Interventions sur "l’exception d’inconstitutionnalité"

16 interventions trouvées.

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Dans quelques instants, nous allons, je le pense, instituer l’exception d’inconstitutionnalité, qui permettra à un particulier d’invoquer l’inconstitutionnalité de la loi devant le juge. Dès lors, puisqu’on évoque les droits spécifiques des groupes d’opposition ou minoritaires, la commission a estimé souhaitable d’ouvrir le droit de saisine, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité a priori, non seulement à soixante députés ou soixante sénateurs, mais également à un groupe p...

Photo de Michel MercierMichel Mercier :

Effectivement, monsieur le rapporteur. Il s’agit bien de l’avis de l’ensemble de la commission des lois. Madame le garde des sceaux, à mon sens, en matière de contrôle de constitutionnalité, la voie de l’action est toujours préférable à la voie de l’exception. Dès lors que l’on va généraliser, et j’y suis favorable, l’exception d’inconstitutionnalité, ce qui risque de susciter une série de contentieux très longs, je ne comprendrais pas qu’on refuse à un groupe parlementaire le droit de saisir le Conseil constitutionnel. En effet, cette dernière procédure est plus courte, moins susceptible d’encombrer les tribunaux et elle permet d’obtenir un résultat plus rapidement. La primauté des traités sur les lois internes étant déjà affirmée dans la C...

Photo de Jean-Pierre FourcadeJean-Pierre Fourcade :

...74 portant révision de l’article 61 de la Constitution, qui a ouvert la saisine du Conseil constitutionnel à soixante députés ou à soixante sénateurs. Cela a été une très grande réforme et elle a été largement appliquée puisque la constitutionnalité d’un certain nombre de textes a ainsi pu, dans des circonstances variées, être vérifiée. Le progrès qui est aujourd'hui envisagé consiste à admettre l’exception d’inconstitutionnalité pour les lois qui n’auraient pas fait l’objet de vérifications par le Conseil constitutionnel. La notion de « groupe parlementaire » est, me semble-t-il, actuellement trop imprécise. Comme nous l’avons souligné tout à l’heure, il y a les groupes qui déclarent appartenir à la majorité, ceux qui déclarent appartenir à l’opposition et les autres, qui n’appartiennent ni à la majorité ni à l’oppositi...

Photo de Bernard FrimatBernard Frimat :

Pour notre part, nous voterons cet amendement. À nos yeux, il y a effectivement une incohérence. Alors que l’on évoque le pluralisme et la reconnaissance de droits spécifiques pour les groupes appartenant à l’opposition ou pour les groupes minoritaires, nous risquons de nous retrouver dans une situation curieuse si l’exception d’inconstitutionnalité est adoptée. En effet, dans cette hypothèse, certains parlementaires ne pourront pas saisir le Conseil constitutionnel par voie d’action en tant que membres d’un groupe d’une assemblée, mais ils pourront le saisir par voie d’exception en tant que citoyens, à condition que leur requête passe par un filtre, la Cour de cassation ou le Conseil d'État. À partir du moment où l’on ouvre l’exception d’i...

Photo de Michel CharasseMichel Charasse :

...ment de permettre à tous les groupes de saisir le Conseil constitutionnel, mais aussi d’avoir une réponse à une question posée, vraisemblablement soulevée au moment des débats de ratification ou d’autorisation, dans le mois qui suit, plutôt que d’attendre des années que toutes les juridictions de France et de Navarre se soient bien chamaillées dans tous les sens pour finalement aller, au titre de l’exception d’inconstitutionnalité, devant le Conseil constitutionnel. Donc, c’est un avantage formidable ! Quant à dire qu’un « petit groupe », parce qu’il a moins de soixante membres, n’est pas capable de faire un recours comme un groupe de soixante… Je ne veux pas solliciter Robert Badinter, parce que c’est un homme discret et délicat, contrairement à moi

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

Au moment où le constituant se penche sur la modernisation du contrôle de constitutionnalité, en envisageant d’introduire le contrôle a priori sous la forme de l’exception d’inconstitutionnalité, soulevée à l’occasion d’un litige par l’une des parties au procès, une autre question apparaît, celle du contrôle de « conventionnalité », c'est-à-dire de la conformité de la loi française aux engagements internationaux souscrits par la France. La supériorité des traités sur les lois enjoint à toutes les juridictions d’écarter une disposition législative contraire à un traité ou au droit dérivé...

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Cela étant dit, nous allons enfin franchir le cap de l’exception d’inconstitutionnalité, instrument indispensable de protection des droits des citoyens que, depuis vingt ans, nous souhaitons voir créé. Alors, je vous le dis franchement, il me paraît prématuré d’aller vers une dimension nouvelle, celle de l’exception d’inconventionnalité, et d’assigner cette tâche au Conseil constitutionnel. Nous sommes aujourd’hui, avec l’ensemble des États de l’Union européenne, dans une situation...

