avec leur lassitude et les questionnements éthiques ne manquent pas. Le lien de causalité n'est plus à faire entre armement de lits covid, notamment en réanimation, occupés à 70 % ou 80 % par des patients non vaccinés, et déprogrammations.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous épauler les professionnels de santé confrontés à des prises de décisions de limitation thérapeutique, autrement dénommée triage ? Le critère de vaccination peut-il être retenu comme discriminant positif dans un contexte de saturation des capacités en soins critiques ? Quelle organisation territoriale de la prise en charge des patients entre public et privé envisagez-vous pour affronter les vagues à venir ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Jocelyne Guidez et Valérie Létard applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Monsieur le sénateur Milon, les tensions à l'hôpital, réelles, sont amplifiées, depuis deux ans déjà, par les épidémies concomitantes de covid et des virus hivernaux. En quelques semaines, nous avons compté 14 000 admissions hospitalières, et nous avons quelque 2 800 personnes en réanimation aujourd'hui, chiffre qui devrait atteindre 4 000 d'ici à la fin du mois.
Les études de l'Institut Pasteur que vous évoquez étayent ce constat. C'est parce que nous le partageons, que nous partageons ce discours de lucidité, que nous ne disons pas non plus que tout va mal.
Le ministre Olivier Véran a demandé que la situation soit objectivée par une enquête sur les tensions en ressources humaines et sur le capacitaire, dont les conclusions vont être remises dans les tout prochains jours – nous vous les communiquerons.
Compte tenu de cette situation, nous devons nous mobiliser collectivement, avec des réponses immédiates, d'urgence, susceptibles de produire des résultats dans les toutes prochaines semaines.
D'abord, nous devons maintenir ce qui a permis aux hospitaliers de tenir jusqu'à présent, en prolongeant les majorations des heures supplémentaires et du temps de travail additionnel jusqu'en janvier 2022, ainsi que les dispositions sur le cumul emploi-retraite.
Nous devons aussi encourager une mobilisation collective, chacun devant prendre sa part : les établissements de santé publique, mais également le privé et le secteur ambulatoire. Dans une période si compliquée, c'est collectivement que nous tiendrons dans les semaines qui arrivent, comme nous avons pu tenir par le passé.
Nous sommes particulièrement attentifs aux tensions dans les services d'urgence, en pédiatrie et dans les maternités. Le ministre a demandé aux agences régionales de santé d'être pleinement mobilisées pour accompagner les établissements en activant leurs cellules territoriales de suivi et en organisant la solidarité territoriale nécessaire, notamment en mobilisant les établissements privés et les professionnels libéraux.
Les actions plus structurelles, vous les connaissez, et je ne rappelle pas les efforts sans précédent du Ségur de la santé, dont les effets, s'ils se feront sentir sur le long terme, sont déjà importants, avec 30 milliards d'euros pour revaloriser la rémunération de ceux qui soignent, et 19 milliards d'euros en faveur de l'investissement courant et de la restauration des capacités financières.
Enfin, grâce à l'adoption de la loi Rist visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, les hôpitaux disposent désormais de nouveaux outils pour transformer leur gouvernance et leur fonctionnement interne, et pour que l'organisation territoriale puisse mieux répondre aux défis du moment.
(M. Martin Lévrier applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.
M. Alain Milon. Monsieur le secrétaire d'État, la majorité à laquelle vous appartenez nous reproche régulièrement de ne pas faire de propositions. Nous allons donc vous en faire.
Il faudrait d'abord que vous allégiez les hôpitaux publics en mobilisant fortement le privé. Vous savez que, pour les vacances de Noël, beaucoup de cliniques vont fermer. Il serait donc nécessaire de faire en sorte qu'elles ne ferment pas.
Vous devriez aussi faciliter les placements en hospitalisation complète ou soins de suite et réadaptation, c'est-à-dire l'aval ; clarifier les messages des agences régionales de santé sur le niveau de déprogrammation ; faciliter la mise à disposition des personnels IDE des structures chirurgicales et des centres de vaccination en les remplaçant, dans ces centres, par des personnels autorisés à vacciner, mais non infirmiers ; donner des recommandations éthiques au personnel médical pour lui faciliter la tâche ; enfin, en extrême urgence et au cas où ce serait la seule solution, pourquoi pas la réquisition ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Jocelyne Guidez et Nadia Sollogoub applaudissent également.)
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