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Paul Toussaint Parigi
Question d'actualité au gouvernement N° 148 au Ministère de la transition


Pollution du fleuve Tavignanu par un stockage de déchets en Corse

Question soumise le 15 décembre 2022

M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Paul Toussaint Parigi. Ma question s'adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et porte sur un écocide annoncé que l'État ne peut ignorer au regard de l'ampleur de la menace qu'il fait peser sur notre région.

Je parle du projet du centre d'enfouissement de Giuncaggio, aux abords immédiats du deuxième plus grand fleuve de Corse : le Tavignanu, classé zone Natura 2000 et zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique.

Ce projet fou, c'est le stockage et l'enfouissement de 120 000 tonnes de terres amiantifères et de 70 000 tonnes de déchets ménagers par an sur trente années, un affouillement des sols abyssal dans une zone géologique instable, les pieds dans l'eau, où d'importants glissements de terrain ont déjà été observés !

Experts, géologues, hydrobiologistes confirment et signent : le risque majeur de destruction de cet écosystème aurait des conséquences dramatiques pour la santé humaine et les générations à venir.

Le Tavignanu irrigue toute la plaine orientale, dont l'agriculture diversifiée, de qualité, labellisée et connue mondialement pour sa production d'agrumes, constitue un inestimable réservoir de biodiversité au cœur duquel l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) abritent un précieux conservatoire génétique des agrumes d'Europe et d'ailleurs.

Mettre en péril l'alimentation en eau potable de toute une région, détruire le cœur agricole de la Corse, hypothéquer la santé humaine des générations futures : voilà les enjeux dont il est question, monsieur le ministre. Il s'agit d'un acte criminel en devenir qui se joue aujourd'hui sous nos yeux.

Depuis six ans, nous demandons l'interdiction totale de ce projet. Malgré un arrêté initial de refus du préfet Alain Thirion, en 2016, et les prescriptions du préfet François Ravier en 2019 pour minimiser les risques du projet, le combat juridique continue.

Ma question est simple : saurez-vous, au nom du devoir supérieur de l'État, protéger la vie et les écosystèmes, être à nos côtés pour interdire les logiques mercantiles qui hypothèquent notre territoire et sacrifient la terre que, demain, nous léguerons à nos enfants ?
(Applaudissements sur les travées du GEST – Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Marie-Arlette Carlotti applaudissent également.)

Réponse émise le 15 décembre 2022

M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Parigi, je vous remercie de votre question. Vous braquez les projecteurs sur la situation très complexe, depuis 2015, de la gestion des déchets en Corse.

Un tiers des déchets produits sur l'île sont triés et orientés vers le continent. Les deux tiers restants, soit 160 000 tonnes, doivent être traités localement. Or les deux installations de stockage existantes ne peuvent accueillir que 100 000 tonnes de déchets par an.

Dans cette situation, la société Oriente Environnement a demandé, en 2016, l'autorisation de stocker des déchets le long du fleuve Tavignanu, sur un site qui présente des risques potentiels d'affaissement. Le préfet a refusé d'accorder cette autorisation, mais le tribunal administratif a annulé cette décision. En 2020, le préfet a décidé d'autoriser, après avis de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), un stockage partiel. En novembre 2022, le tribunal administratif a exigé que nous accordions une autorisation complète de stockage.

Ce sujet est bien évidemment problématique : l'autorité de la chose jugée et la situation que vous décrivez en termes de risques, que les autorités préfectorales ont elles-mêmes soulignée, s'affrontent directement. Plus largement, la question se pose de la gestion des déchets en Corse. Voilà quelques jours, j'aurais dû accompagner le ministre Gérald Darmanin lors d'un déplacement en Corse, puisque cette question fait partie des sujets que nous devons aborder avec les élus insulaires. Ce rendez-vous a été reporté aux premières semaines de l'année 2023. Je ne fuirai pas mes responsabilités et j'irai à la rencontre des élus.
(M. Paul Toussaint Parigi marque son approbation.)

Je soutiens bien évidemment la position du préfet, tout comme je fais miennes les inquiétudes exprimées par les élus locaux et ai parfaitement conscience des risques qu'ont pointés de nombreux acteurs. Nous devons trouver une solution. Nous allons nous y atteler dans les prochaines semaines. (Applaudissements sur les travées du RDPI – M. Joël Guerriau applaudit également.)

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