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Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de Mme la ministre des armées sur le programme de drone Moyenne Altitude Longue Endurance (MALE) ou Eurodrone et le choix d'Airbus de l'équiper de moteurs Avio au détriment de Safran.
Au-delà d'un choix défavorable à une entreprise française, il est important de rappeler qu'Avio, avant d'être une entreprise italienne, est d'abord une filiale de l'américain General Electric (GE). Or, bien qu'il soit principalement fabriqué en Europe (GE République tchèque, GE Pologne, GE Allemagne et GE Italie) ainsi qu'un peu aux États-Unis, ce moteur est avant tout américain. En conséquence, on ne peut pas faire évoluer ce moteur sans l'accord des Américains. Ainsi en choisissant Avio, on condamne l'Eurodrone à ne pas être « ITAR free » - c'est-à-dire sans composants susceptibles de susciter l'opposition du Gouvernement des États-Unis - à partir du moment où son moteur comprendra plus de 10 % de pièces américaines, quels que soient les arguments d'Airbus pour assurer le contraire concernant le moteur catalyst. Si jamais nous souhaitions faire gagner en puissance ce moteur, nous nous trouverions sous une forme de tutelle de la législation et de l'administration américaine.
Or les normes «international traffic in arms regulations » (ITAR) ou encore « export administration regulations » (EAR) qui portent notamment sur les biens à double usage contrôlés au titre des régimes multilatéraux de contrôle des exportations, sont de portée extraterritoriale et changent assez régulièrement ; en conséquence, Airbus et les Européens se mettent ainsi à nouveau dans la main du Congrès américain.
Il apparaît donc que cette décision va à l'encontre de ce que la France et l'Europe recherchent depuis le départ avec le projet de drone MALE européen, c'est-à-dire la souveraineté. Sur le plan de l'autonomie stratégique européenne, la solution proposée par Safran était sans aucun doute la meilleure solution et elle n'était pas franco-française mais européenne, puisqu'elle réunissait deux entreprises allemandes MT-Propeller et ZF Luftfahrttechnik (ZFL), l'espagnol ITP et l'italien Piaggio Aerospace.
On peut s'interroger sur la stratégie d'Airbus dans cette affaire : le choix du moteur Avio ne garantit pas sa certification pour fonctionner sur un drone, il s'agit donc d'une décision plus économico-politique que technique. Airbus semble avoir agi par volonté de faire émerger un nouveau motoriste en Europe pour renforcer la concurrence… Ce serait une décision purement économique, cynique et à courte vue, contre les intérêts militaires européens.
Il convient désormais de savoir comment vont réagir les gouvernements européens. Les partenaires du programme, et surtout la France, peuvent et doivent refuser le choix d'un moteur américain. Initialement dans les arbitrages réalisés pour ce programme, notamment avec le «european defence industrial development programme » (EDIDP) - précurseur du fonds européen de défense, il avait été fait le choix d'acheter du matériel européen en recherchant essentiellement la souveraineté au détriment de plusieurs critères calendaires et de prix. Ainsi, le drone MALE européen ne sera sans doute pas prêt avant huit ans, avec le risque d'être obsolète, parce que les gouvernements européens avaient fait le choix de privilégier notre autonomie stratégique. Or le choix d'Avio ne règle en rien la question des délais et nous prive de l'autonomie.
Elle lui demande donc si le Gouvernement français compte engager des discussions avec ses partenaires européens pour remettre en cause ce choix d'Airbus. Elle souhaite savoir si, en l'absence d'accord avec ses partenaires, le Gouvernement français dénoncera unilatéralement ce choix.
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