M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Monsieur le ministre, l'édition 2023 du salon de l'électronique grand public – Consumer Electronics Show, ou CES – de Las Vegas vient de s'achever. Elle a laissé une large part à l'automobile. À cette occasion, Carlos Tavares, PDG de Stellantis, a sonné une nouvelle charge contre le prix extrêmement bas des véhicules chinois zéro émission, qui met en péril l'industrie européenne. Cette industrie, pour le seul territoire national, représente 210 000 emplois directs, auxquels il faut ajouter les emplois indirects.
À en croire les objectifs affichés par Geely, SAIC et Great Wall, trois constructeurs chinois, un million de véhicules pourraient être exportés vers l'Europe d'ici à dans trois ans. Ils sont déjà en train de construire le système de distribution pour atteindre cet objectif.
Certes, sur le territoire national, les véhicules électriques progressent – 46 % d'immatriculations supplémentaires en 2021 –, mais 80 % de ces véhicules sont importés. La presse ne s'y trompe pas, indiquant que le loup chinois est dans la bergerie.
En effet, la Chine concentre 50 % de la valeur totale d'un véhicule électrique, 75 % de la chaîne de valeur des batteries et 90 % des moteurs électriques produits dans le monde. Face à cela, l'industrie européenne est en très grande difficulté, ne parvenant même plus à pénétrer le marché chinois.
Dans cette bataille qui commence, monsieur le ministre, quelles sont nos armes ? Avez-vous choisi une guerre de position, dans laquelle nous continuons de subir les assauts chinois, ou entendez-vous sortir de la tranchée et lancer une guerre de mouvement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Anne-Catherine Loisier et Mme Sonia de La Provôté applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Madame la sénatrice, je vous remercie pour votre excellente question. Ma réponse est claire : nous sommes favorables à une guerre de mouvement (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), offensive et défensive.
Offensive, tout d'abord : il faut avoir, au XXIe siècle, une industrie automobile électrique en France et en Europe aussi performante que celle du véhicule thermique au XXe siècle. Je rappelle que ce sont ce gouvernement et cette majorité qui ont pris l'initiative, il y a quatre ans, de mettre en place une filière de batteries électriques, pour être moins dépendants de la Chine – nous allons ouvrir les deux premières usines. Notre objectif pour 2030 est de produire de 100 à 120 gigawatts de puissance électrique avec des batteries produites sur le territoire français.
Nous voulons rouvrir une usine de lithium (Mme Sophie Primas s'exclame.), diversifier nos approvisionnements et être indépendants en matière de semi-conducteurs, indispensables aux véhicules électriques : nous avons obtenu l'investissement de GlobalFoundries sur le site de STMicroelectronics pour les développer massivement. L'objectif est donc clair : être indépendants pour la production de véhicules électriques. Voilà pour l'offensive : les matériaux, les batteries, les semi-conducteurs et, au bout du compte et comme l'a annoncé Stellantis, la production de véhicules électriques sur le sol français. Croyez-moi, cette offensive sera très volontariste.
Vous soulevez ensuite une question majeure – je vous invite d'ailleurs à participer aux travaux du projet de loi pour une réindustrialisation verte : celle du volet défensif. Devons-nous réserver les aides – 7 000 euros pour un véhicule électrique, par exemple – à des véhicules produits et assemblés en France et en Europe ? (Oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est une question légitime : après tout, d'autres le font.
Faut-il renforcer le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, au-delà du ciment, de l'acier et de l'aluminium, pour concerner des biens manufacturés comme des automobiles ?
(Mêmes mouvements.)
Je n'ai pas la réponse à ces questions. Cependant, la défensive, c'est avoir l'audace de les poser et d'en discuter avec tous les sénateurs et sénatrices qui le voudraient dans le cadre du projet de loi pour une réindustrialisation verte.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. Il faut conclure !
M. Bruno Le Maire, ministre. Avec la Première ministre, nous sommes prêts à mettre en œuvre ce volet de l'autonomie sur le véhicule électrique.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour la réplique.
Mme Christine Lavarde. Monsieur le ministre, vous aviez déjà répondu à certaines des questions que vous avez posées. En octobre dernier, devant la Plateforme automobile, vous disiez qu'il ne fallait pas se laisser envahir et qu'il fallait réserver les aides aux véhicules produits en Europe, ce que vous a proposé le Sénat, avec un amendement diminuant de 500 millions d'euros les aides versées essentiellement aux industriels chinois.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Eh oui !
Mme Christine Lavarde. Vous ne l'avez pas retenu, alors que c'était une mesure de souveraineté qui améliorait notre déficit budgétaire ! C'est bien dommage.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. Jean-François Husson. Excellent !
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