M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
« Évidemment, si vous reportez l'âge légal [à 64 ans], elles sont un peu [plus] pénalisées. […] Sur ce point-là, elles sont un peu plus impactées que les hommes. » Est-ce un syndicaliste ou un opposant à votre réforme des retraites qui a tenu ces propos, monsieur le ministre ? Non ! La réalité des conséquences de votre réforme des retraites est reconnue par le ministre Riester…
Vous ne pouvez pas dire que ce sont des mensonges ! Avec votre réforme, les femmes vont devoir en moyenne travailler sept mois de plus pour partir à la retraite, contre cinq mois supplémentaires pour les hommes. Cette réforme, profondément injuste pour l'ensemble des salariés, l'est encore plus pour les femmes.
(Marques d'approbation sur les travées du groupe SER.)
Votre réforme va donc aggraver les inégalités entre les femmes et les hommes. Commencez plutôt par imposer l'égalité salariale entre les sexes, pour dégager 6 milliards d'euros de cotisations de retraite supplémentaires !
Je pense à ces ouvrières et à ces ouvriers de la marée à Boulogne-sur-Mer, au travail dès deux heures du matin, ou à celles et à ceux des industries agroalimentaires, debout derrière leur chaîne toute la journée, qui ont commencé leur carrière tôt. Ces travailleurs vont cumuler tous les aspects négatifs de votre réforme.
Je pense aux aides à domicile, aux soignantes, aux infirmières, aux femmes de ménage et aux caissières, que vous applaudissiez durant la crise sanitaire et qui, si elles appartiennent à la génération de 1972, devront travailler neuf mois supplémentaires.
À l'issue du conseil des ministres, vous avez reconnu, monsieur le ministre, que le recul de l'âge légal serait plus défavorable aux femmes qu'aux hommes dans un premier temps. Par vos propres aveux, vous établissez l'injustice de votre texte. Nous vous demandons de le retirer et d'organiser un véritable débat dans le pays.
(Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER. – M. Daniel Breuiller applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice Apourceau-Poly, je reviendrai en quelques mots sur les faits que vous évoquez et sur la lecture qui peut parfois être faite de l'étude d'impact accompagnant le projet de loi de réforme des retraites. Je rappellerai à cette occasion quelques évidences, qui méritent d'être versées au débat.
L'âge d'ouverture des droits sera-t-il différent entre les hommes et les femmes ? Non !
La durée de cotisation requise entre les hommes et les femmes sera-t-elle différente ? Évidemment non !
Quelles sont les conséquences de la réforme que nous défendons ? Un rapprochement de l'âge effectif de départ – je ne parle pas de l'âge légal – s'opère entre les hommes et les femmes. Pourtant, vous l'avez certainement noté, madame la sénatrice, à la lecture de ce rapport d'évaluation,…
M. Pascal Savoldelli. Vous avez refusé l'étude d'impact !
M. Olivier Dussopt, ministre. … en 2030, les femmes continueront de partir à la retraite en étant plus jeunes que les hommes.
Pourquoi ? Parce que nous maintenons l'intégralité de ce que nous appelons les droits familiaux (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), à savoir les quatre trimestres automatiquement attribués aux femmes dans le régime général, à l'occasion d'une maternité, ou les deux trimestres dans le régime de la fonction publique. Vous savez d'ailleurs que les quatre trimestres du régime général peuvent être répartis librement entre les membres du couple.
Vous avez aussi lu dans ce même rapport d'évaluation, madame la sénatrice, que les mesures que nous prenons, en matière d'éligibilité à la retraite minimale garantie comme en matière d'éligibilité au départ anticipé au bénéfice des carrières longues, sont favorables aux femmes : nous intégrons les trimestres cotisés de la part des parents au foyer au titre de l'assurance vieillesse dans les trimestres requis.
Sous l'autorité de la Première ministre, nous avons veillé scrupuleusement, dans chacune des décisions que nous avions à prendre, à protéger les plus fragiles.
Tous les exemples que vous avez cités, tous les métiers que vous avez évoqués font partie de ceux qui seront mieux protégés et mieux accompagnés, tant par les dispositifs de pénibilité que par le nouveau dispositif de prise en compte des carrières longues pour ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans. Je suis sûr que, dans le débat, nous trouverons des convergences sur ces points-là.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la réplique.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le ministre, vous avez refusé de réaliser une étude d'impact. Vous êtes aujourd'hui incapable de nous donner le nombre de Françaises et de Français qui bénéficieraient des 1 200 euros brut…
Monsieur le ministre, il y a dix ans, vous étiez le grand défenseur de la retraite à 60 ans. Vous avez changé d'avis entre-temps, mais ce n'est pas étonnant de votre part. (Marques de désapprobation sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)
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