Interventions sur "prison"

18 interventions trouvées.

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

...la Belgique et le Canada -, en auditionnant, avec de très nombreux collègues de la commission des lois, une quarantaine d'éminentes personnalités du monde de la justice, de la psychiatrie, de l'université, du secteur associatif, je me suis forgé une triple conviction sur les carences, les insuffisances dont nous souffrons et auxquelles il convient de porter remède au plus vite. Tout d'abord, nos prisons sont tragiquement affectées par la proportion considérable de détenus qui souffrent de troubles mentaux, de maladies mentales, et qui, selon les estimations les plus fiables, représenteraient environ 20 % de la population carcérale. Certes, ils ont été considérés comme responsables, mais le choix des cours d'assises ne peut qu'être largement hypothéqué par la faiblesse des réponses offertes par ...

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

Nous considérons que cette initiative était nécessaire et qu'elle met fin à un vide juridique dont les conséquences pouvaient se révéler tragiques pour nos concitoyens. À chacune de mes visites de prison, je demande aux personnels de direction et de surveillance comme aux personnels médicaux s'ils comptent dans leur établissement des cas dont la libération en fin de peine leur paraîtrait exposer la société à un risque majeur. La réponse est toujours positive, même si elle ne concerne qu'un nombre très faible d'individus. J'ai même pu constater que certains d'entre eux, loin d'éprouver le moindre...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

...nt à mieux définir ses missions et de bien distinguer la mesure de sûreté, dont il s'agit ici, de la peine. Je ne comprends pas, et je ne suis pas le seul à cet égard, que l'on puisse assimiler le traitement médical ou psychologique à une peine. D'ailleurs, dans une décision du 5 février 2004 relative à la mesure de détention-sûreté, la Cour constitutionnelle allemande a rappelé que la peine de prison et la détention à titre de mesure de sûreté visent pour l'essentiel des objectifs différents. Selon le juge suprême allemand, ...

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

De même, comme le rapporteur et les travaux de la commission des lois l'ont souligné, il faut instaurer une réelle évaluation des troubles mentaux, et ce le plus tôt possible, afin d'aboutir à un meilleur traitement en prison. C'est pourquoi la commission a déposé un amendement tendant à prévoir une évaluation de la personne au Centre national d'observation de la maison d'arrêt de Fresnes dans l'année qui suit sa condamnation. Le bilan de cette évaluation est ensuite soumis au juge de l'application des peines, qui peut individualiser la peine à exécuter ou, en cas de troubles psychiatriques graves, transférer la per...

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

... de leur caractère récent, du retard dans les décrets d'application et, surtout, de l'absence cruelle et permanente des moyens correspondants -, nous soyons sommés de voter un texte déclaré d'urgence concernant une loi radicale, d'affichage politique certes, mais dont le contenu pose d'énormes problèmes ? Notre rapporteur nous dit qu'il existe au moins un consensus entre nous sur le fait que les prisons comptent quelques personnes très dangereuses, dont la sortie est « programmée » à une certaine date. À l'évidence, nous pouvons tous faire ce constat. La preuve en est l'horrible crime qui a été commis par une telle personne peu de temps après sa sortie de prison. Donc oui, monsieur le rapporteur, nous faisons le même constat. Mais il devrait aussi y avoir consensus sur la nécessité de prendre...

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Le projet de loi crée des centres socio-médico-judiciaires de sûreté. Le texte initial prévoyait que seules les personnes condamnées à une peine supérieure ou égale à quinze ans de prison pour crime, torture ou actes de barbarie et viol commis sur des mineurs de quinze ans pouvaient y être placées. Des députés, toujours prompts à la démesure, ne se sont pas privés d'étendre cette liste, à laquelle ils ont ajouté l'enlèvement et la séquestration, et le tout en visant aussi les victimes majeures. On peut débattre de cette question, mais ce qui est grave et inquiétant, c'est le flou...

Photo de Georges OthilyGeorges Othily :

Ce n'est pas parce que ces individus auront passé quinze ou vingt ans en prison qu'ils ne commettront pas à nouveau les mêmes faits gravissimes. Bien au contraire !

