Déposé le 19 novembre 2015 par : MM. Eblé, Chiron, Lalande, Raynal, Yung, D. Bailly, Mmes Claireaux, Cartron, Emery-Dumas, MM. Filleul, Kaltenbach, Marie, Mmes D. Michel, Monier, M. Poher, Mme S. Robert.
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. − L’article 156 bisdu code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « ni aux immeubles ayant fait l’objet d’une division à compter du 1erjanvier 2009, sauf si : » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
c) Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° La société civile non soumise à l'impôt sur les sociétés ou la division a fait l'objet d'un agrément du ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de la culture, lorsque le monument a fait l'objet d'un arrêté de classement ou d’inscription, en tout ou en partie, au titre des monuments historiques et est affecté dans les quatre ans qui suivent cette demande à un usage compatible avec la préservation de son intérêt patrimonial ; » ;
d) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Ou lorsque les associés de la société civile non soumise à l’impôt sur les sociétés sont membres d'une même famille. » ;
e) À la première phrase du sixième alinéa, les mots : « deuxième à quatrième » sont remplacés par les mots : « trois premiers » ;
f) Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En l’absence de changement de propriétaire et sauf avis contraire du ministre chargé de la culture, une société civile non soumise à l’impôt sur le revenu bénéficie de plein droit des dispositions de l’article 156 propres aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques dans le cas où elle succède immédiatement à une copropriété ayant fait l’objet d’un agrément tel que défini au 1° du présent II. » ;
2° Le V est abrogé.
II. – Le présent article s'applique aux demandes d'agrément déposées à compter du 1erjanvier 2015.
III. − Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Le présent amendement vise à la fois à réintégrer les monuments historiques inscrits dans le champ de l’agrément permettant à une SCI ou une copropriété de pouvoir bénéficier du régime des monuments historiques, à adapter les critères de délivrance de l’agrément aux réalités patrimoniales et à unifier l’agrément.
Il s’agit d’abord de réintégrer les monuments inscrits et d’assouplir les critères de délivrance de l’agrément : en effet, la réforme intervenue en loi de finances rectificative pour 2014 a bouleversé le régime des monuments historiques et l’a significativement restreint, au détriment de la préservation du patrimoine historique bâti. Le régime de l’agrément a d’abord été pensé pour des grands bâtiments (anciennes casernes, hôpitaux, couvents…) qui sont majoritairement inscrits. Comme en témoigne la lecture des travaux préparatoires de l’Assemblée nationale sur ce sujet, la réforme de 2009 avait pour but de contrôler les divisions abusives de petits châteaux ou hôtels particuliers qui se prêtent mal à un découpage trop important, et non de bloquer des projets de rénovation dans des grands bâtiments pour lesquels la division est indispensable tout à la fois pour financer les travaux et pour faire revivre le bâtiment. L’exclusion des monuments inscrits est donc difficile à comprendre.
Il faut également souligner que le Sénat comme l’Assemblée nationale ont voté, à l’occasion de l’examen de la loi dite « Macron », en faveur de la ré-inclusion des monuments inscrits au sein de l’agrément prévu à l’article 156 bis du code général des impôts (article 25 bis AA de la petite loi et article 83 de la loi promulguée), mais que cet article a été invalidé par le Conseil constitutionnel au motif qu’il s’agissait d’un « cavalier législatif ». Le projet de loi de finances nous donne aujourd’hui l’occasion de mettre le droit en vigueur en conformité avec les visées déjà exprimées du législateur.
De même, les critères de délivrance de l’agrément tels qu’ils découlent de la réforme de 2014 ne paraissent pas assurer une protection effective de la qualité des immeubles à conserver. Deux points sont particulièrement problématiques : l’affectation de trois quarts des surfaces à l’habitation et l’instauration d’un délai de deux ans entre la demande de l’agrément et l’affectation à l’habitation. Il s’agit d’assouplir ces critères pour favoriser une rénovation adaptée aux enjeux patrimoniaux, qui ne nécessitent voire ne tolèrent pas toujours une affectation à l’habitation aussi massive.
Les enjeux budgétaires n’apparaissent pas particulièrement significatifs. Le coût du régime des monuments historiques s’élevait à 60 millions d’euros en 2014, mais seule une fraction de cet agrégat est liée aux exceptions prévues à l’article 156 bis du code général des impôts. Contrairement à une idée qui semble répandue, la dépense fiscale n’est pas effectuée « à fonds perdus » : le dispositif de l’article 156 du code général des impôts a pour objet de soutenir et d’encourager les dépenses des propriétaires privés eux-mêmes.
Il paraît également opportun d’unifier l’agrément destiné aux SCI et aux copropriétés. En effet, la rédaction actuelle des dispositions définissant le régime des monuments historiques manque de lisibilité : les dispositions concernant l’agrément sont distribuées à deux alinéas différents du même article 156 bis du code général des impôts, selon que le bien est détenu par le biais d’une copropriété ou d’une SCI, ce qui a pu conduire l’administration fiscale à retenir une interprétation selon laquelle deux agréments différents doivent être demandés – bien que ce point ne ressortisse clairement ni de la rédaction de la loi, ni de la jurisprudence attachée au régime des monuments historiques. Dans la mesure où les critères de délivrance de l’agrément sont et ont toujours été les mêmes pour une SCI et pour une copropriété, la délivrance d’un nouvel agrément en cas de passage d’une copropriété à une SCI, par exemple en raison de difficultés de financement, ne se justifie par aucune nécessité patrimoniale ni juridique. Elle contribue à faire perdre du temps tant à l’administration fiscale qu’aux parties prenantes du projet de rénovation du monument historique.
Il s’agit donc, par cet amendement, de clarifier la rédaction de l’article 156 bis du code général des impôts en prévoyant la délivrance d’un agrément unique quel que soit le mode de division du bâtiment.
Cette réforme n’introduirait pas de coûts supplémentaires dans la mesure où elle ne constitue pas un assouplissement des critères de délivrance de l’agrément.
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