M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour le groupe Les Républicains.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, le 8 décembre dernier, dans un entretien à la presse, vous annonciez, avec fierté, une baisse de la délinquance. Je vous cite : « Une baisse timide, mais une baisse quand même. » Or, hier, paraissaient les chiffres de la délinquance dans notre pays : violences sexuelles, + 11 % ; coups et blessures, + 14 % ; cambriolages + 11 % ; vols de véhicules, + 9 %.
Avec 879 victimes de crimes en 2022, nous sommes désormais face au niveau le plus élevé depuis trente ans. Ces chiffres ne proviennent ni de Libération ni de L'Humanité. Ce sont les chiffres officiels de votre ministère, et nul ne pourra donc les contester.
Cependant, derrière ces chiffres, il y a des réalités. Des Françaises et des Français vivent dans la peur. L'insécurité est devenue une triste réalité, qui n'a cessé de croître pendant les quinquennats d'Emmanuel Macron.
Mon département de Lot-et-Garonne, à l'image des autres, souffre cruellement de cette politique. Le quotidien de nos forces de l'ordre est extrêmement difficile : manque de moyens humains et de matériel, découragement – le mot est faible –, absence de réponse pénale, voyous qui font la loi partout et qui n'ont peur de rien ni de personne.
Mme Martine Filleul. C'est nuancé !
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Oui, les policiers et les gendarmes font ce qu'ils peuvent, mais encore faudrait-il des condamnations fortes.
M. Vincent Éblé. Ah…
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Vous ne pouvez pas sans cesse renvoyer la faute sur vos prédécesseurs. L'insécurité, monsieur le ministre, n'est pas une fatalité. Elle est le résultat d'un manque de courage et d'une absence de volonté politique.
Monsieur le ministre, face à cette délinquance explosive, le Gouvernement est-il vraiment en capacité de protéger les Français ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Duffourg applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice, puisque la justice, selon vous, n'est pas au rendez-vous de ses obligations, je vais me faire un plaisir de répondre à cette question adressée à l'origine au ministre de l'intérieur.
Tout d'abord, évoquer les questions de délinquance en deux minutes est une gageure.
M. Jérôme Bascher. Mais c'est l'exercice !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Quelle est la part du confinement dans l'augmentation, ou éventuellement dans la diminution, de certaines infractions ? Quelle est la part de la libération de la parole dans celle des violences intrafamiliales ?
Plus de forces de l'ordre, c'est aussi plus de faits constatés sur la voie publique (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains) et, d'une certaine façon, une augmentation de la délinquance. Je me permets de vous le dire !
M. Vincent Segouin. Il fallait oser !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Les escroqueries ont augmenté, mais nous avons mis en place la plateforme Thésée (Traitement harmonisé des enquêtes et signalements pour les e-escroqueries), qui permet de mieux les appréhender.
Madame la sénatrice, durant cette période, le taux de poursuite a progressé de 13 %. Les peines de prison ferme en matière correctionnelle sont passées, en moyenne, de 6,7 mois à 8,3 mois entre 2017 et 2022. La justice n'est donc pas laxiste ; elle est au rendez-vous des obligations qui sont les siennes.
M. Jérôme Bascher. Donc tout va bien ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Une fois encore, parler de la délinquance en deux minutes est une véritable gageure. Ce sujet mérite de plus amples explications.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. C'est en effet une façon de voir les choses, monsieur le garde des sceaux, mais ce n'est pas celle des Français.
Pierre Dac disait : « Certaines personnes jouent aux échecs, d'autres les collectionnent. » (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est navrant de reconnaître que le Président de la République est davantage collectionneur que joueur. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Alain Duffourg et Stéphane Ravier applaudissent également.)
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