M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour le groupe Union Centriste.
(Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. François Bonneau. Monsieur le ministre des armées, depuis onze mois, l'Ukraine subit une crise dévastatrice. Ce week-end encore, l'Union européenne dénonçait un crime de guerre à la suite d'une frappe contre un immeuble ayant fait au moins quarante morts. Nous avons également une pensée pour le ministre de l'intérieur ukrainien après le drame qui lui a coûté la vie ce matin.
Face à l'intensité du déploiement militaire de son agresseur russe, l'Ukraine est insuffisamment dotée en équipements.
Le Royaume-Uni annonce la livraison à l'armée ukrainienne de 14 chars lourds Challenger 2 et de 30 obusiers. D'autres pays européens doivent procéder à la livraison de blindés lourds. La Pologne attend le feu vert allemand pour faire de même. La France conforte son aide militaire et livrera prochainement à l'Ukraine des chars de combat légers AMX-10 RC ; nous ne pouvons que le saluer.
Cependant, compte tenu de la gravité de la situation et du nombre d'Ukrainiens qui perdent la vie chaque jour, la France et l'ensemble des pays européens ne peuvent pas différer plus longtemps la livraison des matériels blindés encore plus performants qui servent aujourd'hui à l'entraînement de nos armées et que l'Ukraine réclame avec insistance.
La livraison de chars lourds, de missiles et de lanceurs sol-air permettrait aux forces ukrainiennes de protéger davantage les civils et d'être équipées d'un matériel de qualité reconnue.
Même si ces équipements ne sont pas disponibles dans l'immédiat et s'ils nécessitent une formation et une logistique spécifiques, nous nous devons de répondre à une demande légitime de l'Ukraine, afin de lui permettre de résister aux innombrables attaques de l'ogre russe, qui cherche par tous les moyens la destruction et l'asservissement de son voisin slave.
Monsieur le ministre, allez-vous compléter la livraison des chars AMX 10 RC par des chars Leclerc et de nouveaux systèmes antimissiles ?
(Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des armées.
M. Sébastien Lecornu, ministre des armées. Monsieur le sénateur Bonneau, permettez-moi de m'associer au nom du Gouvernement à votre message de condoléances au peuple et au gouvernement ukrainiens, à la suite du terrible drame qui a eu lieu ce matin et qui a coûté la vie au ministre de l'intérieur de ce pays.
Je commencerai par rappeler les trois critères que nous examinons à chaque fois que nous procédons à une cession d'armes à l'Ukraine ; c'est, en quelque sorte, notre doctrine.
Le premier critère, connu du Sénat, est évidemment la logique défensive dans la maîtrise de l'escalade.
Le deuxième, contrôlé régulièrement par votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, est de ne pas détériorer notre modèle de sécurité et de défense, soit parce que les délais de recomplètement seraient trop lents, soit tout simplement parce que la nature des équipements cédés pourrait nuire à notre système de défense.
Le troisième, et non des moindres, est le maintien en conditions opérationnelles des équipements qui ont déjà été donnés à l'Ukraine. Cela devrait être délicat dans les semaines et les mois à venir. C'est un enjeu de taille pour les canons Caesar. Sur les dix-huit canons livrés à l'Ukraine, l'un, vous le savez, est malheureusement désormais complètement hors d'usage. La question des chars Leclerc est particulièrement sensible et centrale en matière de maintien en conditions opérationnelles.
Le Président de la République a demandé au Gouvernement de proposer une solution rapide. À cet égard, l'AMX-10 est une réponse saluée par les Ukrainiens. Le chef de l'État a par ailleurs demandé au chef d'état-major des armées et à moi-même d'instruire la demande de chars Leclerc en prenant en compte les trois critères que je viens de vous indiquer.
D'autres cessions pourront être envisagées dans les temps qui viennent. On parle beaucoup des chars ce mois-ci ; au mois de décembre, on parlait beaucoup de la défense sol-air. Je rappelle que, sur le segment de défense sol-air, nous aurons des choses à proposer à l'Ukraine dans les prochaines semaines, notamment sur les couches les plus élevées de défense du territoire ukrainien.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour la réplique.
M. François Bonneau. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. L'Ukraine doit gagner cette guerre : il y va de l'avenir du monde libre. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI, INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
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