Amendement N° 708 (Rejeté)

Loi d'orientation agricole

Discuté en séance le 7 novembre 2005
Avis de la Commission : Défavorable — Avis du Gouvernement : Défavorable

Déposé le 28 octobre 2005 par : M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet.

Photo de Jean Desessard Photo de Marie-Christine Blandin Photo de Alima Boumediene-Thiery Photo de Dominique Voynet 

I. - Rédiger comme suit le texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article 265 ter du code des douanes :

« Art. 265 ter - Dans les cas où elle est compatible avec le type de moteur utilisé et les exigences en matière d'émissions, la vente et l'utilisation d'huile végétale pure comme carburant est autorisée en conformité avec la directive 2003/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 mai 2003 qui précise, dans son article 2, qu'on entend par « biocarburant », un combustible liquide ou gazeux utilisé pour le transport et produit à partir de la biomasse. »

II. – Pour compenser la perte de recette pour l'Etat du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - La perte de recettes pour l'État résultant de l'utilisation d'huile végétale pure comme carburant est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Exposé Sommaire :

L'Etat s'est engagé à promouvoir l'utilisation de biocarburants en vue de respecter ses engagements internationaux en matière de lutte contre l'effet de serre. Limiter l'utilisation

des Huiles Végétales brutes est à la fois un contresens écologique, écologique, social et économique.

Limiter l'utilisation des Huiles Végétales brutes est un contresens écologique.

Les HVP sont actuellement le carburant d'origine ayant le meilleur rendement énergétique. Les chiffres de l'ADEME sont éloquents : le bilan des gaz à effet de serre (GES) de la filière des huiles végétales pures est le meilleur avec une quantité de CO2rejeté 5 fois inférieure à celle de la filière gazole (660 grammes équivalent CO2par kilogramme pour le colza et 498 pour le tournesol contre 3390 pour le gazole et 3650 pour l'essence).

Le rapport énergie restituée/énergie mobilisé des huiles végétales pures est le meilleur avec un ratio de 4, 68 pour le colza et de 5, 48 pour le tournesol contre 0, 917 pour le gazole.

La combustion des HVP dans les moteurs diesel ne produit pas plus de GES que ce que la plante a absorbé si il n'y a pas utilisation d'ammonitrates pour la fertilisation car ceux-ci sont générateurs de NOx, oxydes d'azote environ 300 fois plus dangereux que le CO2dans le cadre de l'effet de serre. Les HVP peuvent être utilisées pures dans la plupart des moteurs diesel ou en mélange, notamment les moteurs diesel à injection indirecte

Limiter l'utilisation des huiles végétales pures à l'autoconsommation c'est une impasse juridique.

La directive 2003/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 mai 2003 précise, dans son article 2 qu' « on entend par « biocarburant », un combustible liquide ou gazeux utilisé pour le transport et produit à partir de la biomasse ».

Elle reconnaît également clairement les huiles végétales pures comme biocarburant. « L'huile végétale pure provenant des plantes oléagineuses obtenue par pression, extraction ou procédés comparables, brute ou raffinée, mais sans modification chimique, peut également être utilisée comme biocarburant dans certains cas particuliers où son utilisation est compatible avec le type de moteur et les exigences correspondantes en matière d'émission. »

Le gouvernement reconnaît lui-même dans cet article 12 leur caractère de biocarburant aux huiles végétales pures.

La limitation française d'utilisation des HVP à l'autoconsommation agricole apparaît donc clairement comme une discrimination de cette filière par rapport aux autres filières de biocarburants. Une telle situation est donc facilement attaquable au regard du droit européen et les contentieux s'annoncent nombreux.

Limiter l'utilisation des huiles végétales pures à l'autoconsommation agricole est un également un non-sens économique et aucunement une aide significative à l'agriculture française.

L'Allemagne, par exemple constitue un modèle à s'inspirer : en 2003, la production nationale a été évaluée à 128 000 tonnes obtenues par pressage de 400 000 tonnes de colza. Selon les estimations, les camions et transports collectifs consomment 80 % de l'HVP, les véhicules personnels 18 % et le parc agricole seulement 2 %. Il y a deux raisons à cela :

- l'aide de 0, 2148 euros/litre accordée aux agriculteurs pour le gazole réduit l'écart de prix en faveur de l'HVP à seulement 0, 07-0, 08 euro/litre

- les coûts des modifications de 1 000 à 3 000 euros en kit de bicarburation et de 500 à 1 500 euros par cylindre pour une adaptation du moteur

La France a le même système de détaxation du fuel agricole. Il y a donc fort à parier que les agriculteurs français n'utiliseront pas ou peu les HVP, dans le cadre de l'autoconsommation agricole.

Limiter l'utilisation des huiles végétales pures à l'autoconsommation agricole est enfin une faute psychologique : de nombreux agriculteurs se plaignent d'être incompris, voire stigmatisés. Réserver l'utilisation de l'HVP aux seuls agriculteurs risque d'aggraver cette coupure entre les agriculteurs et les autres citoyens. Pire, le sens des responsabilités de leurs missions et leur l'ingéniosité des agriculteurs pourrait entraîner à l'encontre des agriculteurs des procès à leur encontre.

L'autorisation de consommation, la vente et la détaxation des HVP aux particuliers ayant des véhicules à moteur diesel est un donc un enjeu écologique, économique, social, géostratégique, démocratique pour la France.

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