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

...avait été répondu à M. Chaban-Delmas lorsqu’il avait sollicité, en son temps, le Conseil constitutionnel. Le rôle de conseil incombe au Conseil d’État. Je comprends que le Conseil d’État, mi-conseil, mi-juge, conserve la dénomination de « conseil », mais celle-ci n’a véritablement pas lieu d’être pour le Conseil constitutionnel. Au moment où nous allons mettre à la disposition des citoyens, via l’exception d’inconstitutionnalité, la possibilité de faire respecter les droits fondamentaux par le Conseil constitutionnel, cette dénomination n’a tout simplement pas de sens ! En tant que président du Conseil constitutionnel, j’ai eu l’occasion de me rendre dans de nombreux pays et de recevoir plusieurs délégations étrangères. J’ai en effet été conduit à donner des conseils à des pays accédant à la démocratie et qui voulaient ...

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

...de cassation, a fortiori le Conseil d’État, et beaucoup d’autres cours suprêmes remplissent des fonctions que l’on qualifie d’annexes. Autrement dit, au nom de ce qui est accessoire, vous refusez de tirer les conséquences du principe. Ce n’est pas possible ! La fonction du Conseil constitutionnel, telle que tout le monde la perçoit et au moment même où nous allons insérer dans notre droit l’exception d’inconstitutionnalité, est juridictionnelle. Je n’arrive donc pas à comprendre pourquoi on se cramponne à la dénomination actuelle ! Je demande instamment au Sénat d’appeler « cour » ce qui est une instance juridictionnelle et de laisser le terme « conseil » aux instances qui en font leur fonction principale ou en tout cas éminente, comme le Conseil d’État.

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

... est procédé à la nomination de ses neuf membres par le Président, avec un contrôle qui dure des semaines et une audition des candidats devant la commission du Sénat. S’agissant de cette grande institution, qui existe maintenant depuis deux siècles, le problème n’est pas le mode de désignation, c’est la nature de l’activité. Ensuite, je veux dire à Michel Charasse que nous sommes maintenant dans l’exception d’inconstitutionnalité. Dans ce cadre, la partie juridictionnelle sera conservée. L’originalité des procédures ne tient pas au nom. Prêtons-y attention ! Je le répète, je demande simplement le changement de dénomination, qui mettra cette instance sur le même plan que les autres juridictions pratiquant le contrôle de constitutionnalité en Europe. Parce qu’il y a eu ce lointain passé, il est difficile d’expliquer à ceux...

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

...onseil constitutionnel censure une disposition législative avant ou après promulgation de la loi, cela devrait aboutir non pas à la suppression de la loi ou d’une partie de la loi, mais à un examen par les deux chambres et à un vote du Parlement réuni en Congrès, lequel décide soit de maintenir la loi, soit de modifier la Constitution. Vous le voyez, nous avons une conception assez différente de l’exception d’inconstitutionnalité. C’est pourquoi nous ne pouvons l’accepter dans ces conditions.

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Cet amendement tend à élargir l’exception d’inconstitutionnalité aux juridictions ne relevant ni de la Cour de cassation ni du Conseil d’État. La présentation de cet amendement m’amène à poser à Mme le garde des sceaux la question suivante : pensez-vous que l’exception d’inconstitutionnalité, telle qu’elle découle de cet article, couvre tous les types de contentieux impliquant les individus ? Dans une acception stricte, cet article ne concerne que les juridi...

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Concernant l’amendement n° 236, l’exception d’inconstitutionnalité est un droit nouveau pour les citoyens, qui permettra de conforter la protection des libertés fondamentales. Il est surprenant que les auteurs de cet amendement veuillent le supprimer.

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Je veux souligner à quel point l’article qui va être adopté est important. Pour moi, c’est le fruit d’une très longue lutte. Cela fait vingt ans que j’ai proposé d’instituer l’exception d’inconstitutionnalité. On ne pouvait pas vivre, de façon pérenne, avec un système dans lequel les juridictions françaises pouvaient devenir les censeurs de lois en invoquant la Convention européenne des droits de l’homme – l’exception d’inconventionnalité –, mais ne pouvaient les censurer en arguant de la protection des droits fondamentaux inscrits dans la Constitution. Ce paradoxe ne pouvait pas demeurer. On ne pouv...

Photo de Jean-Pierre FourcadeJean-Pierre Fourcade :

...s Hauts-de-Seine Robert Badinter, cela fait très longtemps que nous essayons de mettre sur pied une telle procédure. Nous avons rencontré énormément de difficultés. De nombreuses réunions de travail se sont déroulées afin d’adapter notre droit à celui des autres pays européens. Pour ma part, malgré les quelques différends qui ont pu nous opposer précédemment, je considère que la mise en œuvre de l’exception d’inconstitutionnalité permettra de modifier un certain nombre de textes antérieurs à 1958, qui, à l’heure actuelle, causent un certain nombre de préjudices à nos citoyens.