Amendement N° 192 2ème rectif. (Retiré)

Organisme extraparlementaire

Avis de la Commission : Défavorable
( amendement identique : 492 )

Déposé le 4 juillet 2016 par : Mme Lienemann, M. Durain.

Photo de Marie-Noëlle Lienemann Photo de Jérôme Durain 

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Les mesures conservatoires mentionnées au livre V du code des procédures civiles d’exécution ou les mesures d’exécution forcée mentionnées aux articles L. 211-1 à L. 211-5 du même code ne peuvent être mises en œuvre sur un bien appartenant à un État étranger que sur autorisation préalable du juge, par ordonnance rendue sur requête.

II. – A. – Aucune mesure conservatoire ni aucune mesure d’exécution forcée mentionnée au I ne peut être autorisée par le juge, à l’initiative du détenteur d’un titre de créance mentionné à l’article L. 213-1 A du code monétaire et financier ou tout instrument ou droit mentionné à l’article L. 211-41 du même code présentant des caractéristiques analogues à un titre de créance, à l’encontre d’un État étranger, lorsque les conditions définies aux 1° à 3° sont remplies :

1° L’État étranger figurait sur la liste des bénéficiaires de l’aide publique au développement établie par le comité de l’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques lorsqu’il a émis le titre de créance ;

2° Le détenteur du titre de créance a acquis ce titre alors que l’État étranger se trouvait en situation de défaut sur ce titre de créance ou avait proposé une modification des termes du titre de créance ;

3° La situation de défaut sur le titre de créance date de moins de quarante-huit mois au moment où le détenteur du titre de créance sollicite du juge une ordonnance sur requête l’autorisant à pratiquer une mesure d’exécution forcée ou une mesure conservatoire, ou la première proposition de modification des termes du titre de créance date de moins de quarante-huit mois au moment où le détenteur du titre de créance sollicite du juge une ordonnance sur requête l’autorisant à pratiquer une mesure d’exécution forcée ou une mesure conservatoire, ou une proposition de modification, applicable au titre de créance, a été acceptée par des créanciers représentant au moins 66 % du montant en principal des créances éligibles, indépendamment du seuil requis, le cas échéant, pour l’entrée en vigueur.

B. – Le juge peut porter les deux limites de délai de quarante-huit mois mentionnées au 3° du A du présent II à soixante-douze mois en cas de comportement manifestement abusif du détenteur du titre de créance.

C. – La situation de défaut est définie conformément aux clauses prévues dans le contrat d’émission ou, en l’absence de telles clauses, par un manquement à l’échéance initiale prévue dans le contrat d’émission.

D. – Les saisies mentionnées aux articles L. 211-1 à L. 211-5 du code des procédures civiles d’exécution et les mesures conservatoires mentionnées au livre V du même code peuvent être autorisées par le juge lorsqu’une proposition de modification des termes du contrat d’émission, applicable au titre de créance détenu par le créancier, a été acceptée par des créanciers représentant au moins 66 % du montant en principal des créances éligibles, est entrée en vigueur, et que le détenteur du titre de créance a sollicité la mise en œuvre d’une ou plusieurs mesures d’exécution forcée ou mesures conservatoires pour des sommes dont le montant total est inférieur ou égal au montant qu’il aurait obtenu s’il avait accepté la dite proposition.

E. – Pour l’application du présent article, sont assimilés à l’État étranger, l’État central, les États fédérés et leurs établissements publics.

F. – Le présent article est applicable sur tout le territoire de la République française, sous réserve, pour son application en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, de remplacer les références au code des procédures civiles d’exécution par les dispositions applicables localement ayant le même effet.

G. – Le présent article s’applique aux titres de créances acquis à compter de son entrée en vigueur.

H. – Pour l’application du présent article, sont assimilées aux titres de créance les créances nées d’une opération de crédit mentionnée à l’article L. 311-1 du code monétaire et financier.

I. – Le détenteur du titre de créance communique, à peine d’irrecevabilité, l’acte par lequel il a acquis la créance à raison de laquelle il demande une mesure conservatoire ou une mesure d’exécution forcée et fait connaître l’intégralité des conditions financières de l’acquisition. Ces informations sont certifiées par un commissaire aux comptes.

