Déposé le 11 juin 2018 par : M. Kanner, les membres du groupe socialiste, républicain.
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 1 du chapitre III du titre II du livre VII du code de la sécurité intérieure est complétée par un article L. 723-… ainsi rédigé :
« Art. L. 723-… – I. – Tout sapeur-pompier professionnel ou volontaire et tout militaire de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris et du bataillon des marins-pompiers de Marseille, victime dans l’exercice de ses fonctions ou du fait de ses fonctions d’une atteinte volontaire à l’intégrité de sa personne, de violence, de menace, d’injure, de diffamation ou d’outrage, peut être autorisé à ne pas être identifié par ses nom et prénom dans tous les actes de procédure des instances civiles ou pénales engagés ou nécessaires à la défense de ses droits, lorsque la révélation de son identité est susceptible, compte tenu des conditions d’exercice de ses missions ou de ses fonctions, des circonstances particulières dans la commission des faits ou de la personnalité des personnes mises en cause, de mettre en danger sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches.
« L’autorisation est délivrée nominativement par le procureur de la République ou le juge d’instruction sur proposition du responsable hiérarchique d’un niveau suffisant, défini par décret, statuant par une décision motivée.
« Cette autorisation permet à l’agent qui en bénéficie d’être identifié par un numéro d’immatriculation administrative.
« Le bénéficiaire de l’autorisation est également autorisé à déposer ou à comparaître comme témoin au cours de l’enquête ou devant les juridictions d’instruction ou de jugement et à se constituer partie civile en utilisant ces mêmes éléments d’identification, qui sont seuls mentionnés dans les procès-verbaux, citations, convocations, ordonnances, jugements ou arrêts. Il ne peut être fait état de ses nom et prénom au cours des audiences publiques.
« Le présent I n’est pas applicable lorsque, en raison d’un acte commis dans l’exercice de ses fonctions, le bénéficiaire de l’autorisation est entendu en application des articles 61-1 ou 62-2 du code de procédure pénale ou qu’il fait l’objet de poursuites pénales.
« II. – Les juridictions d’instruction ou de jugement saisies des faits ont accès aux nom et prénom de la personne identifiée par un numéro d’immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisi par une partie à la procédure d’une requête écrite et motivée tendant à la communication des nom et prénom d’une personne bénéficiaire d’une autorisation délivrée en application du I du présent article, le juge d’instruction ou le président de la juridiction de jugement décide des suites à donner à cette requête, après avis du ministère public et en tenant compte, d’une part, de la menace que la révélation de l’identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches et, d’autre part, de la nécessité de communiquer cette identité pour l’exercice des droits de la défense de l’auteur de la demande. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu’il est fait application de l’article 77-2 du code de procédure pénale.
« En cas de demande d’annulation d’un acte de procédure fondée sur la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou sur l’inobservation des formalités substantielles dont l’appréciation nécessite la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d’une autorisation délivrée en application du I du présent article, le juge d’instruction, le président de la chambre de l’instruction ou le président de la juridiction de jugement statue sans verser ces éléments au débat contradictoire ni indiquer les nom et prénom du bénéficiaire de cette autorisation dans sa décision.
« III. – Hors les cas prévus au deuxième alinéa du II, la révélation des nom et prénom du bénéficiaire d’une autorisation délivrée en application du I ou de tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est punie des peines prévues au IV de l’article 15-4 du code de procédure pénale. »
Reposant sur un maillage territorial inégalé, les sapeurs-pompiers sont en première ligne pour intervenir au plus vite face aux multiples fractures (sociale, territoriale, sanitaire…) de notre pays, et répondre de manière polyvalente aux besoins de nos concitoyens plus souvent que tout autre acteur de l’urgence.
Consolider cette force, c’est aussi renforcer la protection de ceux qui administrent les premiers secours et protègent.
À cet égard, les sapeurs-pompiers sont hélas de plus en plus souvent la cible d’incivilités. Les dernières statistiques réalisées par la Direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) auprès des services d'incendie et de secours et publiées le 14 février 2018 signalent 2 280 agressions de sapeurs-pompiers déclarées pour l’année 2016. 2 063 ont fait l’objet d’un dépôt de plainte. Elles sont à l’origine de 1 613 jours d’arrêt de travail.
Depuis le début de l’année, de tels actes se répètent. Autrefois limitées géographiquement, les agressions ont tendance à se répandre et se manifester sous diverses formes, quel que soit le profil de populations, et lors de tous types d’interventions.
S’il est pertinent d’inciter les sapeurs-pompiers et leurs SDIS à porter plainte systématiquement, il importe également dans ce cadre de les protéger ainsi que leurs familles, en créant les conditions adéquates pour qu’ils puissent le faire.
En s’inspirant du droit en vigueur qui s’applique au bénéfice des agents de la police ou de la gendarmerie nationales, des douanes et des services fiscaux, le présent amendement a pour objet de permettre l’anonymat aux sapeurs-pompiers qui portent plainte afin d’éviter qu’ils se trouvent exposés à des risques de représailles des personnes mises en cause.
Compte tenu des missions particulières des sapeurs-pompiers par rapport aux forces de sécurité intérieure, le présent amendement précise que l'autorisation de recourir au dispositif d'anonymisation est délivrée nominativement par le procureur de la République ou le juge d'instruction sur proposition du responsable hiérarchique d'un niveau suffisant, défini par décret, statuant par une décision motivée.
Cette disposition spécifique qui, par elle-même, ne porte pas atteinte aux droits de la défense dans la mesure où l’agent demeure individuellement identifié, est justifiée car les agents concernés constituent la troisième force de sécurité intérieure. Ils agissent sous l’autorité de l’État et de ses représentants et exercent de missions de service public avec les prérogatives de puissance publique qui leur sont inhérentes.
Déclaré irrecevable au titre de l'article 45, alinéa 1, de la Constitution par la commission saisie au fond
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.