Commission des affaires européennes du mercredi 16 décembre

Réunion du 16 décembre 2009 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

La réunion

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M. Hubert Haenel :

Monsieur le Ministre, le point central du Conseil européen qui s'est déroulé la semaine dernière portait sur la Conférence de Copenhague. Le Conseil européen a notamment précisé l'engagement financier de l'Union européenne. Toutefois, bien sûr, tout se joue à Copenhague et le Conseil européen ne constituait qu'un élément préparatoire. Le Conseil européen a également approuvé le programme de Stockholm. Mais il n'a guère fait, en ce domaine, que consacrer un texte sur lequel le consensus de l'ensemble des États membres avait déjà été recueilli.

En fait, on peut se demander si l'élément le plus nouveau de ce Conseil européen ne réside pas dans l'évocation, par M. Van Rompuy, de sa conception du fonctionnement du Conseil européen résultant du traité de Lisbonne. Je pense que vous allez nous exposer tout cela en détail et nous donner votre propre appréciation.

M. Pierre Lellouche :

Le Conseil européen, dont l'agenda était très dense, a permis d'obtenir des résultats substantiels sur les cinq grands chapitres inscrits à son ordre du jour : les questions institutionnelles, le climat, la situation économique et financière, le nouvel espace de liberté, de sécurité et de justice et les questions internationales.

Cette réunion des chefs d'État et de gouvernement était la dernière sous présidence suédoise et la première selon les règles du traité de Lisbonne, ce qui a eu trois conséquences pratiques.

Tout d'abord, les chefs d'État et de gouvernement se réunissent désormais seuls. Il leur revient en effet de fixer les orientations politiques de l'Europe. Cette évolution est de plus conforme à notre souci de renforcer la « gouvernance » de l'Union européenne. Cette nouvelle situation institutionnelle a pu créer des crispations dans les États gouvernés par des coalitions et on a d'ailleurs assisté à une « rébellion » de certains ministres des affaires étrangères, qui ont menacé d'utiliser le traité de Lisbonne contre les chefs d'État. Il a été décidé que ces ministres pourraient cependant assister à une réunion par an.

Ensuite, ce Conseil européen était le dernier à être présidé par le chef du gouvernement de la présidence tournante. M. Van Rompuy entrera en fonction le 1er janvier et, à compter de cette date, il présidera les réunions du Conseil européen, sans doute dès le mois de février, puisqu'il a fait part de son intention d'organiser une réunion informelle pour débattre des grands enjeux économiques.

Enfin, lors du dîner, M. Van Rompuy a exprimé sa vision du fonctionnement futur du Conseil européen, estimant que ce dernier devait mener de véritables débats d'orientation politique. Dans une déclaration publique, il a délivré quelques messages importants : « Nous devons davantage mettre l'accent sur les décisions politiques au-delà de nos conclusions traditionnelles. Nous devons transmettre un message lisible et visible pour l'opinion publique. [...] Il faut s'attaquer de façon systématique aux grands thèmes. Je crois que le thème majeur de mon mandat sera l'économie. [...] L'énergie est également un sujet majeur. » Ces propos correspondent pleinement aux attentes de la France.

Le Conseil européen a par ailleurs confirmé l'invitation faite au Haut représentant de présenter dès que possible sa proposition relative à la création du service européen d'action extérieure, en vue d'une décision d'ici à la fin du mois d'avril 2010. Sur ce point, je veux souligner, d'une part, que la proposition devra s'inspirer du rapport adopté par le Conseil européen en octobre et, d'autre part, que les États membres continueront à fournir des contributions, afin que les travaux sur le futur service ne soient pas conduits dans « un tête à tête institutionnel » entre Mme Ashton, la Commission et le secrétariat général du Conseil.