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

...uille - la nôtre est souvent agitée -, nous n'aurions pas procédé comme nous l'avons fait, après l'affaire Evrard. Le crime odieux de Francis Evrard a mobilisé, à juste titre, la sensibilité de l'opinion publique. Pour autant, il s'agit d'une affaire unique. Un criminel a été condamné pour acte grave de pédophilie à une peine de vingt-cinq ans de détention ; il en purge dix-sept. À sa sortie de prison, il récidive. Je me suis demandé combien de cas similaires on recensait depuis trente ans, et j'ai choisi cette durée à dessein. J'ai interrogé, entre autres, les chroniqueurs spécialistes de ces faits divers terribles. Selon les informations que j'ai obtenues, mais je ne demande qu'à avoir la preuve du contraire, l'affaire est unique. Or, quand se produit une affaire de cette nature, encore une...

Photo de Bernadette DupontBernadette Dupont :

...es graves de la personnalité, des troubles mentaux et une certaine dangerosité entraînant la probabilité d'une récidive. Cette mesure s'appliquerait également à des personnes ayant commis des actes criminels sur des majeurs. Ne pas laisser en liberté des individus dangereux est une évidente nécessité. Toutefois, il faut s'interroger sur l'effet d'une longue incarcération - quinze ans ou plus. La prison, dans son fonctionnement, aura-t-elle offert au détenu le moyen d'une réflexion sur lui-même, des soins appropriés à son état, lorsque des troubles de la personnalité, a fortiori des troubles psychiatriques, sont avérés ? Est-elle vraiment, dans de tels cas, la solution adaptée ? Chacun de ceux qui, parmi nous, ont approché peu ou prou les prisons a constaté les faiblesses de notre systèm...

Photo de Bernadette DupontBernadette Dupont :

D'où le travail important sur l'insertion ou la réinsertion, qu'il faut également mettre en oeuvre au plus tôt, avec des moyens accrus. J'ai noté en visitant une prison le taux d'illettrisme des personnes incarcérées, en l'occurrence des femmes : la scolarisation de certains détenus me semble donc indispensable pour leur réinsertion dans la société.

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

...nal. Il ouvre une brèche qui deviendra une plaie béante dans la politique pénale française, jusqu'à ce jour régie par les principes des Lumières. Ce que vous nous proposez, madame, n'est ni plus ni moins qu'une mise à mort sociale des personnes dangereuses. Après le bagne, voici revenue dans notre droit une méthode d'exclusion sociale, au mépris du sens de la peine ! Vous nous proposez après la prison, la rétention. Autant dire : la peine après la peine. Notre droit pénal est pourtant clair sur ce point : toute peine doit être nécessaire et proportionnelle au fait reproché. Elle doit normalement intervenir à l'issue d'un jugement et être fondée sur un acte contraire à la loi. La juridiction que vous créez de toutes pièces aura la lourde tâche de priver de liberté des personnes en raison de l...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...êtres humains à une rétention de sûreté sur le simple fondement d'une éventualité, d'une possibilité, d'une virtualité, de l'hypothèse d'un crime toujours imaginable ! C'est contraire au droit, et, comme tout le monde ici, vous le savez bien ! La rétention de sûreté que vous proposez est grave et dangereuse. On en vient à se demander si Michel Foucault n'a pas écrit des centaines de pages sur la prison en vain, inutilement ! Dix jours après avoir promulgué une loi sur la prévention de la récidive, le Président de la République a annoncé sur le perron de l'Élysée qu'une nouvelle loi était nécessaire derechef, alors même que la première n'avait pas été mise en oeuvre, qu'aucun décret n'était paru. Est-ce là une bonne façon de légiférer ? Tout le monde sait bien que non. Permettez-moi de vous li...

Photo de Richard YungRichard Yung :

... le monopole de l'affliction auprès des victimes. Mais, pour nous, la bonne législation pénale, la bonne justice pénale doivent se construire dans le temps et dans la réflexion, et non pas dans l'émotion et au coup par coup. Tel est le sens de notre approche. La mauvaise réponse, c'est celle que vous apportez, c'est-à-dire l'évaluation a minima, l'enfermement sec et le manque de soins en prison pendant la peine. Il y a une autre politique à mener, et plusieurs de mes collègues la développeront. Elle doit être construite en se fondant d'abord sur le bilan de l'ensemble des mesures considérables mises en place depuis une dizaine d'années, tant d'ailleurs par la gauche que par la droite. Il s'agit du suivi socio-judiciaire, du fichier électronique, de la surveillance judiciaire, de l'injo...

