M. Pierre Médevielle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
Monsieur le ministre, mardi 15 janvier dernier, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'autorisation de mise sur le marché du Roundup Pro 360. La juridiction appuie sa décision sur le fait que l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, aurait commis une erreur d'appréciation au regard du principe de précaution en autorisant la commercialisation de ce produit au mois de mars 2017.
La communauté scientifique dans sa majorité, le monde agricole et les industriels ne comprennent absolument pas ce type de décision totalement arbitraire.
À la demande de l'OPECST, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, mon collègue Pierre Ouzoulias et moi-même remettrons prochainement un rapport analysant les dysfonctionnements possibles et la crise de confiance naissante vis-à-vis de nos agences d'expertise. Notre travail mettra en valeur le souci d'harmonisation et de cohérence dans nos politiques d'évaluation.
Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que ce type de décision discrédite totalement le travail remarquable de l'ANSES, dont l'indépendance et les compétences ne sont plus à démontrer ?
En quoi les tribunaux administratifs sont-ils compétents pour traiter ce genre de dossiers ? Ne craignez-vous pas une surenchère dans la suppression des autorisations de mise sur le marché, au nom du principe de précaution ?
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Pierre Médevielle, la décision du tribunal administratif de Lyon n'a pas vocation à être commentée, pas plus par moi que par le Gouvernement dans son ensemble.
Il ne faut pas opposer décisions de justice et décisions scientifiques, principe de précaution et rationalité. Ce que je peux vous dire en revanche, c'est qu'en tout état de cause le Gouvernement tout entier, sous la houlette du Premier ministre, est mobilisé à la fois pour faire muter l'agriculture et pour donner aux agriculteurs les moyens de participer à cette transition agroécologique, qui est absolument indispensable.
Le chef de l'État a demandé l'interdiction en France du glyphosate avant le 1er janvier 2021, alors que celle-ci interviendra beaucoup plus tard en Europe.
Mme Buzyn, M. de Rugy et moi-même avons demandé à l'ANSES de revoir toutes les mises sur le marché pour savoir ce qu'il en est réellement.
Je ne crois pas qu'il faille opposer les uns et les autres. D'ores et déjà, le Roundup est interdit depuis le 1er janvier dernier pour les particuliers ; toute dispersion avant les récoltes le sera dès le 1er février prochain, afin de protéger d'éventuels risques, le principe de précaution étant ainsi appliqué.
Je le répète, aujourd'hui, il ne faut pas opposer le principe de précaution et les analyses scientifiques. Les scientifiques doivent faire leur travail. Nous connaissons parfaitement la demande de la société pour que s'applique le principe de précaution quand est en jeu la santé de nos concitoyens. Mon rôle, celui du Gouvernement, c'est de protéger nos concitoyens et, dans le même temps, de donner à l'agriculture les moyens non seulement de muter, mais de continuer à être compétitive, à gagner des parts de marché à l'extérieur, à se développer à l'échelon local grâce aux circuits courts.
Comme l'a très bien dit le Président de la République – c'est la position du Gouvernement –, aucune filière, aucun paysan ne sera laissé sans solution.
(Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour la réplique.
M. Pierre Médevielle. Monsieur le ministre, protéger la population, d'accord, mais il faut aussi protéger les agriculteurs. Notre agriculture doit redevenir l'un des fers de lance de notre économie. Or elle occupe aujourd'hui un cinquième rang totalement indigne de son potentiel. S'abriter derrière le principe de précaution, c'est l'obscurantisme scientifique, c'est le recroquevillement sur soi-même.
Comment peut-on nourrir l'ambition d'une agriculture productive et compétitive à l'échelon européen et mondial et faire subir à celle-ci les états d'âme de juges archaïques et incompétents, ainsi que les phobies et les élucubrations de tous les prédicateurs de la lampe à huile ? Il va falloir faire des choix. Il faut retrouver l'ambition, l'audace et faire confiance à nos chercheurs, à nos experts, à nos agences. C'est ainsi que nous retrouverons le chemin du progrès et de la sécurité.
Vive la République, vive l'agriculture et vive la science !
(Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Bizet. Vive la science !
1 commentaire :
Le 13/05/2019 à 14:32, fabienne a dit :
Monsieur le Sénateur Pierre Médevielle
Pourquoi ne pas encourager à grande échelle la permaculture qui évite l'utilisation de tout produit chimique dans le respect de l'environnement ? notamment le glyphosate.
La terre se cultive elle-même, naturellement, par la pénétration des racines des plantes et l’activité des microorganismes, des petits animaux et des vers de terre.