Sur la base d'une proposition espagnole, le Conseil européen a souhaité engager la procédure prévue à l'article 48 du traité, afin de mettre en oeuvre ses décisions politiques de décembre 2008 et juin 2009 relatives à la composition du Parlement européen. En pratique, il s'agit de porter, pour la législature courant jusqu'en 2014, le nombre total de députés européens de 736 à 754, et d'augmenter de deux le nombre des députés européens élus en France. La Commission et le Parlement européen seront consultés en vue de la convocation d'une conférence intergouvernementale, qui élaborera un protocole au traité. Cette modification devra être ratifiée par chaque État membre et entrera en vigueur en 2011 ou en 2012. Pour la France, à titre transitoire, deux députés de l'Assemblée nationale deviendront observateurs au Parlement européen, sans doute à compter du printemps 2010. Le Président Accoyer a indiqué que les deux députés seraient prochainement désignés par une élection.

Je voudrais maintenant évoquer les négociations actuelles du sommet de Copenhague sur la lutte contre le réchauffement climatique. La première semaine de négociations a été fructueuse puisque nous avons atteint notre objectif : obtenir un texte reconnu par l'ensemble des États comme base de discussion. De là, les conclusions du Conseil européen permettent à l'Union européenne d'avoir une position commune forte sur six points majeurs.

Le Conseil européen a d'abord rappelé son souhait de dégager à Copenhague un « accord planétaire, global, ambitieux et politiquement contraignant », avec pour objectif commun de maintenir le réchauffement de la planète en-dessous du seuil de 2 degrés. Cet accord doit amener à l'élaboration d'un « instrument juridiquement contraignant » pour la période commençant au 1er janvier 2013, date d'échéance du protocole de Kyoto.

Ensuite, le Conseil européen a souligné la volonté de l'Union européenne de parvenir à un accord en annonçant sa contribution au programme de financement rapide « fast start » pour aider à la mise en place immédiate de mesures d'adaptation au changement climatique dans les pays les plus vulnérables. Cette contribution sera de 2,4 milliards d'euros par an jusqu'en 2012, ce qui représente un peu plus de 30 % de l'effort international global pour ce programme, évalué au total à 7 milliards d'euros. La contribution française s'élèvera à 420 millions d'euros par an, et les contributions de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni représenteront plus de 30 % de l'effort communautaire.

Les conclusions du Conseil mentionnent, comme nous le souhaitions, la nécessité de consacrer une part du financement rapide à la lutte contre la déforestation, qui est la cause de 25 % des émissions de CO2 dans le monde. La lutte contre la déforestation faisait l'objet, aujourd'hui, d'une réunion entre la France et les pays du bassin du Congo. Mais nous avons également effectué un travail en commun avec les pays du bassin de l'Amazone et la Russie.

Le Conseil européen a par ailleurs rappelé la disponibilité de l'Union européenne pour prendre une part équitable au financement des efforts à long terme. C'est dans ce contexte que s'inscrit le débat sur la création de financements innovants tels qu'une taxe sur les transactions financières ou qu'une taxe, évoquée par le Premier ministre Gordon Brown, sur les revenus provenant des politiques de réductions d'émissions du secteur des transports maritime et aérien. La Commission a été invitée à faire un rapport sur ces projets de financements.

L'Union européenne a également confirmé sa disponibilité à accroître ses objectifs de réduction d'émission de 20 à 30 % si les autres pays développés s'engagent à des réductions comparables, et si les pays en développement contribuent à l'effort de façon appropriée en fonction de leurs responsabilités et de leurs capacités respectives.

Enfin, pour la première fois, les conclusions du Conseil précisent que « l'Union européenne soutiendra les efforts visant à renforcer la gouvernance internationale en matière d'environnement », ce qui constitue un premier pas en faveur du projet d'organisation mondiale pour l'environnement que nous appelons de nos voeux.

Nous entrons maintenant dans une phase cruciale de négociation à Copenhague. Jeudi et vendredi soirs, les chefs d'État et de gouvernement se réuniront pour l'aboutissement des travaux et la signature d'un accord politique. Tout en ayant contribué à élaborer cette position européenne, la France a apporté sa contribution spécifique en développant des positions communes avec d'autres États, tels que le Brésil ou les pays africains. La France a aussi contribué à la venue du Président Obama lors du sommet de Copenhague.

