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Corinne Imbert
Question d'actualité au gouvernement N° 154 au Ministère de la santé


Pénurie de médicaments

Question soumise le 15 décembre 2022

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. Ma question s'adressait à Mme la Première ministre et concerne notre souveraineté sanitaire, car le sujet est à la fois économique et sanitaire.

Les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux durent depuis des années. Toutefois, aujourd'hui, le niveau des manquants a atteint des sommets. C'est du jamais vu ! Paracétamol et amoxicilline continuent de faire l'actualité, et le ministère impose des contingentements.

Mais, aujourd'hui, c'est aussi l'un des acteurs mondiaux des industries de santé, le dernier fabricant français de poches de perfusion pour les hôpitaux, qui est en redressement judiciaire et qui cherche un repreneur. Et si aucun repreneur n'est trouvé d'ici le 5 janvier prochain, alors l'entreprise risque de fermer définitivement. Les hôpitaux s'inquiètent : ils n'avaient pas besoin de cela. Comment demain pourront-ils s'approvisionner en poches de perfusion ? C'est un nouveau symbole de notre indépendance sanitaire qui est en danger.

Comment expliquez-vous cette situation, monsieur le ministre, et que comptez-vous faire ?
(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et CRCE. – Mme Victoire Jasmin et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)

Réponse émise le 15 décembre 2022

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Corinne Imbert, les causes de ces pénuries de médicaments sont multiples. La crise de la covid engendre une augmentation des prescriptions : +13 % pour le paracétamol, par exemple.

Des problèmes se posent aussi quant aux principes actifs ; on mesure là tout l'intérêt d'en rapatrier la production en Europe et en France, dans le cadre du plan France 2030 notamment.

Il existe aussi des difficultés de production ou de distribution : ainsi la production de Doliprane pédiatrique, qui se fait essentiellement en Allemagne, a-t-elle été récemment perturbée par un mouvement social chez Sanofi. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Ce mouvement ayant pris fin récemment, nous allons pouvoir retrouver nos stocks.

Cette situation, vous le savez, n'est pas propre à la France : elle concerne l'ensemble du territoire européen, voire s'étend au-delà. En ce qui concerne l'amoxicilline, la pénurie est nationale, liée à un défaut de production.

Notre système de surveillance, piloté par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), nous permet, d'une part, d'être alertés très tôt : pour la plupart des produits, l'alerte est donnée dès lors que nos stocks diminuent en dessous d'un mois de couverture des besoins : cela ne veut pas dire que nous n'en avons plus, mais que les stocks sont extrêmement bas. Elle nous permet, d'autre part, d'identifier les causes, donc de mener des actions ciblées en fonction du médicament : interdiction d'exporter pour les grossistes lorsque les médicaments sont en France ; distribution plus équitable sur le territoire national via, là aussi, les grossistes-répartiteurs ; modification des modalités de prescription en officines, les pharmaciens dispensant le strict nécessaire et pouvant être autorisés à déconditionner les boîtes.

Nous travaillons aussi avec les sociétés scientifiques sur l'élaboration d'alternatives, puisqu'il n'est pas envisageable, bien entendu, que l'on ne puisse pas traiter l'ensemble des Français.

Vous le savez, le plan France 2030 va nous permettre de rapatrier les productions en France, tout du moins en Europe, et ainsi de faire de la France un pays souverain pour ce qui concerne nos produits de santé. À cet effet, l'Agence de l'innovation en santé a été dotée d'un budget plus que substantiel.

Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Il n'a pas répondu !

Mme Laurence Cohen. Le pôle public du médicament, voilà la solution !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.

Mme Corinne Imbert. Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse, mais vous n'avez répondu que sur les pénuries de médicaments : vous n'avez pas abordé la question des difficultés des fabricants français, et en particulier de celles que rencontre le dernier fabricant français de poches de perfusion.

La pandémie a déjà révélé que la fusion, pour former Santé publique France, de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires avec d'autres agences nous avait fait perdre toute capacité d'anticipation d'une crise sanitaire. Vous avez voulu une filière française des masques ? Cela risque de virer à la déroute… Retrouver notre indépendance sanitaire, nous y sommes évidemment favorables : c'est nécessaire et indispensable, d'autant plus dans l'actuel contexte international.

Mais commençons par ne pas perdre le peu d'indépendance qui nous reste ! Je pense à ce fabricant de poches de perfusion, mais aussi à l'Établissement français du sang, qui est en difficulté et mérite toute l'attention du Gouvernement. Des hôpitaux ont une dette à son égard, monsieur le ministre, comme l'a confirmé une audition organisée ce matin même par la commission des affaires sociales ! Je ne veux pas que notre système de santé soit sacrifié sur l'autel de Bercy.
(M. le ministre le conteste.)

Ne hochez pas la tête, monsieur le ministre, c'est la réalité : cela nous a été confirmé ce matin même au cours d'une audition organisée par la commission des affaires sociales !

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme. Et c'est Casimir qui a fait la T2A ?

Mme Corinne Imbert. Les pénuries sont insupportables et toute perte de notre indépendance sanitaire serait inacceptable.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées des groupes UC, SER et CRCE. – MM. Daniel Chasseing et Daniel Salmon applaudissent également.)

Mme Laurence Cohen. Commission d'enquête !

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