M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le groupe CRCE apporte également tout son soutien aux populations de Turquie et de Syrie.
J'en viens à ma question. Les tarifs autoroutiers viennent d'augmenter de 4,75 %, alors que les profits des concessionnaires explosent. Depuis la privatisation, c'est le même constat : profits démesurés, péages toujours plus chers !
En revanche, ce qui est nouveau, c'est que désormais, au sein même de Bercy, ce constat interroge et même, d'une certaine façon, scandalise. La presse s'est ainsi fait l'écho d'un rapport de 2021 très instructif de l'inspection générale des finances. Il explique que ces entreprises ont une rentabilité très supérieure à celle qui était attendue et que cette rentabilité va à l'encontre du principe de rémunération raisonnable au point que ses auteurs demandent à l'État de réagir, notamment en dénonçant les conventions – ils estiment d'ailleurs que cette position est juridiquement fondée.
Les sommes en cause permettraient une réduction de près de 60 % des péages ou un prélèvement allant jusqu'à 55,4 milliards d'euros pour l'État – une paille !
L'Autorité de régulation des transports a beau contester la surrentabilité, elle constate néanmoins une hausse des bénéfices de 47 % en 2021. Un rapport sénatorial pointait déjà en 2020 « la rentabilité hors normes » de ces sociétés.
L'État ne peut plus faire l'autruche chaque fois que les parlementaires demandent des comptes ou proposent la renationalisation des autoroutes – c'est la position que défend notre groupe.
Monsieur le ministre, comment justifiez-vous que l'État ne fasse pas tout pour faire baisser les péages et mettre fin aux concessions actuelles ? Êtes-vous prêt à travailler avec le Parlement sur l'hypothèse d'une renationalisation ?
(Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Avant de répondre à Mme la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann, je voudrais compléter en quelques mots ma réponse à M. Delahaye : le Gouvernement est prêt à travailler avec vous, monsieur le sénateur, sur l'avenir des concessions et la manière dont il convient d'en préparer la sortie, quand nous aurons clos la phase contentieuse que j'évoquais tout à l'heure, donc certainement après le mois de mars prochain.
Madame la sénatrice, le Gouvernement est-il prêt à travailler à la perspective de la renationalisation des autoroutes ? Ma réponse est la même que celle que la Haute Assemblée a apportée à la proposition de loi déposée par votre groupe : non.
(Ah ! sur les travées du groupe CRCE.)
La renationalisation, c'est 50 milliards d'euros ! Or nous avons la conviction que nous devons utiliser cette somme non pas au service de la route, mais plutôt au service de la décarbonation des transports – reports fluviaux, investissements dans le ferroviaire, etc.
Dépenser de l'argent pour racheter les autoroutes irait à l'encontre de la transition écologique et se traduirait à la fin par une mauvaise allocation des ressources publiques.
M. Fabien Gay. Et les dividendes ?
M. Christophe Béchu, ministre. Je vous signale d'ailleurs que le fameux rapport sénatorial que vous avez vous-même cité, madame la sénatrice, a justement abouti à la conclusion que la renationalisation était une fausse bonne idée, une mauvaise piste.
(Brouhaha sur les travées du groupe CRCE.)
La véritable question est de savoir comment augmenter la contribution des sociétés d'autoroutes. C'est dans cette voie que nous nous sommes engagés dans le cadre de la loi de finances pour 2020, en indexant sur l'inflation la taxe d'aménagement du territoire. Je rappelle aussi, de ce point de vue, la victoire juridique que nous avons enregistrée au début du mois de janvier et dont j'ai déjà parlé.
Nous continuons à travailler dans ce sens avec le même objectif : financer viala route une partie du report modal. D'ailleurs, nos réflexions sur l'équilibre général des contrats de concession doivent intégrer la question de la décarbonation, y compris celle des transports routiers, qui nécessite d'importants engagements.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il n'y a pas que des dépenses ; il y a aussi des recettes !
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