Si utilisation de produits chimiques, tout cela devient impossible puisque l'homme le détruit (notamment les microorganismes, les vers de terre, les abeilles...)
"Si les abeilles disparaissent de la surface du globe, l'homme n'aurait plus que quatre années à vivre" (Albert Einstein)
Les répercussions de toute utilisation de produits chimiques ont donné des cauchemars à des générations innombrables d’agriculteurs et certains sont depuis atteins de diverses maladies notamment de cancers.
De nombreuses terres sont abandonnées, car trop polluées, dénuées de tout microorganismes, mortes… et cela est prouvé et dans le monde entier, elles sont donc devenues infertiles !
Au cours des cent dernières années, un milliard d’hectares de terres fertiles, l’équivalent de la surface des Etats-unis, se sont littéralement volatilisés. Si rien n’est fait,
c’est la sécurité alimentaire de l’humanité qui pourraient être compromises !
Entre 25 et 40 milliards de tonnes de l’épiderme de la planète sont emportés chaque année à cause de l’érosion, du tassement, de la perte de nutriments et de biodiversité, de l’acidification, des pollutions, de l’engorgement ou encore de la salinisation.
Le contrôle de la dynamique microbienne des sols sera sans doute le moyen le plus efficace de sauver ces terres, même les plus abîmées, en leur fournissant les moyens de doper naturellement leur fertilité.
Il y a urgence : les sols stérilisés par la pollution couvrent 220.000 km2, dont près de 90 % en Europe (en 2016)
Cela passe donc par la permaculture !
Le contrôle de la dynamique microbienne des sols sera sans doute le moyen le plus efficace de sauver ces terres, même les plus abîmées, en leur fournissant les moyens de doper naturellement leur fertilité
Autre exemple, rien qu’en France, il y aurait 300.000 friches industrielles polluées dégazant leurs toxiques ou répandant leurs poisons dans les sols et les nappes phréatiques. « On a par exemple pu mettre en évidence que le lindane, un insecticide interdit depuis 1998, est présent dans tous les sols, y compris là où il n’a pas été épandu »,
Je pourrai, malheureusement, vous citez bien d'autres exemples hélas…
Oui je suis d'accord avec vous, la consommation de viandes doit diminuer, mais cela ne suffit pas Monsieur le Sénateur.
Nous sommes à un tournant de décisions les plus importantes à prendre, nous ne pourrons plus revenir en arrière, il sera trop tard !
Nous devons changer nos manières de consommer, de vivre, et donc de cultiver !
Le glyphosate est ajouté à d'autres produits chimiques ce qui donne des pesticides. Je ne peux croire que ce cocktail de produits est sans conséquences !
Beaucoup d'agriculteurs amoureux de la terre, travaillent différemment.
Ils ont pris conscience que si nous ne faisons rien dès AUJOURD'HUI, pour protéger cette terre, NOTRE TERRE, NOTRE ENVIRONNEMENT A TOUS, nous ne pourrons justement plus rien produire, et cela, pas uniquement au niveau de notre beau Pays qu'est la France.
IL EN VA DE NOTRE RESPONSABILITE A TOUS !
Je vous assure que certains agriculteurs préfèrent de loin gagner moins et être fier de leur travail en nous nourrissant dans le respect de leurs terres, notre terre à tous. Ils pensent et contribuent pour nos futures générations. Ils plantent, sèment, produisent dans le respect de la terre et l'environnement chaque jour. Et cela, pour eux, pour nous, mais aussi pour nos enfants, pour plus tard…
Cela ne leur donne pas plus de travail et n'engendre pas non plus d'augmentation de leurs charges, bien au contraire. Et leurs terres sont saines et fertiles !
Ils ont pour cela, bouleverser complètement leur vie, leur famille, leur travail, en prenant ce risque de produire moins, mais mieux, pour notre avenir à tous !
Allez, Monsieur le Sénateur, à la rencontre de ses nouveaux agriculteurs, je vous assure qu'ils sauront vous convaincre !
Il faut que l'on croie en eux, qu'on les soutienne, et que leurs voisins arrêtent de polluer.
Ce sont eux les vrais professionnels de l'avenir, de notre avenir à tous.
Ce sont des personnes vraiment pleines de bons sens et courageuses !
Sinon, demain il sera trop tard et il est déjà très tard…
Sinon, que restera-t-il pour nos enfants ? vos enfants ?? Monsieur le Sénateur.
Les bonnes décisions, le changement, c'est maintenant !
Faut-il se mettre à genoux pour nos enfants ?
Alors, je me mets à genoux et vous supplie… et vous supplie encore de faire entendre raison tous nos décideurs.
Je vous remercie Monsieur le Sénateur
Fabienne
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