M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
(Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Dany Wattebled. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de l'industrie.
Monsieur le ministre, laissez-moi vous lire la lettre d'un salarié de l'usine Buitoni, à Caudry, adressée à son employeur, le groupe Nestlé : « Courant mars 2022, j'apprends que toute la production de pizzas est rappelée par Nestlé. Que se passe-t-il ? C'est inquiétant. On me demande de rester chez moi. J'apprends que le fruit de mon travail aurait handicapé et tué des enfants.
« Qu'est-ce que j'ai fait ? Je suis père, moi aussi, je suis rempli de honte et je pleure. Le soir, je vais en famille au restaurant du coin, où tout le monde me connaît. À mon arrivée, quelqu'un m'interpelle : “Voilà l'assassin de chez Buitoni !” Je ne réponds pas. Nous partons.
« Les chaînes d'info nous accablent : “Comment les salariés pouvaient-ils travailler dans ces conditions ? Ils sont sales, c'est bien fait pour eux !” Je me demande pourquoi Nestlé ne prend pas la parole pour dire que ses employés ne sont pas responsables de ce drame.
« Début janvier, après une fermeture administrative et le nettoyage complet du site, les activités reprennent, mais les commandes ne sont pas au rendez-vous. La direction suspend la production et annonce la fermeture du site. »
Voilà, monsieur le ministre, résumée en quelques mots, la détresse que vivent depuis douze mois les 150 employés de l'usine de Caudry.
Durant la même semaine, la fermeture de l'usine Tereos à Escaudœuvres a été annoncée, menaçant, encore une fois, 150 emplois. Cette usine produit du sucre : il s'agit de l'une des filières d'excellence française, mais, à force d'appliquer les normes de manière plus draconienne que ne le font nos voisins, nous sommes en train de détruire notre filière betteravière.
Alors que le Gouvernement parle de réindustrialisation des territoires, je peux malheureusement d'ores et déjà vous annoncer que d'autres fermetures vont suivre.
Il s'agit d'énormes coups de massue pour le Cambrésis et le Caudrésis, des territoires qui se trouvent déjà en grande difficulté.
Monsieur le ministre, quels moyens comptez-vous déployer pour sauvegarder ces usines ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'industrie.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie. Monsieur le sénateur Wattebled, je vous remercie d'avoir rappelé avec émotion les mots que j'ai, moi aussi, entendus lundi, alors que nous étions ensemble à Caudry pour rencontrer les salariés de cette usine.
Vous l'avez dit, ceux-ci ont pris comme un coup de massue l'annonce de la suspension d'activité de la chaîne de production, après avoir vécu comme une énorme injustice les accusations qui sont portées contre eux depuis un an.
Certains de ces ouvriers ont été traités d'assassins, alors qu'ils ne sont évidemment en aucun cas responsables du drame sanitaire qui a affecté l'usine de production Buitoni, il y a un an. Il est hors de question qu'ils soient les victimes collatérales de ce drame sanitaire.
J'ai rencontré la direction, mes équipes travaillent avec les autorités du groupe Nestlé pour trouver d'autres solutions. Je souhaite que l'on produise, dans l'usine de Caudry, des pizzas ou autre chose – je ferai tout pour cela.
Cette nouvelle extrêmement triste s'est accompagnée d'une autre information qui ne l'était pas moins : non loin de Caudry, à Escaudœuvres, Tereos a décidé de fermer l'une de ses usines. Cela arrive, et cela pourrait arriver encore à l'avenir, mais pas quand une entreprise gagne de l'argent alors qu'elle en perdait il y a encore quelques années, pas quand une entreprise se désendette alors qu'elle était endettée il y a quelques années, pas quand une entreprise bénéficie d'un prix du sucre au plus haut et d'un marché en pleine expansion.
M. Pascal Savoldelli. Et alors ?
M. Roland Lescure, ministre délégué. J'ai demandé des explications à la direction. Une rencontre est organisée demain, avec le préfet et les élus – vous y êtes d'ailleurs convié, monsieur le sénateur –, parce que je souhaite obtenir des précisions sur les raisons pour lesquelles une entreprise qui va mieux et qui marche ferme une usine, ce qui emporte des conséquences très importantes dans la région.
M. Pascal Savoldelli. Et après ?
M. Roland Lescure, ministre délégué. Par ailleurs, je l'ai dit sur place avec vous lundi et je le répète : nous avons d'ores et déjà annoncé le déploiement de 3 millions d'euros dans le cadre du dispositif Rebond industriel, afin d'accompagner les entreprises locales qui souhaitent investir dans la réindustrialisation du territoire. Il y en a.
Le Nord va mieux, monsieur le sénateur. Des gigafactoriessont en train de se monter à une ou deux heures de Caudry, qui créeront des milliers d'emplois.
M. le président. Il faut conclure !
M. Roland Lescure, ministre délégué. Nous ne devons pas pour autant abandonner les territoires délaissés, notamment le vôtre. Nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
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