Déposé le 15 octobre 2012 par : MM. Dantec, Labbé, les membres du Groupe écologiste.
Supprimer cet article.
Cette demande de suppression est motivée par les raisons suivantes :
Sur la modalité :
• L’absence d’étude d’impact et la faible justification de ces amendements insérés en dernière minute à l’Assemblée Nationale ne permet pas à la représentation parlementaire de prendre la mesure de leurs réelles conséquences.
• Il n’existe pas d’urgence relative au marché de capacité. En effet, dans sa délibération du 29 mars 2012 relative à un projet de décret portant sur les marchés de capacité, la Commission de Régulation de l’Energie déclare :
« A court terme, l’équilibre offre-demande du système électrique français ne semble pas menacé. La mise en œuvre d’un mécanisme de capacité peut toutefois être justifiée, dans une perspective de long terme, compte tenu de la tendance structurelle à l’augmentation de la consommation à la pointe.
(…) L’observation de la situation actuelle de l’équilibre entre l’offre et la demande ne permet pas dès lors de conclure à une insuffisance manifeste de l’offre, à court terme, par rapport aux critères de sécurité d’approvisionnement définis par les pouvoirs publics. (…)»
Sur le fond :
Certaines conséquences néfastes pour les politiques climatiques françaises et pour le développement des énergies renouvelables peuvent être attendues.
1. Par le passé et avec l’analyse d’un retour d’expérience à l’étranger, les marchés de capacité n’ont pas bien fonctionné et ont joué non pas en faveur des effacements et des économies d’énergie mais en faveur des centrales à gaz. Le risque est donc fort de fournir une rente sans justification pour des projets de centrales fonctionnant au gaz à cycle combiné, alors que ces centrales fonctionnent sans récupération de chaleur. Les marchés de capacité ne tiennent pas compte des bénéfices collectifs de la cogénération ou des énergies renouvelables. Les centrales à gaz subventionnées peuvent leur causer du tort en créant une concurrence déloyale hors des périodes de pointe. De plus, le marché de la pointe est trop instable pour donner une visibilité aux investisseurs. Le marché de capacité n’est pas le seul moyen de réguler : un système de prime correctement calibrée permettrait de tenir compte des objectifs climatiques tout en garantissant la stabilité du réseau. Légiférer sur les marchés de capacité n’est pas opportun.
2. Il existe actuellement 34 projets de centrales à gaz autorisés par l’administration en France, soit 16000 MW de puissance. Celles-ci sont, pour la plupart, non indispensable à la bonne tenue du réseau. En revanche, elles représentent un danger pour l’atteinte des objectifs climatiques de la France. La pertinence économique de ces projets étant en question, il est probable que la mise en place d’un marché de capacité serait de nature à leur apporter un soutien économique important. En conséquence, il est à craindre que les amendements ajoutés sont de nature à subventionner des projets dont la pertinence économique et environnementale n’est pas démontrée.
3. Le caractère national d’un tel marché de capacité est mis en cause par les économistes, alors que le marché de l’électricité en peu d’années s’est imposé lors des pointes, en particulier sur la zone France-Allemagne-Bénélux. Une dispersion des marchés correspond à des distorsions de concurrence en faveur du gaz et des rentes indues pour les exploitants de ces centrales. Le marché électrique français n’est pas un ilot puisqu’il est déjà intégré dans un marché européen : la régulation doit pleinement prendre en considération cet élément.
A ce propos, dans sa délibération mentionnée supra, la CRE déclare « La bonne insertion de ce mécanisme dans le marché intégré nécessitera un travail de coordination au niveau européen.» Cette coordination n’ayant pas été réalisée, légiférer sur les marchés de capacité n’est pas opportun.
4. Enfin, les mesures concernant les auto-producteurs (art. 7 ter, 7 quater) sont inacceptables pour au moins trois raisons :
- Il est incompréhensible d'appliquer à la part autoconsommée une obligation de capacité, alors même que celle-ci représente en soi une source de flexibilité. De plus, imposer des obligations de capacité aux installations d’autoproduction et aux producteurs d’électricité est critiquable pour des industriels ou des ensembles tertiaires de grande taille en ce que ces installations représentent une ressource à faible émissions et peuvent jouer en faveur de la compétitivité de ces entreprises.
- D’autre part, la production décentralisée d’énergie par des producteurs-consommateurs individuels ou des ménages locataires exploitant une part de générateurs solaires ou éoliens ne doit pas être entravée. Or la loi ne prévoit pas de seuil de taille. Il serait nécessaire d’emblée d’exonérer les ménages ou leur fournir un régime simplifié encourageant l’autoproduction à hauteur de leur consommation.
- Par ailleurs, il est important de s'assurer que toute obligation pourra être prise en charge de façon simple par un agrégateur pouvant tenir compte du foisonnement des disponibilités techniques des installations, faute de quoi ces installations seraient pénalisées. L'art. 7 quater n'est pas clair sur ce point.
En somme, alors que la présente proposition de loi vise à « préparer la transition vers un système énergétique sobre », les articles 7 bis à 7 sexies vont à l’encontre du développement de l’effacement, de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables.
De plus, il n’existe aucun motif d’urgence justifiant une modification du code de l’énergie : si de telles modifications devaient être apportées, cela devrait se faire après analyse de l’impact.
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