Déposé le 23 novembre 2023 par : MM. Bocquet, Savoldelli, les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen, Écologiste - Kanaky.
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2024 (n° 127, 2023-2024).
Les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen, Écologiste et Kanaky (CRCE-K) contestent l’usage répété, presque automatique, de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution qui contrevient à la démocratie budgétaire. Cette procédure ne vise pas simplement à permettre l’adoption d’un budget « quoi qu’il en coûte » au mépris des débats parlementaires réduits à néant en séance publique sur la partie des recettes ; elle laisse toute latitude au Gouvernement de ne pas confronter son projet politique à la représentation nationale et de confectionner un budget « à sa main ». Le débat budgétaire est considéré comme superflu, car porteur de contradictions que l’exécutif ne veut pas affronter.
La majorité sénatoriale décide d’étudier ce budget, de le discuter comme à l’accoutumée et ne semble témoigner que peu d’égards aux députés laissés sans voix. Les membres du groupe CRCE-K sont prêts au débat s’il devait avoir lieu en cas de rejet de cette motion mais affirment qu’il s’agit d’un jeu de dupes. Le seul argument tend à mettre en exergue qu’un débat c’est mieux que rien, mais le Parlement a deux jambes, deux chambres. Il forme un tout, quand l’une est piétinée, c’est bien ce « tout » qui en sort affaibli.
Feignant « en même temps » de satisfaire tous les députés en reprenant quelques-uns de leurs amendements, la proportion massive d’articles supplémentaires pose avec une acuité nouvelle la menace quant à la sincérité et la clarté des débats. Les mesures ainsi soumises au Parlement ne font l’objet d’aucune étude d’impact sérieuse, enjoignant les sénatrices et sénateurs à s’exprimer de façon approximative sur des dispositions d’ampleur. A titre d’exemple, la taxe sur les rentes infra-marginales des énergéticiens sert de leurre pour affirmer que la majorité présidentielle a trouvé des compromis sur des recettes nouvelles. Il s’agit en vérité d’une instrumentalisation de l’initiative parlementaire, permettant pour la deuxième année consécutive de priver le Parlement d’une étude sur une recette devant rapporter plus de 13 milliards d’euros l’année dernière pour finalement plafonner à 3, 8 milliards d’euros. Aussi, les représentants de la nation se sont exprimés sur un article qui s’est avéré complètement différent dans son ambition. Cette année, le même procédé est à l’œuvre.
Si le Sénat ne tire jamais les leçons de son mépris par le Gouvernement, alors les pratiques autoritaires, constitutionnellement garanties, continueront de s’abattre en lui conférant un statut de faire-valoir des méthodes gouvernementales.
Plus généralement, l’autorisation parlementaire est chaque année dévoyée et nous constatons en exécution des écarts importants.
Si ce débat est tronqué, nous constatons que ce budget n’en a pas fini avec les cadeaux fiscaux pour les ménages et les entreprises qui semblent justifier au moins pour partie, le niveau d’emprunt record inscrit dans ce projet de loi de finances à 285 milliards d’euros. Les baisses d’impôts elles se poursuivent dans une forme de déni de la situation des finances publiques et de la dépendance de notre pays aux marchés financiers.
Les membres du groupe CRCE-K proposent par cette motion de laisser le Gouvernement seul comptable de ses choix budgétaires que le Parlement n’est pas capable d’instruire faute d’information suffisante, sauf à considérer que la droite sénatoriale décide de se dévouer pour donner l’illusion d’un débat parlementaire.
NB:En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant les orateurs des groupes.
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