Amendement N° 772 rectifié (Retiré)

Organisme extraparlementaire

Déposé le 30 mai 2013 par : M. Dantec, Mme Lipietz, M. Placé, les membres du Groupe écologiste.

Photo de Ronan Dantec Photo de Hélène Lipietz Photo de Jean-Vincent Placé 

Après l’article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le titre II du livre II de la deuxième partie est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :

« Chapitre VI : Service public du stationnement

« Art. L. 2226-1.– Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale organisent le service public du stationnement.

« L’exploitation de ce service peut être confiée à un tiers. » ;
« 2° La section 12 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie est ainsi rédigée :
« Section 12 : Stationnement payant

« Art. L. 2333-87.– Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, visés à l’article L. 2226-1, peuvent établir une redevance en contrepartie du service public de stationnement.

« Art. L. 2333-87-1.– La redevance est payée par l’usager au plus tard à l’issue du stationnement. Si le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule n’est pas l’usager, il lui transmet la demande de paiement et en informe la personne en charge du recouvrement.

« La redevance est recouvrée par la collectivité qui organise le service public du stationnement ou par la personne qu’elle a chargée de l’exploitation du service.

« Art. L. 2333-87-2.– Le défaut de paiement de la redevance donne lieu à l’application de sanctions pécuniaires à l’usager ou au titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule qui ne remplit pas les prescriptions de l’article L. 2333-87-1.

« L’État est compétent pour appliquer ces sanctions, déterminer leur montant respectif et fixer les délais au-delà desquels elles sont encourues. Les collectivités qui organisent le service public du stationnement peuvent exercer, si elles le souhaitent, ces compétences en lieu et place de l’Etat.

« Art. L. 2333-87-3.– L’autorité compétente pour appliquer la sanction à l’usager peut accorder, par voie de transaction, une atténuation de son montant. En contrepartie, l’usager acquitte immédiatement la sanction ainsi atténuée et la redevance de stationnement augmentée des intérêts de retard et des frais de recouvrement.

« Art. L. 2333-87-4.–Les recours contre les sommes dues au titre du stationnement payant n’ont pas d’effet suspensif. » ;

3° Le 2° de l’article L. 2331-4 est ainsi rétabli :

« 2° Le produit de la redevance de stationnement ainsi que le produit des sanctions pécuniaires appliquées dans le cadre du service public de stationnement à l’usager ou au titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule ; »

4° L’article L. 2334-24 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le comité des finances locales est également compétent pour répartir le produit des sanctions pécuniaires visées à l’article L. 2333-87-2, dans le cas où elles ont été appliquées par l’État. Le produit de ces sanctions est prélevé sur les recettes de l’État après déduction des frais de gestion correspondant aux coûts qu’il a exposés. » ;

5° Le 3° du II de l’article L. 5214-16 est complété par les mots : « organisation du service public de stationnement ; »

6° Au premier alinéa du 1° du II de l’article L. 5216-5, les mots : « création ou aménagement et gestion de parcs de stationnement d’intérêt communautaire » sont remplacés par les mots : « organisation du service public du stationnement ».

II. – Le code de la route est ainsi modifié :

1° Après le 12° de l’article L. 130-4, il est inséré un 13° ainsi rédigé :

« 13° Les agents des exploitants du service public du stationnement, agréés par le procureur de la République, pour les seules contraventions aux règles de l’arrêt et du stationnement. » ;

2° L’article L. 322-1 est ainsi modifié :

a)Au premier alinéa, après le mot : « émise », sont insérés les mots : « ou lorsqu’une sanction pécuniaire pour défaut de paiement de la redevance de stationnement a été appliquée » ;

b) La première phrase du troisième alinéa est complétée par les mots : « ou de la sanction pécuniaire pour défaut de paiement de la redevance de stationnement » ;

3° Le I de l’article L. 330-2 est complété par un 15° ainsi rédigé :

« 15° Aux agents des communes et des établissements publics de coopération intercommunale qui organisent le service public du stationnement, dès lors que ces informations ont pour seul but d’identifier les personnes qui doivent la redevance de stationnement au titre de l’article L. 2333-87-1 du code général des collectivités territoriales ».

III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Exposé Sommaire :

Le présent amendement a pour objectif de renforcer la maîtrise des métropoles sur le dispositif général du stationnement payant, pour en en faire un instrument au service de leur politique de mobilité durable. Il vise ainsi à remplacer l’amende forfaitaire actuelle de 17 euros, de nature pénale, par une redevance forfaitaire.

Cette mesure était l’une des propositions phare du comité opérationnel « transports urbains et péri urbains » du Grenelle de l’environnement.

1- Gagner en cohérence : Transférer les compétences à un échelon plus adapté

Alors que la réglementation du stationnement payant sur voirie est une compétence communale (ou communautaire), son non-respect relève du droit pénal. En cas de non respect des règles de stationnement payant (tarification ou zone bleue à disque), les sanctions ont donc un caractère pénal et prennent la forme de contraventions, dont le montant est obligatoirement unifié à l’échelle nationale.

Le rapport du Sénateur Louis Nègre sur la dépénalisation et la décentralisation du stationnement en 2011 souligne que l’uniformité du montant de la sanction au plan national, qui ne tient aucun compte du niveau de rareté des places, des contraintes et spécificités locales et encore moins de la demande selon les dimensions des villes, manque (...) totalement de cohérence territoriale[1].

En effet, les Autorités Organisatrices des Transports Urbains ne peuvent pas moduler des amendes en fonction de la zone de stationnement, alors même qu’elles sont en charge de l’élaboration des Plans de Déplacements Urbains et que la gestion du stationnement constitue un levier important des politiques de mobilité et en premier lieu de la régulation des déplacements automobiles.

