Déposé le 10 décembre 2005 par : M. Mermaz, les membres du Groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
En application de l'article 44, alinéa 5 du Règlement du Sénat, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer
à la commission des lois constitutionnelles, de la législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, le projet de loi adopté
par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (n° 109, 2005-2006)
La finalité de prévention et de répression du terrorisme est une ardente nécessité, car il est du devoir de l'Etat à la fois de se protéger contre toute forme d'atteinte à son existence même et d'assurer la sécurité des citoyens aujourd'hui menacée par des risques d'une exceptionnelle gravité.
Le projet de loi qui nous est soumis
est censé
permettre de renforcer l'arsenal dont nous devons nous doter pour lutter contre le terrorisme. En ce sens, les dispositifs juridiques et techniques qu'il propose, ne devraient être envisagés qu'en tant que mesures exceptionnelles prises pour faire face à des circonstances elles-mêmes exceptionnelles.
Le groupe socialiste constate que ce projet de loi est en réalité un texte fourre-tout
portant diverses dispositions relatives à la sécurité intérieure et à la lutte contre l'immigration clandestine.
Loin de se concentrer sur cette finalité principale de prévention et de répression du terrorisme, il tend à instaurer des mesures
qui relèvent d'autres finalités : lutte contre le délinquance « ordinaire », contrôle aux frontières, lutte contre l'immigration irrégulière.
Or, les modalités d'application de ces mesures ainsi que les garanties qui s'y attachent ne sauraient être les mêmes selon ces différentes finalités.
Dans sa
décision n° 94-352 DC du 18 janvier 1995, le
Conseil constitutionnel a considéré, sur un plan général, que si
la prévention d'atteintes à l'ordre public, notamment d'atteintes à la sécurité des personnes et des biens, et la recherche des auteurs d'infractions, sont nécessaires à la sauvegarde de principes et droits à valeur constitutionnelle, il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre ces objectifs de valeur constitutionnelle et l'exercice des libertés publiques constitutionnellement garanties au nombre desquelles figurent la liberté individuelle et la liberté d'aller et venir ainsi que l'inviolabilité du domicile
et le droit au respect de la vie privée.
Manifestement, ce projet de loi ne respecte pas le principe fondamental de finalité et par voie de conséquence, celui de proportionnalité. Il risque de créer, en l'état,
une rupture de l'équilibre entre les droits du citoyen et les prérogatives de l'Etat.
La lutte contre le terrorisme ne peut tolérer aucune instrumentalisation.
Elle ne doit pas servir de prétexte pour renforcer un dispositif de lutte contre la délinquance
alors que le gouvernement a annoncé depuis le début de la douzième législature le dépôt d'un projet de loi sur ce sujet.
Elle ne doit pas servir de paravent
à la lutte contre l'immigration irrégulière alors que le gouvernement prépare un nouveau projet de loi sur cette question afin d'aggraver la législation en vigueur.
Surtout, elle ne doit pas susciter l'amalgame entre
terrorisme, délinquance ordinaire, grande criminalité
tout en laissant entendre qu'il faudrait essentiellement se défendre contre l'étranger.
Conformément à son esprit de responsabilité et de vigilance, le groupe socialiste demande le renvoi de ce texte en commission, afin de permettre à la commission des lois d'étudier avec la sérénité nécessaire le détail des mesures strictement liées à la lutte contre le terrorisme
et d'expurger du projet de loi
toutes les mesures
qui ne visent pas directement
cette dernière finalité.
Le groupe socialiste rappelle enfin qu'à l'initiative du Premier ministre, Le Livre Blanc sur la sécurité intérieure face au terrorisme est en voie d'achèvement.
Il a pour objet de préciser la nature de la menace et d'en mesurer les risques,
d'évaluer les ressources humaines ainsi que les moyens techniques et juridiques nécessaires au maintien d'une protection adaptée, d'informer les Français et de définir les comportements à adopter.
Il serait judicieux que la commission des lois demande la production rapide de ce document afin qu'elle puisse en apprécier les conclusions.
NB:La rectification consiste en la correction d'une erreur matérielle portant sur la liste des signataires.
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