Déposé le 11 mars 2016 par : M. Kaltenbach.
Supprimer cet article.
L’article 2 de la révision constitutionnelle tel qu’adopté par l’Assemblée Nationale a pour objet d’inscrire dans la Constitution en son article 34 la compétence pour le législateur de définir les conditions dans lesquelles une personne peut être déchue de la nationalité française ou des droits attachés à celle-ci lorsqu’elle est condamnée pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la vie de la Nation.
Cette proposition est surprenante.
En effet, elle est en réalité conçue comme une peine complémentaire appliquée à l’auteur d’un crime particulièrement grave, contre lequel la société française a le droit et le devoir de se défendre.
Or, le législateur est d’ores et déjà compétent, selon le même article 34 alinéa 3 de la constitution, pour définir les peines en ces termes : « la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ».
L’article 2 du projet de loi constitutionnelle bégaie donc, sans aucune nécessité.
D’ailleurs, depuis la proclamation de la République la déchéance de nationalité pour des Français a toujours existé dans notre droit. C’est d’ailleurs seulement depuis 1927 que cette déchéance a été limitée à ceux qui avaient acquis cette nationalité. Cette déchéance de nationalité réservée aux personnes ayant acquis la nationalité française se retrouve aujourd’hui à l’article 25 du Code Civil et comprend notamment le cas du terrorisme. La question de la déchéance de nationalité ne relève donc pas du niveau constitutionnel mais bien de la loi.
Comme le rappelait récemment l’ancien garde des Sceaux M. Robert Badinter il suffirait au législateur et non au pouvoir constituant de remplacer dans l’article 25 du Code Civil les mots « qui a acquis la qualité de Français » par les mots « tout Français ».
Bien évidemment, la combinaison de la loi Guigou de 1998, qui interdit à la France de créer des apatrides, et de ce nouvel article 25 du Code Civil conduirait dans la pratique à ne pouvoir déchoir de leur nationalité que les français disposant également d’une autre nationalité. Si cela est très critiquable, notamment au regard du principe d’égalité, il n’en reste pas moins que la question juridique, car il est ici question de droit et non de politique, de la déchéance de nationalité relève de la loi et d’elle seulement.
L’article 2 du projet de loi constitutionnelle Protection de la Nation n’a donc en aucun cas sa place dans la Constitution, il doit être supprimé.
NB: La mention « Tombé » signifie qu'il n'y avait pas lieu de soumettre l'amendement au vote du Sénat dans la mesure où soit l'objectif poursuivi par l'amendement a été atteint par l'adoption d'un autre amendement (ex. : amendement de rédaction globale incluant la modification proposée), soit, au contraire, l'amendement était incompatible avec un amendement précédemment adopté (ex. : l'adoption d'un amendement de suppression fait tomber tous les autres).
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