J'en viens à l'analyse par le Conseil européen de la situation économique actuelle, qui demeure incertaine. Les prévisions économiques laissent entrevoir une légère reprise de l'activité économique mais les conditions d'un retour durable de la croissance ne sont pas encore réunies. Face à cette situation, le Conseil européen estime que les mesures de soutien à l'économie ne pourront cesser que lorsque la reprise sera assurée. Toutefois, les travaux sur la sortie de crise doivent être vite engagés pour définir des stratégies crédibles et coordonnées. Ces stratégies vont mettre l'accent sur la nécessité de consolider les finances publiques. Les difficultés actuelles de la Grèce soulignent la nécessité de préserver la crédibilité de ces dernières. Dans le cadre de cette stratégie de sortie de crise, les banques françaises ont remboursé les 13,45 milliards d'euros d'aides à la recapitalisation dont elles avaient bénéficié, cette somme ayant été consacrée au financement du grand emprunt.

Pour faire suite à la stratégie de Lisbonne, une nouvelle stratégie européenne pour la croissance et l'emploi, la stratégie UE 2020, est en cours d'élaboration. Le Conseil européen souligne que cette stratégie doit accroître le potentiel de croissance de l'Union européenne, mieux coordonner les politiques économiques des États membres, permettre la réciprocité avec nos grands partenaires extérieurs, renforcer notre base industrielle et prendre en compte la dimension sociale.

Dans le domaine financier, le Conseil européen a pris note de l'accord politique trouvé par les ministres de l'économie et des finances le 2 décembre sur la supervision financière. Il s'agit maintenant d'obtenir un accord en première lecture avec le Parlement européen afin que la nouvelle architecture de la régulation financière européenne soit en place dans le courant de l'année 2010.

Par ailleurs, faisant suite aux travaux du G20, le Conseil européen a encouragé les États membres à « envisager les solutions possibles pour mettre en oeuvre à court terme de saines pratiques » en matière de rémunération dans le secteur financier. Cette incitation fait écho aux propositions du Premier ministre britannique et du Président de la République sur la taxation des bonus versés en 2010.

L'action coordonnée de la France et du Royaume-Uni, qui s'est manifestée par la publication d'un article commun de M. Gordon Brown et du Président de la République, a permis d'inciter le Conseil européen à encourager le FMI à inclure dans ses réflexions la possibilité d'un prélèvement mondial sur les transactions financières et à demander au Conseil et à la Commission de définir « les principes clés » sur lesquels devraient être fondées ces dispositions internationales.

Le Conseil européen a également adopté le nouveau programme pluriannuel pour l'espace de liberté, de sécurité et de justice entre 2010 et 2014, appelé « programme de Stockholm ». Ce programme va être décliné en objectifs précis à travers un plan d'action, qui devrait être adopté sur proposition de la Commission, d'ici au mois de juin 2010.

Ce programme contient peu d'innovations. Il s'inscrit dans la continuité du programme précédent, le programme de La Haye, et dans celle des travaux de la présidence française de l'Union européenne. Toutefois, le programme rappelle la nécessité de réaliser une politique d'asile européenne avant 2012 et mentionne les objectifs politiques du plan d'action qui sera adopté sous présidence espagnole : poursuite de l'élargissement de l'espace Schengen, suppression des obstacles à la reconnaissance des décisions judiciaires entre États membres, élaboration d'une stratégie de sécurité intérieure, mise en place d'une politique européenne globale en matière de migrations, lutte contre l'immigration clandestine...

Nous allons désormais appuyer la présidence espagnole pour « muscler » le plan d'action, que nous souhaitons ambitieux et concret. L'Union européenne pourra d'ailleurs compter sur les innovations du nouveau traité avec l'extension du vote à la majorité qualifiée ou la création du comité permanent de coopération opérationnelle en matière de sécurité intérieure (COSI), qui assurera la coordination des actions opérationnelles des autorités des États membres en matière de sécurité intérieure. Mon collègue Brice Hortefeux a d'ailleurs présenté au Conseil JAI du 30 novembre, des propositions concrètes pour convaincre nos partenaires de renforcer la lutte contre le trafic de cocaïne en s'appuyant sur le COSI.

