M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste.
(Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, il y a un an tout juste, j'interrogeais votre prédécesseur sur les leçons à tirer du tragique assassinat de Samuel Paty, dont nous célébrions il y a un mois le triste anniversaire. Ma question rejoint celle de mon collègue François Bonhomme, qui évoquait le département de Tarn-et-Garonne, mais le sujet est suffisamment important pour qu'on s'y attarde. Vous vous en doutez bien, l'affaire du lycée Antoine Bourdelle de Montauban a très profondément choqué le corps enseignant.
Monsieur le ministre, votre circulaire du 9 novembre dernier est supposée éclairer l'application de la loi de 2004 sur la laïcité à l'école. Malheureusement, on constate tous les jours dans les établissements que cette circulaire laisse souvent enseignants et chefs d'établissement bien seuls face à des phénomènes de revendication religieuse et de radicalisation, en particulier face à de nouvelles manières d'affirmer son identité culturelle et religieuse, dont l'abaya est un parfait exemple. De quoi s'agit-il ? D'une longue robe, qui recouvre tout le corps sauf la tête et les mains. Bien que ce vêtement ne soit pas originellement de nature religieuse, ne soyons pas naïfs, son usage l'est clairement aujourd'hui.
La loi de 2004 dispose que, à l'école, « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit ». Quelle est la doctrine de l'éducation nationale sur l'abaya au regard de la loi ? Vous n'avez pas répondu, monsieur le ministre. Ce vêtement est-il considéré comme une manifestation ostensible d'appartenance religieuse ? Malgré les précisions de la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté sur ce sujet, rien n'est clair.
L'incident de Montauban soulève une fois encore le problème de la formation et de la protection du corps enseignant, surtout au regard du danger représenté par les smartphones et les réseaux sociaux, véritables condensateurs de haine et de violence.
Monsieur le ministre, la formation au métier d'enseignant comporte-t-elle des mises en situation concrètes, notamment pour les contractuels ? Leur apprend-on à réagir face à de telles provocations et agressions ? Sur la protection, a-t-on réellement avancé depuis l'assassinat de Samuel Paty ?
(Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
M. Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Levi, les signalements effectués traduisent trois phénomènes.
Le premier est celui des réseaux sociaux, où se multiplient des défis depuis le mois de septembre. Nous nous plaignons auprès des responsables de ces réseaux de la lenteur et de la faiblesse de la modération. Il faut avouer que, sur ce terrain-là, nos armes juridiques sont limitées. Je mets en garde les élèves contre ces influenceurs de mauvais aloi.
Le deuxième phénomène est que, comme l'année dernière, l'hommage à Samuel Paty s'accompagne toujours, malheureusement, de contestations.
Le troisième phénomène est l'accroissement de notre vigilance : nous faisons remonter des rectorats tous les signalements. J'ai décidé une production de chiffres mensuels, ce qui permet de faire de ces données un meilleur outil de pilotage.
Pourquoi ne faut-il pas préciser le type de vêtement visé par la loi de 2004 ? Parce que nous nous aventurerions sur un terrain extrêmement complexe. D'un point de vue juridique, l'abaya n'est pas simple à définir (Mme Valérie Boyer s'exclame.), et nous serions contournés la semaine suivante par une longueur de robe, par une forme de col, par tel ou tel accessoire qui prolongerait le problème de semaine en semaine et nous contraindrait à multiplier les circulaires, ce qui nous emmènerait directement au tribunal administratif, où nous perdrions.
(Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
C'est la loi de 2004 qui doit être appliquée, avec fermeté et avec sang-froid.
(Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre, ce que veulent les enseignants, c'est une réponse claire. Votre circulaire du 9 novembre n'est pas claire. Finalement, quand je vous écoute, je me dis que la solution serait peut-être d'imposer un uniforme… (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
2 commentaires :
Le 22/09/2023 à 10:30, aristide a dit :
Rappelons que la loi de 2004 est anticonstitutionnelle, et anti-laïque. La République ne reconnait pas les cultes, et donc pas plus les foulards que les abayas. Sans compter qu'un foulard n'est pas forcément religieux, on a donc une interprétation du faciès de la fille permettant l'interprétation de la nature du foulard, ce qui est du pur racisme.
Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui
Le 22/09/2023 à 10:54, aristide a dit :
" je me dis que la solution serait peut-être d'imposer un uniforme…
On ne va pas imposer un uniforme aux jeunes Français dans le seul but de satisfaire votre islamophobie, quand même...
Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui