M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. À écouter à l'instant M. Véran, il est nécessaire et certainement utile de répéter deux fois une citation d'Emmanuel Macron : « Dans le principe, un ministre doit quitter le Gouvernement lorsqu'il est mis en examen. » En avril, il ajoutait que le principal danger pour la démocratie était la persistance de manquements à la probité parmi des responsables politiques.
Le président Macron a conservé cette conduite six semaines, entre mai et juin 2017, le temps d'obtenir une majorité absolue à l'Assemblée nationale…
Depuis, les affaires se succèdent à un rythme effréné. La banalisation est maintenant de mise, allant même jusqu'à la nomination au Gouvernement de personnes lourdement accusées. La République exemplaire est devenue la République des affaires !
Cette semaine, un nouveau cap a été franchi avec la mise en examen du secrétaire général de l'Élysée, une première, et le renvoi du garde des sceaux devant la Cour de justice de la République, une première également !
Madame la Première ministre, connaissant la probité qui est la vôtre, allez-vous enfin l'appliquer à votre gouvernement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la Première ministre.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Monsieur le président Gontard, comme j'ai eu l'occasion de le dire hier à l'Assemblée nationale, j'ai pris acte de la décision rendue lundi de renvoyer Éric Dupond-Moretti devant la Cour de justice de la République. Comme chacun d'entre vous, je suis attachée à la séparation de l'exécutif, du législatif et de l'autorité judiciaire. Je ne commenterai donc pas cette décision.
En revanche, je veux rappeler deux éléments fondamentaux pour notre État de droit. Le premier, c'est l'indépendance de la justice – l'un des piliers de notre démocratie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. On parle du garde des sceaux !
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Le second, c'est la présomption d'innocence ; elle aussi protège chacun, elle aussi est primordiale dans un État démocratique. Ces principes n'appellent ni commentaire ni exception.
Dès lors, une seule question se pose : cette situation affecte-t-elle le fonctionnement du ministère de la justice ? (Oui ! sur plusieurs travées.) Ma réponse est claire et se fonde sur plusieurs mois de travail avec le ministre. Le ministère de la justice se réforme, se transforme, avance et il voit ses moyens atteindre des niveaux inédits.
M. Guy Benarroche. Quel rapport ?
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Des réformes profondes s'engagent, notamment à la suite des États généraux de la justice. L'engagement du ministre est résolu, solide et indéfectible.
M. Jean-Pierre Sueur. Cela n'a rien à voir avec le sujet.
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Pour les dossiers où Éric Dupond-Moretti est un justiciable comme les autres…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il est garde des sceaux, pas un justiciable comme les autres…
Mme Élisabeth Borne, Première ministre. … ou pour ceux qu'il a pu connaître en tant qu'avocat, nous avons mis en place un dispositif de déport exigeant et efficace. Ce dispositif me conduit à piloter en direct une série de sujets.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.
M. Guillaume Gontard. Madame la Première ministre, je pense que vous n'avez pas bien compris.
Ici, le sujet n'est pas la présomption d'innocence, mais le respect de la parole donnée, qui plus est celui de la parole présidentielle.
Le sujet, c'est de ne pas ternir l'image du gouvernement de la France.
Le sujet, c'est de disposer de ministres à temps plein au service des Françaises et des Français.
Le sujet, c'est la sérénité dans laquelle doit être prise la décision de justice, a fortioriquand le justiciable est le garde des sceaux.
Le sujet, c'est la préservation de l'indépendance de la justice.
Emmanuel Macron nous avait promis l'exemplarité politique, de mise sous François Hollande, mais il nous ramène aux pratiques délétères des présidences de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), alors que la crise démocratique est plus profonde que jamais, que l'extrême droite est aux portes du pouvoir et que les fascistes l'ont conquis de l'autre côté des Alpes.
Votre responsabilité devant l'Histoire est considérable, madame la Première ministre, et il est encore temps de prendre la bonne décision ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
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