Le Conseil européen a fait le point sur plusieurs dossiers de relations internationales.

Vous avez ainsi pu constater qu'il avait adopté une déclaration importante sur l'Iran. Nous avons tout tenté pour amener l'Iran à négocier sur son programme nucléaire mais cet État continue à chercher à gagner du temps et à accumuler de l'uranium faiblement enrichi en violation de cinq résolutions de l'ONU. Après avoir caché un site clandestin à Qom, l'Iran vient d'annoncer la construction de dix nouvelles usines d'enrichissement d'uranium. Le Conseil européen estime désormais qu'il faut envisager des actions supplémentaires à l'encontre de l'Iran si ce dernier continue à se dérober.

Les ministres des affaires étrangères ont aussi soumis aux chefs d'État et de gouvernement une déclaration sur l'Afghanistan pour souligner le rôle que l'Union européenne entendait jouer dans la stabilisation de ce pays et pour signifier les objectifs que nous assignons à la conférence de Londres du 28 janvier, c'est-à-dire la responsabilisation croissante des Afghans pour assurer leur sécurité.

Enfin, les conclusions du Conseil « affaires générales » de décembre sur l'état des négociations d'adhésion ont été confirmées par le Conseil européen.

D'importants progrès, illustrés par des accords de facilitation des visas avec l'Union européenne, ont été réalisés dans l'ensemble des Balkans. Cependant, ces progrès doivent être encore consolidés. L'accord réglant le litige frontalier slovéno-croate devrait être rapidement soumis à référendum en Slovénie. Mais la Croatie doit améliorer sa coopération avec la justice pénale internationale et livrer les criminels de guerre que cette dernière recherche. La situation de la Serbie connaît une réelle amélioration. Cette dernière a conduit les Pays-Bas à adoucir leur position à l'égard de ce pays. Ainsi, un accord intérimaire entre la Serbie et l'Union européenne a été conclu et pourra amener la conclusion d'un accord de stabilisation et d'association dans un délai de six mois si cette amélioration se confirme et, en particulier, si le général Mladic est arrêté.

En revanche, les perspectives éventuelles d'adhésion de l'ancienne république yougoslave de Macédoine (ARYM) sont bloquées en raison des tensions persistantes avec la Grèce à propos du nom du pays. De même, la situation actuelle au Kosovo, dont l'indépendance n'a pas été reconnue par cinq États membres, et en Bosnie, où les responsables politiques sont incapables de faire aboutir les réformes qui doivent permettre de démanteler le quasi-protectorat mis en place depuis quinze ans, empêche tout nouveau progrès.

La politique française dans les Balkans tend à encourager l'intégration des États concernés au sein de l'Union européenne car nous estimons que cette dernière est l'une des conditions de la paix et de la stabilité dans la région.

Je veux enfin évoquer la Turquie pour déplorer l'absence de progrès au regard des objectifs qu'elle s'était engagée à respecter en 2005 dans le protocole d'Ankara. La Turquie n'a pas reconnu l'existence de Chypre et n'a pas ouvert ses ports et ses aéroports au commerce chypriote. Le Conseil a donc rappelé que les mesures restrictives décidées en 2006 seront maintenues aussi longtemps que ces conditions ne seront pas respectées.

Pour conclure, je veux saluer la grande qualité des travaux conduits par la présidence suédoise de l'Union européenne et je souhaite un plein et entier succès à la future présidence espagnole, qui, à compter du 1er janvier, devra se saisir des dossiers majeurs qui attendent l'Union européenne tels que le suivi de la conférence de Copenhague, le paquet de supervision financière, le plan d'action du programme de Stockholm, l'élaboration d'une politique énergétique commune, ou celle de la stratégie UE 2020.

M. Simon Sutour :

Monsieur le Ministre, je vous remercie pour la clarté de votre exposé, en particulier sur la situation de la Turquie, pour laquelle je partage vos préoccupations.