Exposé Sommaire :

Le présent amendement rétablit les dispositions prévues par l’article 24 bis, tel qu’adopté par l’Assemblée Nationale en première lecture.Le rétablissement de ces dispositions est nécessaire car, eu égard au développement des actions des fonds dits « procéduriers » ou « vautours » et aux effets néfastes sur les restructurations de dette des pays endettés, la mise en place d’un dispositif spécifique est nécessaire.

Ces fonds mettent en œuvre une stratégie qui consiste à racheter au rabais la dette d’un Etat alors que celui-ci se trouve déjà en situation de difficulté économique grave, voire en situation de défaut de paiement ou en phase de restructuration de sa dette. Ils refusent ensuite de participer à toute restructuration, quand bien même une large majorité de créanciers y participent, ou même font en sorte de les bloquer quand la restructuration est soumise à la règle de l’unanimité. Ils exigent alors par la voie judiciaire, alors qu’ils ont payé des sommes très inférieures au montant nominal des créances, le paiement en plein du titre de créance ainsi racheté ainsi que les intérêts et pénalités accumulés et en multipliant les recours judiciaires, le cas échéant, dans un grand nombre de juridictions.

A de nombreuses occasions, ces recours ont porté sur les fonds provenant de l’aide au pays en développement, aggravant ainsi les difficultés des Etats en situation financière difficile, qui n’ont souvent pas les moyens matériels et humains d’assurer leur défense devant les tribunaux où ils sont attraits.

Pour améliorer l’efficacité des restructurations de dettes souveraines, des clauses d’action collective avec agrégation ont été récemment introduites dans la plupart des contrats obligataires, afin d’assurer qu’une proposition de restructuration, dès lors qu’elle remporte l’adhésion d’une très large majorité des créanciers, s’impose à tous. Une telle disposition contractuelle permet aussi, incidemment, de limiter les effets disruptifs sur le fonctionnement des marchés de la dette souveraine que provoquent les fonds dits « procéduriers », dès lors que ceux-ci ne sont pas en mesure de constituer une minorité de blocage.

Toutefois, un important stock de créances souveraines reste dépourvu de telles clauses. De plus, les Etats en développement ne disposent pas toujours des ressources juridiques suffisantes pour s’assurer que leurs levées de dette obligataires sont dûment protégées de l’action de ces fonds dits « procéduriers ».Il ne s’agit pas d’exonérer les Etats débiteurs de leurs obligations de rembourser leurs emprunts, à défaut de quoi les créanciers de ces Etats seront dissuadés de continuer à les financer. La mesure doit donc être circonscrite et protéger les droits des créanciers usuels, y compris lorsque ceux-ci rachètent la dette d’un Etat en difficulté financière mais encore en mesure d’assurer le service de sa dette, pour éviter de précipiter des situations de défaut de paiement.

Le présent amendement a ainsi pour objectif de priver d’effet les mesures conservatoires et les mesures d’exécution forcée lorsque sont réunies les caractéristiques du comportement d’un fonds « procédurier », à savoir le rachat de créances après un défaut de l’Etat étranger ou après que celui-ci a proposé une restructuration de sa dette (dans les cas de restructurations préventives à la veille d’un défaut).

Un délai de 48 mois est prévu pour permettre à l’Etat étranger de mener à bien la restructuration de sa dette et de parvenir à une proposition de restructuration convainquant une large majorité de créanciers. Afin de ne pas pénaliser le créancier, ce dernier recouvre le bénéfice des mesures d’exécution au-delà de ce délai.

Afin d’éviter les contentieux, coûteux pour toutes les parties impliquées, les mesures conservatoires ou les mesures d’exécution précitées ne pourront être mises en œuvre que sur autorisation préalable du juge de l’exécution, saisi sur requête, qui vérifiera que les conditions légales ou conventionnelles sont réunies. Cette décision est rendue non contradictoirement, par application du régime de droit commun de l’ordonnance sur requête (article 493 du code de procédure civile).

Dans la mesure où les créanciers concernés par cet amendement ne sont pas privés de tout droit à obtenir le remboursement de leurs créances, le critère de proportionnalité entre l’objectif d’intérêt général visé et les limites apportés aux droit des créanciers est rempli.

Ces dispositions doivent être rendues expressément applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, en raison de leurs statuts spécifiques. Un renvoi sur les dispositions applicables localement est également nécessaire pour leur application en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie en raison de la compétence locale de ces territoires en matière de procédures d’exécution.

NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.

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