M. Jean-Jacques Lozach attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé quant aux modalités de fermeture et de cession d'officines, ainsi que sur les répercussions qu'elles engendrent dans l'offre et l'accès aux services pharmaceutiques dans les territoires ruraux.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 1848, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur les modalités de fermeture et de cession de pharmacies, ainsi que sur les répercussions qu'elles engendrent dans l'offre et l'accès aux services pharmaceutiques dans nos territoires ruraux.
Je prendrai pour point de départ le cas d'une officine implantée dans la commune de Mainsat, en Creuse, dont le fonds fut brutalement cédé par son propriétaire à une autre officine située dans la commune d'Auzances, chef-lieu de canton. Il s'agit là d'une absorption sèche, opérée en l'absence de toute réflexion concertée et coordonnée avec les élus locaux et les professionnels de santé du territoire concerné : elle conduit à la disparition de ce lien essentiel desservant les quelque 550 habitants de la commune de Mainsat et ceux des communes environnantes.
Il n'est pas question de vouloir attenter aux libertés des pharmaciens libéraux titulaires d'officine dans la gestion de leur activité, pas plus que de prétendre interférer dans leur décision de fermer l'entreprise ou dans l'acte de la céder. Pour autant, ces situations profondément injustes accentuent la fracture territoriale déjà béante. Ces inégalités doivent être combattues.
Pour rappel, l'Ordre national des pharmaciens, dans sa carte actualisée le 1er juin dernier, dénombrait 59 officines dans le département, l'une des représentations les plus faibles et déficitaires du pays.
L'article 95 de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite ASAP, issu d'un amendement sénatorial, s'attaque à la problématique de l'accès aux médicaments dans les communes isolées ou très peu peuplées, en permettant à l'agence régionale de santé (ARS), dans le cas où l'unique officine d'un village cesserait son activité sans avoir trouvé de repreneur, d'autoriser la mise en place d'une antenne de pharmacie qui serait rattachée à l'officine la plus proche, après avis du Conseil de l'ordre et des syndicats représentatifs.
Où en sommes-nous dans l'effectivité et la mise en place de ces succursales pharmaceutiques ?
Parallèlement, ce même article 95 prévoit d'étendre aux zones caractérisées par des difficultés dans l'accès aux médicaments le champ des expérimentations relatives à la présence de professionnels de santé pour une durée maximale de cinq ans. Néanmoins, les projets d'expérimentation semblent suspendus à la publication d'un décret d'application définissant les territoires au sein desquels ce service à la population n'est pas assuré de manière satisfaisante.
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous renseigner sur l'échéance à laquelle ce texte pourrait être pris ?
Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Monsieur le sénateur Jean-Jacques Lozach, j'ai bien conscience que la particularité de certains territoires pourrait amener leur population à connaître des difficultés d'approvisionnement en médicaments si ceux-ci venaient à perdre leur officine.
Je tiens tout d'abord à rappeler que toute cessation définitive d'activité d'une officine doit être déclarée par son titulaire à l'agence régionale de santé lorsqu'elle fait l'objet d'une indemnisation par une autre pharmacie. Un avis préalable du directeur général est requis afin d'anticiper au mieux les conséquences sur l'offre pharmaceutique, notamment dans les territoires ruraux.
C'est précisément pour apporter une réponse à ces territoires qu'un assouplissement de la réglementation a été prévu par certaines dispositions de l'ordonnance de 2018 relative à l'adaptation des conditions de création, transfert, regroupement et cession des officines de pharmacie.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, un projet de décret existe, qui vise à déterminer des territoires au sein desquels l'accès aux médicaments pour la population n'est pas assuré de manière satisfaisante. Sa publication pourrait intervenir au cours du premier semestre 2022 ; elle permettra ainsi aux agences régionales de santé d'identifier, selon une méthodologie qui se doit d'être précise, les territoires pour lesquels de sérieuses difficultés d'accès à une offre pharmaceutique se posent pour la population.
Au sein de ces territoires, des leviers sont prévus pour faciliter le maintien ou l'installation d'une officine. Le Gouvernement est évidemment très attentif à ce que la population de notre territoire puisse conserver une offre de soins de proximité, notamment lors des fermetures d'officines dans les territoires ruraux.
La réglementation actuelle permet déjà au directeur général de l'ARS, lorsque l'officine qui a fermé desservait jusqu'alors une population au moins égale à 2 500 habitants, de délivrer une nouvelle autorisation d'ouverture d'officine dans cette commune.
Par ailleurs, comme vous l'avez évoqué, monsieur le sénateur, la loi ASAP du 7 décembre 2020 contient une mesure autorisant les agences régionales de santé à expérimenter une nouvelle modalité de dispensation des médicaments dans des communes isolées dont la dernière officine aurait définitivement cessé son activité si l'approvisionnement de la population en est compromis au sens du code de la santé publique.
L'objectif de ce dispositif, qui vient compléter l'ensemble des autres mesures, est d'apporter une réponse aux spécificités de chaque territoire.
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