Menant actuellement une réflexion sur la politique de cohésion territoriale de l'Union européenne avec notre collègue Yann Gaillard, je voulais vous faire part de mes inquiétudes relatives à l'évolution des crédits destinés à cette politique dans les futures perspectives financières de l'Union européenne.

Est-il vrai qu'un document informel de la Commission européenne a suggéré des pistes ? Avez-vous eu connaissance d'un tel document ?

Je ne voudrais pas que l'évolution de ces crédits soit dépendante des discussions sur l'avenir de la politique agricole commune.

M. Pierre Lellouche :

La Commission européenne n'a pas confirmé l'existence d'un tel document. Je peux vous dire cependant que la France est prête à débuter les discussions avec ses partenaires sur l'évolution du budget de l'Union européenne. A cet égard, il faut rappeler que la France est aujourd'hui un contributeur net à ce budget pour 5 milliards d'euros par an alors que le Royaume-Uni récupère 1,5 milliard d'euros par an en raison de « son rabais » institué en 1984.

Certains États membres de l'Union européenne ne veulent certes plus de la politique agricole commune actuelle, mais je rappelle que mon collègue Bruno Le Maire a réuni le 10 décembre à Paris les représentants de 21 États membres bien décidés à la poursuivre et qu'ils ont lancé, ensemble, l'« appel de Paris pour une politique agricole et alimentaire commune », c'est un signal politique très important.

Les discussions seront difficiles mais, pour la France, cette politique est plus que jamais stratégique à l'heure où la planète compte environ 9 milliards d'habitants.

M. Didier Boulaud :

Monsieur le ministre, je déplore le contentieux relatif au nom de l'ARYM qui oppose cette dernière à la Grèce car ce conflit nuit à la candidature de l'ARYM à l'Union européenne.

Je voulais donc vous demander pourquoi la France manifestait-elle un soutien sans nuances aux positions grecques dans ce dossier? Est-ce parce que nous espérons lui vendre des chasseurs Rafale ? Est-ce en raison des origines hellènes de la grand-mère de l'actuel Président de la République ?

M. Pierre Fauchon :

J'ai le sentiment que la présidence suédoise n'a pas fait beaucoup progresser l'Union européenne. On peut souligner tout au plus qu'elle a permis la ratification et l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, mais ce dernier constitue-t-il un progrès pour l'Europe ?

J'attends également de savoir si l'adoption du programme de Stockholm se traduira par des actions communautaires concrètes.

Enfin, dans les négociations préparant la conférence de Copenhague, j'ai été étonné que la France, d'une part, travaille à l'élaboration d'une position européenne commune sur la lutte contre le réchauffement climatique, et d'autre part, suscite des initiatives bilatérales avec des États tels que le Brésil, car ces dernières ne me semblent pas conformes à l'intérêt communautaire.

M. Yves Pozzo di Borgo :

Je voulais savoir si les prochaines perspectives financières de l'Union européenne seront préparées par la publication d'une lettre de cadrage des principaux États membres contributeurs comme cela avait été le cas en 2004 ?

M. Christian Cointat :

J'ai d'abord une remarque : nous attendions depuis longtemps la mise en oeuvre du traité de Lisbonne en sachant que ce dernier instituerait deux sièges supplémentaires de députés européens pour notre pays. Aussi, nous aurions pu fixer à l'avance leur méthode de désignation plutôt que de nommer a posteriori deux députés de l'Assemblée nationale comme observateurs.

J'ai également une question : n'est-il pas temps de réfléchir à l'institution de véritables ressources propres pour l'Union européenne afin d'assurer le financement du budget communautaire au lieu de faire de l'artisanat de mauvaise qualité ?

M. Robert Badinter :

L'ancienne république yougoslave de Macédoine est le meilleur appui de la France dans les Balkans et je m'interroge donc sur l'indifférence de notre pays à l'égard de cet État.

La situation du Kosovo semble incertaine. Quant à la Bosnie, son système constitutionnel peut être qualifié de « Macédoine juridique » et nous pouvons légitimement avoir des inquiétudes sur son avenir.