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

...uement aux obligations de la surveillance judiciaire, outre la possibilité qui existe déjà dans le projet de loi, la personne est susceptible d'être placée en rétention de sûreté. La commission propose également d'adapter ce dispositif aux personnes condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité. Cette mesure n'est pas symbolique, puisqu'elle concerne actuellement 500 à 600 personnes dans les prisons françaises. Pour ceux qui ne sont condamnés, si je puis m'exprimer ainsi, qu'à quinze ans ou à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans, la commission propose un renforcement des conditions de la surveillance judiciaire, notamment par l'assignation à résidence, disposition qui n'a pas été supprimée par les amendements votés ce matin en commission. Comme vou...

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

... de plus en plus répressives et attentatoires aux libertés publiques. Avec une telle loi, quelle perspective auront les condamnés ? Ils ne sauront qu'à l'issue de leur peine si leur incarcération sera poursuivie, sans qu'ils ne sachent pourquoi et pour combien de temps. Dans ce cadre, comment mener une politique de réinsertion de ces personnes ? L'état désastreux des services psychiatriques des prisons réduit le plus souvent le rôle des personnels soignants à la distribution de médicaments, en particuliers de substitution. Ils ne peuvent assurer un accompagnement des personnes malades. Nous l'avons dit dans notre intervention générale et nous le répéterons, les prisons françaises sont un milieu pathogène. Ce texte de loi ne fera qu'amplifier ce constat dramatique. En somme, ce projet de loi,...

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

Mme Josiane Mathon-Poinat nous propose de considérer qu'il n'y a pas lieu de délibérer. C'est donc qu'il n'y aurait pas de problème ! Or le problème - chacun le reconnaît - est évident, tout comme l'est également le vide juridique. J'ai cité tout à l'heure des directeurs de prison et les personnels de l'administration pénitentiaire, les médecins et les psychiatres. Tous reconnaissent que, dans chacun des établissements, quelques personnes poseraient des problèmes de sécurité tout à fait sensibles si elles étaient remises en liberté à l'issue de leur peine. Le problème existe donc. J'ajoute qu'il y a bien des points sur lesquels je rejoins ma collègue, notamment en ce qui ...

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

...en France », souligne M. le rapporteur. Il note également « les grandes insuffisances du système français », conclusion confirmée par le professeur Jean-Louis Senon, lors de son audition devant la commission des lois. La commission de suivi regrette qu'aucune évaluation des mesures de sûreté mises en place depuis la loi Perben II n'ait été faite : la notion de « dangerosité avérée à la sortie de prison [...] n'est pas encore bien définie par les praticiens, qu'ils soient experts, personnels pénitentiaires ou mêmes juges d'application des peines. » Pour M. le rapporteur, le Centre national d'observation de Fresnes, élément central du dispositif, ne dispose ni d'une méthodologie d'évaluation suffisante en matière de dangerosité ni des moyens matériels nécessaires à la mission qui lui sera assign...

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

...ivement injuste en disant que seuls deux délinquants avaient pu retrouver la liberté au Québec. En effet, ces deux personnes faisaient partie des délinquants considérés comme dangereux. Or, au Québec, cette catégorie résulte d'un classement : le délinquant dangereux est condamné à une peine indéterminée, et l'on constate très souvent que les personnes relevant de cette catégorie ne sortent pas de prison, ou n'en sortent que lorsqu'elles sont très âgées et ne présentent plus aucun caractère dangereux. Mes chers collègues, nous avons parfois des opinions différentes sur le projet de loi qui nous est présenté, et ces divergences ne recouvrent pas systématiquement les clivages des différents groupes. Cela ne signifie pas que nous soyons mal informés ! Pierre-Yves Collombat a brillamment démontré le...