Déposé le 19 mars 2015 par : MM. Guerriau, Kern, Bonnecarrère, Longeot, Mme Morin-Desailly.
Supprimer les mots « greffiers des tribunaux de commerce » de l’article L. 444-1 du Code de commerce.
L’article 12 fixe les modalités de détermination des tarifs des commissaires-priseurs judiciaires, greffiers de tribunaux de commerce, huissiers de justice, administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires et notaires.
Il est proposé de retirer de l’article 12 la référence aux greffiers des tribunaux de commerce.
Premièrement, les greffiers des tribunaux de commerce sont membres des juridictions commerciales auxquelles ils appartiennent. Certes, ce sont des officiers publics ministériels, mais ils assurent des missions de service public régalien et ne sont pas concurrents entre eux. Au même titre que les juridictions ne sont pas concurrentes entre elles et il ne vient à l’idée de personne d’organiser une concurrence entre des juridictions.
Ensuite, les greffiers des tribunaux de commerce remplissent deux grands types de missions : des missions judiciaires d’assistance et de secrétariat des Tribunaux et des missions de sécurisation juridique par la tenue des registres légaux dont le plus connu est le très important Registre du Commerce et des Sociétés. L’ensemble de leur activité est strictement régalien.
Par ailleurs, les greffiers des tribunaux de commerce disposent d’une tarification qui intègre de nombreuses missions sans contrepartie financière, ainsi que l’a constaté l’Autorité de la Concurrence[1]. Ces missions sont indirectement financées par les actes tarifés, notamment ceux liés à la diffusion des informations du Registre du commerce et des sociétés. Le fonctionnement de la justice commerciale et son maillage territorial reposent largement sur cette péréquation pour un coût réduit pour les entreprises comme le souligne l’Autorité de la Concurrence.
Il convient en outre de souligner que le tarif des greffiers des tribunaux de commerce ne comporte pas d'émoluments proportionnels, à la différence des autres professions réglementées.
Les actes et formalités des juridictions commerciales ne relèvent pas d’un secteur concurrentiel et en conséquence leur tarification doit rester de la compétence exclusive du Ministère de la Justice.
En outre, La tarification par la structure des coûts n’est pas adaptée à la tarification des greffiers des tribunaux de commerce qui remplissent un service public non concurrentiel.
Si elle était retenue, elle constituerait à la fois un risque d’atteinte à l’accès à la justice, une régression économique et un non-sens comptable :
Si le choix de déléguer à des professionnels libéraux une partie du service public implique un équilibre financier global, vouloir définir le tarif de chaque acte des greffes en fonction de son coût serait un recul du point de vue de l’égalité d’accès à la justice, qui nécessiterait une compensation selon la nature des actes comme cela a été souligné dans l’avis susvisé rendu par l’autorité de la concurrence. Un système d’ajustement des tarifs en fonction des coûts serait à terme défavorable pour les usagers de la justice commerciale.
Une des raisons qui fonde la légitimité de la délégation à des professionnels libéraux tient dans l’intérêt que ces derniers ont à rendre un service de qualité à moindre coût. Une telle incitation disparaît lorsque les tarifs sont définis en fonction des coûts, les professionnels ayant alors au contraire intérêt à accroître leurs coûts. Cet effet pervers est relevé par de nombreux économistes et déjà repris dans le rapport annuel de 2011 de l’Autorité de la concurrence.
Ce projet intervient alors que les greffiers des tribunaux de commerce viennent de subir une réduction de 50% des émoluments d’immatriculation au RCS pour les sociétés commerciales et les personnes physiques, ainsi qu’une diminution des frais de transmission électronique de l’extrait d’immatriculation (kbis) de l’ordre de 66%, ces mesures tarifaires ont pour conséquence directe une baisse du chiffre d’affaires des greffes à volume constant d’activité, dont l’impact n’a pas été à ce jour mesuré.
En outre, une telle réforme impliquerait des coûts importants de mise en place. Au-delà des activités aujourd’hui non tarifées, il existe plusieurs centaines d’actes tarifés dont il conviendrait de définir précisément le coût complet dans chaque greffe.
Enfin, dans la mise en place d’une tarification orientée vers les coûts, il faudrait prendre en compte les coûts supportés par l’Etat dans les TGI à compétence commerciale, lesquels sont supérieurs à ceux qui existent dans les greffes des tribunaux de commerce sans assurer les mêmes qualités de service ; l’étude d’impact sur les finances publiques n’a pas été réalisée à ce jour.
[1]Avis 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées
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