M. Robert del Picchia :

Comme l'a indiqué le président Haenel, notre commission va examiner un nouveau « paquet asile », constitué de deux projets de directives, à la rentrée. Ces derniers paraissent difficiles à mettre en oeuvre dans notre pays. Tout comme la France, l'Allemagne et le Royaume Uni souhaitent en l'état repousser ces textes mais pourriez-vous nous indiquer, Monsieur le Ministre, si d'autres États membres partagent nos préoccupations ?

À l'heure actuelle, nous constatons une très forte augmentation des demandes d'asile en Europe et si l'on n'institue pas une réelle politique communautaire de l'asile, la situation va devenir dramatique.

M. Pierre Lellouche :

Le dossier macédonien est un dossier complexe que je suis attentivement. La France y exprime un principe, celui de la solidarité entre États membres. Mais elle n'ignore pas la situation stratégique de l'ARYM. C'est pourquoi je me rendrai bientôt sur place pour y expliquer notre position.

La présidence suédoise a été un succès. Elle a permis la mise en oeuvre du traité de Lisbonne qui était attendu depuis de nombreuses années. L'adoption du programme de Stockholm ouvre en outre de nouvelles perspectives pour le renforcement de l'espace de liberté, de sécurité et de justice.

Il n'y a aucune divergence d'intérêt, dans les négociations climatiques, entre les positions de l'Union et la démarche franco-brésilienne. Bien au contraire, en allant négocier des positions communes sur la lutte contre le réchauffement climatique avec le Brésil, l'Inde ou les pays africains, la France a travaillé à rapprocher, dans le cadre d'une démarche mondiale, leurs positions de celle de l'Union européenne en vue des débats en cours de la Conférence de Copenhague.

L'Union européenne doit inciter les autres grands acteurs mondiaux à s'engager sur des objectifs ambitieux, comparables aux nôtres (l'Union s'est engagée sur une réduction de 20 %, voire de 30 % en cas d'accord global et satisfaisant, des émissions de CO2 en 2020 par rapport aux niveaux d'émission de 1990).

Il est trop tôt pour savoir si les perspectives financières seront précédées par une lettre de cadrage des États contributeurs nets au budget de l'Union européenne. Je rappelle à ce titre que la France est le seul État contributeur net qui ne bénéficie pas d'un « rabais » et qu'elle aura donc à convaincre les autres contributeurs nets qui, eux, en bénéficient, de s'engager dans une telle démarche.

Certains députés européens comme le Président Alain Lamassoure sont favorables à l'institution d'un impôt européen. Je crois qu'il est temps que les parlementaires nationaux et les députés européens débattent en commun sur l'évolution du budget communautaire et je suis prêt à organiser ce débat au début de l'année prochaine.

La France estime qu'il est essentiel de maintenir les perspectives d'adhésion à l'Union européenne du Kosovo et de la Bosnie-Herzégovine en dépit de leur situation complexe. On y constate en effet des progrès lents, mais réels.

Il existe des difficultés sur le contenu du second paquet asile dont Éric Besson a la charge. Nous espérons néanmoins aboutir à un résultat permettant l'émergence rapide d'une politique communautaire de l'asile. Cela est nécessaire pour les États membres tels que la Grèce aujourd'hui soumis à une pression migratoire énorme.

M. Didier Boulaud :

Je voulais préciser que le refus de la Grèce empêche aussi l'intégration de l'ARYM à l'OTAN. Cela s'est vérifié lors du sommet de Bucarest. La minorité albanophone du pays peut constater simultanément que l'Albanie a déjà intégré l'OTAN.

M. Pierre Lellouche :

La situation de l'ARYM, tout comme le dossier chypriote et le contentieux frontalier croato-slovène, soulignent qu'il n'est pas souhaitable que l'adhésion à l'Union européenne intervienne tant que les problèmes territoriaux des États candidats ne sont pas résolus, au risque d'importer ces derniers au sein de l'Union.