M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC.)
M. Franck Menonville. Monsieur le ministre de la transition écologique, l'interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035 a été validée par le Parlement européen le 14 février dernier. Le vote des représentants des États membres pour l'entériner devait avoir lieu hier. Heureusement, il a été reporté sine die grâce à l'abstention de l'Allemagne. Dorénavant, plusieurs pays s'opposent au tout électrique, mettant en avant leurs doutes quant à l'incidence de cette évolution technique et technologique sur l'industrie.
Cette interdiction n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact préalable. Les conséquences pourraient être très lourdes : disparition de centaines de milliers d'emplois en Europe ; désindustrialisation historique au profit de la Chine ou d'autres pays peu respectueux de l'environnement ; perte de capacité d'innovation, notamment en matière de carburants propres.
De plus, il faut tenir compte de l'utilisation des véhicules électriques, qui n'est absolument pas adaptée à nos territoires ruraux en matière d'autonomie de batterie, de distance à parcourir et de matériel de recharge. Sur le cycle de vie du produit, son empreinte écologique n'est pas neutre. On sait que la production des batteries et leur recyclage soulèvent de nombreuses difficultés et accentuent notre dépendance.
Renault, par la voix de son président, Jean-Dominique Senard, pense que, en 2050, grâce à la recherche-développement, le moteur thermique pourrait disposer du même bilan carbone que l'électrique.
Loin de moi l'idée d'opposer thermique et électrique, mais je veux néanmoins rappeler que notre pays est l'un des leaders des petits moteurs diesel et que nous disposons encore de grandes capacités d'évolution et d'innovation.
Ne nous enfermons donc pas dans le tout électrique en excluant le thermique, mais mobilisons-nous plutôt pour une mobilité toujours plus propre !
Monsieur le ministre, quelle est la position de la France sur ce dossier ? Nous devons protéger notre industrie automobile et nos compétences, garantir nos intérêts…
M. le président. Il faut conclure !
M. Franck Menonville. … et ne nous fermer aucune piste de développement et d'innovation.
(Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Menonville, le 29 juin dernier, l'Union européenne a validé la réglementation que vous évoquez, par le biais d'un accord entre États membres, et un vote est intervenu le 14 février dernier. Depuis quelques jours, l'Allemagne menace, pour des raisons politiques internes relatives à sa coalition gouvernementale, de ne pas tenir sa parole.
(Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)
Si les choses devaient en rester là, ce serait à la fois un très mauvais signal au regard de nos engagements climatiques et un danger pour notre industrie.
(Protestations sur les mêmes travées.)
Les émissions de gaz à effet de serre des véhicules thermiques sont plus importantes, à elles seules, que toutes les émissions agricoles, que toutes les émissions industrielles, que toutes les émissions liées à la construction.
Les biocarburants sont une impasse. Nous n'avons pas la surface nécessaire pour compenser les hydrocarbures et nous en aurons besoin pour le maritime et l'aérien. Il faudra utiliser le e-fuel, les carburants de synthèse, pour les moteurs qui ne pourront pas être électrifiés, en particulier dans l'aérien et le maritime, si l'on veut viser la neutralité carbone.
L'échéance de 2035 signifie non pas la fin des moteurs thermiques, mais la fin de la vente des moteurs neufs. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) Les véhicules diesel ou hybrides continueront évidemment à circuler.
Monsieur le sénateur, je sais que votre intérêt pour l'industrie de notre pays est réel. Avec Clément Beaune et Bruno Le Maire, notre obsession est précisément de faire en sorte qu'un cap clair soit donné aux industriels.
Depuis quelques jours, les constructeurs et équipementiers Valeo, Volkswagen, Stellantis et Renault insistent sur la nécessité de ne pas envoyer de contre-signal au moment où ils investissent des milliards d'euros, par exemple avec le pôle ElectriCity dans les Hauts-de-France, pour être prêts le moment venu.
Ne pas respecter notre engagement reviendrait à se laisser tailler des croupières par l'industrie chinoise, qui fabrique des véhicules électriques avec des usines à charbon. Se préparer au changement, l'assumer et l'accompagner, c'est la voie qui est souhaitable, à la fois pour le climat, pour l'industrie et pour nos emplois. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)
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