2- Gagner en efficacité : diminuer les irrégularités de stationnement

Par ailleurs, cette situation pèse lourdement sur l’efficacité de la politique locale de stationnement, qui dépendra de l’arbitrage réalisé par les automobilistes entre le coût de la contravention qu’ils risquent de devoir payer s’ils sont verbalisés et le coût du stationnement payant. En effet, le montant des amendes, uniforme sur l’ensemble du territoire, peut ne pas avoir de lien cohérent avec le coût horaire du stationnement payant qui lui dépend des enjeux locaux.

Ainsi, dans de nombreuses villes, notamment les plus grandes, il est toujours plus avantageux de ne pas acquitter le prix du stationnement payant, en raison d’une part du coût horaire parfois élevé du stationnement et d’autre part de l’impossibilité de surveiller la voie publique en permanence, qui limite fortement le risque de verbalisation. Des enquêtes de terrain montrent ainsi que la faiblesse de l’amende dans les grandes villes au regard du coût du stationnement induit à certaines heures une occupation de près de 80% des places de stationnement par des véhicules en situation irrégulière. Cette situation entraîne une faible rotation des véhicules stationnés et par conséquent une occupation de la voirie qui ne favorise pas le report modal. L’impact sur la circulation et l’encombrement du trafic n’est pas négligeable non plus, puisque près de 10% des voitures circulant dans les centres-villes des grandes agglomérations sont à la recherche d’un stationnement.

Enfin, les amendes sont aujourd’hui collectées par l’État qui en redistribue une partie aux collectivités suivant un système peu lisible. Les collectivités n’ont pas accès à des données précises sur le nombre et le montant des amendes en raison de l’importante carence d’informations. Les communes ou EPCI ayant très peu de visibilité sur les ressources potentiellement générées par le recouvrement des amendes, elles ne sont que peu incitées à faire verbaliser[2]. Cela conduit donc à un manque à gagner considérable pour l’Etat et les collectivités, en raison du très faible taux de recouvrement du paiement spontané à l’heure de stationnement et des amendes liées au non-paiement. La gestion territoriale du stationnement, en intéressant directement les collectivités à renforcer les contrôles, leur permettrait donc également de dégager des recettes supplémentaires pour le financement de leur politique de mobilité durable.

3 - Réduire les nuisances et les émissions de gaz à effet de serre en faisant du stationnement un outil au service du report modal

En effet, la disponibilité du stationnement à destination compte parmi l’un des principaux déterminants du choix modal. De même, la gratuité du stationnement incite presque systématiquement l’usager à prendre sa voiture.

La part modale de la voiture reste majoritaire dans la majorité des villes françaises en dépit de son impact en terme de consommation d’énergie (principalement fossile), d’émissions de gaz à effet de serre, de pollution de l’air, de nuisances sonores, d’accidents et de pollution de l’air. Néanmoins elle peut réduire de moitié avec la raréfaction des places de stationnement, comme en témoigne les chiffres ci-dessous (Source : Certu). La corrélation entre disponibilité du stationnement et usage de l’automobile au détriment d’un autre mode de transport (collectif ou actif) est très forte.

Part modale du véhicule particulier
VilleStationnement assuréPas de stationnement assuré
Besançon90%46%
Grenoble94%53%
Toulouse99%41%
Berne95%13%
Lausanne94%35%
Genève93%36%

Source : Transport et écologie, par Cédis et Indiggo, septembre 2012.

Le rabattement sur les transports collectifs et les modes actifs (marche, vélo) est encore plus fort dans les villes suisses comme Lausanne ou Berne (la part modale de la voiture est alors divisée par 3) où ces alternatives sont plus présentes, ce qui justifie la nécessité pour la commune de mener une politique de transports cohérente et favorable aux modes de transports collectifs et actifs et conjointe avec ses voisines.

Les initiatives menées en France dans certains éco-quartiers ou villes comme Strasbourg, où le Plan Local d’Urbanisme (PLU) octroie un nombre inférieur de place de stationnement par logement (0, 5) dans les cas où les transports en commun en site propre ou une gare TER sont accessibles à moins de 500m de distance, montrent la pertinence de la décentralisation du stationnement au bénéfice d’acteurs locaux qui sont proches du territoire concerné et à même de mesurer la disponibilité des modes de transports alternatifs à la voiture pour fixer les amendes à un niveau justifié.

La dépénalisation du stationnement et donc par là l’instauration d’un coût du stationnement dissuasif pourrait être élargie aux deux-roues motorisés dont les risques en termes de sécurité routière, de consommation d’énergie et de pollution de l’air augmentent avec leur développement exponentiel dans des villes comme Paris[3].

Avec la décentralisation et la dépénalisation du stationnement, les intercommunalités pourront mettre en place des politiques plus dissuasives à l’usage de la voiture et plus volontaristes sur le front du report modal, pour ainsi conforter les tendances actuelles des milieux urbains qui voient la motorisation et l’usage de la voiture diminuer progressivement.

[1] Sénateur Louis Nègre, Rapport sur la Dépénalisation et la décentralisation du stationnement, Septembre 2011.

[2] Sénateur Louis Nègre, Rapport sur la Dépénalisation et la décentralisation du stationnement, Septembre 2011.

[3] La distance parcourue sur un an par les deux-roues motorisés à plus que doublé entre 1990 et 2011. Source : Compte des transports 2012.

NB:La rectification consiste en un changement de place d'un article additionnel après l'article 38 vers un article additionnel après l'article 36.

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