Déposé le 8 juillet 2013 par : M. Anziani, rapporteur.
Après l’article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I – Le dernier alinéa de l’article 1741 du code général des impôts est complété par une phrase et trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, les poursuites sont engagées dans les conditions prévues par le code de procédure pénale :
« - lorsque les faits ont été portés à la connaissance de l’autorité judiciaire dans le cadre d’une enquête ou d’une instruction ouverte pour d’autres faits ;
« - lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou lorsqu’il existe des présomptions caractérisées qu’ils résultent d’un des comportements mentionnés aux 1° à 5° de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales.
« L'administration est informée sans délai des poursuites engagées dans ces conditions. ».
II – Après l’article L. 227 du livre des procédures fiscales, il est inséré un nouvel article L. 227-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 227-1. – Pour le délit de fraude fiscale prévu à l’article 1741 du code général des impôts, l’administration fiscale a le droit, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, de transiger, après accord du procureur de la République ou du procureur de la République financier, dans les conditions définies aux articles L. 247 à L. 251 du présent livre, lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou lorsqu’il existe des présomptions caractérisées qu’ils résultent d’un des comportements mentionnés aux 1° à 5° du présent livre.
« L’acte par lequel le procureur de la République ou le procureur de la République financier donne son accord à la proposition de transaction est interruptif de la prescription de l’action publique.
« L’action publique est éteinte lorsque l’auteur de l'infraction a exécuté dans le délai imparti les obligations résultant pour lui de l’acceptation de la transaction ».
A l’heure actuelle, aucune poursuite pénale ne peut être engagée en matière de fraude fiscale sans l’aval de l’administration. Cet état du droit, fortement dérogatoire au droit commun et aux principes généraux de l’organisation judiciaire, soulève de légitimes objections, notamment lorsque les faits de fraude fiscale apparaissent au cours d’une enquête ou d’une instruction ouverte pour d’autres faits et que, faute de plainte de l’administration fiscale, l’autorité judiciaire est contrainte de « fermer les yeux ».
En outre, si les parquets n’ont pas vocation à connaître de l’intégralité des faits de fraude fiscale commis à l’heure actuelle – pour une immense majorité d’entre eux, l’imposition de sanctions fiscales (qui peuvent parfois atteindre des montants très élevés et dissuasifs) suffit à assurer une répression effective –, il est en revanche particulièrement regrettable que l’autorité judiciaire ne puisse avoir connaissance des faits de fraude fiscale complexe, notamment lorsqu’elle est commise par le recours à des montages juridiques sophistiqués ou à des structures implantées à l’étranger. En effet, comme l’ont relevé l’ensemble des magistrats entendus par votre rapporteur, les faits de fraude fiscale commis dans de telles circonstances peuvent souvent révéler d’autres infractions qui ne peuvent être poursuivies que par la voie pénale (dispositifs de corruption, abus de biens sociaux, escroqueries, etc.). Il importe donc que l’autorité judiciaire puisse en avoir connaissance.
En outre, la création d’un procureur financier à compétence nationale n’a de sens que si ce dernier peut disposer d’un entier pouvoir d’appréciation sur l’opportunité d’engager des poursuites en toute matière économique et financière présentant un certain degré de complexité.
Le présent amendement propose donc de lever partiellement ce qu’on appelle communément le « verrou de Bercy », en prévoyant la possibilité pour l’autorité judiciaire d’engager des poursuites sans autorisation préalable de l’administration :
- d’une part, lorsque les faits sont apparus à l’occasion d’une enquête ou d’une instruction portant sur d’autres faits ;
- d’autre part, lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou par le recours à diverses manœuvres – sur ce point, l’amendement reprend les termes utilisés par l’article 15 du projet de loi pour la compétence du procureur financier.
Corrélativement, afin de ne pas interdire à l’administration d’avoir recours à un outil – la transaction – qui a fait ses preuves en termes d’efficacité et de rapidité de la sanction, le présent amendement ouvre une possibilité de transaction pénale, sous le contrôle du parquet, pour les faits de fraude fiscale complexe commis dans les circonstances précitées. La solution proposée par l’amendement renforcerait d’ailleurs l’efficacité du dispositif, car le fraudeur ayant recouru à des techniques de fraude sophistiquées aurait une probabilité plus forte de se voir poursuivi au pénal en cas de refus de la solution de transaction proposée par l’administration.
Enfin, l'amendement prévoit qu’en cas d’engagement des poursuites dans ces conditions, l’administration en serait informée sans délai afin de pouvoir utilement produire ses observations et, le cas échéant, se constituer partie civile.
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