Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Après une concertation de pure forme des partenaires sociaux, vous annonciez récemment une énième réforme de l'assurance chômage avec une réduction de la durée d'indemnisation de 25 % en période dite favorable.
La période défavorable, qui permettrait de rester aux conditions actuelles d'indemnisation, suppose un taux de chômage à 9 %, soit un taux que la France n'a pas connu depuis des années.
Sous le prétexte de la cyclicité, cette réforme dégrade dès aujourd'hui les conditions d'assurance. Revenir à 9 % supposerait la survenue d'une crise économique majeure.
Vous annoncez votre confiance dans l'atteinte d'un taux de chômage de 5 % en 2027 ; en conséquence, vous devriez au moins fixer le seuil au niveau actuel du chômage, soit 7 %.
La réalité, c'est que les prévisions ne valident pas la poursuite de la baisse du chômage et que c'est un leurre de croire que la réduction de l'assurance est un levier pour cela, même en poussant les chômeurs vers des emplois de plus en plus précaires.
Pour masquer le véritable objectif de la réforme qui vise à baisser les dépenses et réaliser 4 milliards d'euros d'économies, vous affirmez que la contracyclicité permettra le retour à l'emploi de 150 000 chômeurs. Quand bien même cela serait exact, convenons que cela ne justifie pas les dizaines de milliers d'assurés qui perdront leurs droits.
Ma question porte sur cette estimation de 150 000 retours à l'emploi que vous nous vendez avec votre réforme. D'où vient ce chiffre ? De quelle étude ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice, permettez-moi tout d'abord de reprendre les termes de votre question. Vous avez dit que, pour revenir au niveau d'indemnisation précédent, il faudrait atteindre un taux de chômage de 9 % que la France n'a pas connu depuis des années.
Vous avez raison : la France ne l'a pas connu depuis cinq ans, c'est-à-dire depuis le début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Nous sommes passés de 9,4 % à 7,3 % de chômage.
Vous avez aussi raison de souligner que la politique pour l'emploi que nous menons est efficace. Elle s'est traduite par la création de 1,7 million d'emplois depuis 2017. Au troisième trimestre de l'année 2022, l'économie française – les entreprises françaises – a créé 84 000 emplois.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Olivier Dussopt, ministre. J'imagine que vous allez me rétorquer qu'il s'agit de « mauvais » emplois. Sachez que c'est la première fois depuis vingt ans que plus de la moitié des embauches se fait en contrat à durée indéterminée – c'est le cas depuis le début de l'année 2022 – et que plus de la moitié des emplois dans notre pays sont des CDI.
M. Marc-Philippe Daubresse. Vos chiffres sont faux ! C'était déjà le cas en 2006 !
M. Olivier Dussopt, ministre. Non seulement l'économie française crée de l'emploi, mais elle crée de l'emploi stable et de meilleure qualité qu'il y a quelques années. C'est aussi le résultat de la politique de lutte contre les contrats courts que nous menons depuis 2019.
Comme vous l'avez dit, nous avons présenté une réforme de l'assurance chômage. Elle a été adoptée par les deux assemblées sans recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution – je le précise. Elle prévoit l'application du principe de contracyclicité. Qu'est-ce que cela signifie ? Il s'agit de faire en sorte que le régime d'assurance chômage soit plus protecteur, quand les choses vont mal, et plus incitatif, quand les choses vont bien.
J'ajoute que c'est le Sénat qui a introduit la notion de conjoncture économique comme critère de modulation des règles de l'assurance chômage.
M. Emmanuel Capus. Excellent !
M. Olivier Dussopt, ministre. Cette loi et les décrets que nous allons bientôt prendre vont permettre de réduire une part – et simplement une part – des tensions de recrutement. Toutes les études convergent pour dire que, pour l'année 2023, cela peut permettre d'accélérer le retour à l'emploi de 100 000 à 150 000 personnes.
C'est une bonne nouvelle et vous devriez vous en féliciter, comme vous devriez vous féliciter du fait que, depuis octobre 2021, grâce aux politiques de formation et d'emploi, nous avons permis le retour à l'emploi de 300 000 chômeurs de longue durée, dont 156 000 de très longue durée.
Vous oubliez les bonnes nouvelles, madame la sénatrice. Vous préférez faire peur et c'est bien dommage. Réjouissez-vous avec nous !
(Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – M. Alain Cazabonne applaudit également. – Huées sur des travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. Philippe Pemezec. C'est vous qui jouez à faire peur !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la réplique.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, ce n'est pas sous le quinquennat d'Emmanuel Macron que les chiffres du chômage que vous évoquez ont été atteints. Vous les avez trouvés, en arrivant au pouvoir en 2017 !
(Protestations sur les travées du groupe RDPI.)
En plus, vous ne regardez que les chômeurs de catégorie A, pas les autres.
En tout cas, le seul chiffre qui soit exact et documenté, c'est celui de l'Unédic : votre réforme aboutit à 4 milliards d'euros d'économies pris sur le dos des demandeurs d'emploi ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et SER.)
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