Interventions sur "charte"

29 interventions trouvées.

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « À chaque époque sa vérité, à chaque génération sa nature. » C’est par ces mots empruntés à Lamartine que je souhaitais débuter mon propos et exprimer ainsi mon attachement à la Charte de l’environnement, cette Charte qui, en 2005, est venu répondre aux préoccupations de notre époque. Personne n’a oublié ici ce qui allait nous conduire au début des années 2000, sous la présidence de Jacques Chirac, à lui donner une valeur constitutionnelle, par l’adoption de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005. Dans l’ensemble, la Charte devait symboliser la haute importance accordée par...

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous célébrons aujourd'hui un anniversaire : il y a dix ans, Jean Bizet, Jean-Jacques Hyest et moi-même étions reçus par le président Chirac, qui nous disait tout l’intérêt et toute la passion qu’il vouait à la Charte de l’environnement. Même si certains d’entre nous n’y étaient pas tout à fait favorables, en particulier pour ce qui concernait son préambule, nous l’avons défendue et adoptée. Aujourd'hui, nous examinons de nouveau une proposition de loi destinée à actualiser un texte adopté voilà quelques années. Selon moi, c’est une bonne méthode pour faire le point sur l’application d’une loi et la jurisprud...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...éclaration des droits de l’homme et du citoyen et que les droits fondamentaux prévus dans le préambule de la Constitution de 1946, n’allait, selon nous, pas de soi. D’aucuns, qui avaient voulu cette consécration, s’en mordent peut-être les doigts aujourd’hui ; c’est en tout cas ce que j’ai cru comprendre. Pour ma part, je ne pense pas qu’il s’agissait d’une décision opportune. Nous le savons, la Charte de l’environnement était globalement acceptée, en dépit de ces quelques déclarations incantatoires. Cependant, sa constitutionnalisation masque les discussions cristallisées autour du principe de précaution, qui soulevaient un grand nombre d’interrogations, puisqu’une lecture extensive aurait pour effet d’entraver la recherche et l’innovation. Quelle devait être la définition du dommage grave et...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

...udence du Conseil constitutionnel, de la Cour de cassation et surtout du Conseil d’État est stable et en général prudente. Comme l’a justement rappelé Patrice Gélard dans son rapport, elle n’a pas conduit à une application extensive du principe. Les dérives ont notamment pu être évitées grâce à la nécessité d’évaluer le risque préalablement et au caractère provisoire et proportionné requis par la Charte. En effet, le risque étant méconnu, toute interdiction ne peut revêtir qu’un caractère temporaire en l’attente de nouvelles données scientifiques. Certes, y compris avant 2005, nous pouvons regretter le développement de ce contentieux, qui peut se révéler dissuasif en soi. Dans le cadre des organismes génétiquement modifiés par exemple, si les arrêtés d’interdiction ont été annulés par le Consei...

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, voilà presque dix ans que nous avons examiné le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l’environnement. Cette Charte était le fruit de quatre ans de travail de la commission Yves Coppens. Ce projet, je l’avais soutenu au Sénat, puis au Parlement réuni en Congrès, pour son message solennel – oui, l’avenir de l’humanité dépend du bon état des écosystèmes ! –, mais aussi pour la précaution qui s’imposerait à ceux qui veulent mettre tout et n’importe quoi sur le marché. Présenté p...

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

...aison l’a emporté. Certes, certains ont entretenu la confusion sur son champ d’application. Je pense à Roselyne Bachelot évoquant le « principe de précaution » contre un virus, pour engager 1 milliard d’euros d’argent public lors de la pandémie grippale. Ce n’était pas le sujet. Aujourd’hui, monsieur Bizet, vous nous proposez de brouiller à nouveau les cartes et de revenir sur le texte de cette Charte, au motif qu’il serait mal compris et tendrait à devenir un principe d’inaction. Bien au contraire, vous l’avez vous-même commenté, par une prise en compte précoce des risques, il questionne, il interroge, il crée des obstacles, comme dit M. Mézard, et oblige à chercher des réponses. Vouloir faire passer le principe de précaution comme un « frein aux activités de recherche et au développement éc...

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

...e considéré que comme un élément moteur d’une innovation au service de l’homme et des générations futures et de la protection de l’environnement. L’atteinte à la compétitivité, la vraie, celle qui se fonde sur l’intelligence et la performance sans dégâts collatéraux, n’est pas un argument recevable. Pour ces raisons, les sénatrices et sénateurs écologistes s’opposeront à toute modification de la Charte de l’environnement.

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

...ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement ». Ce sont les termes fondateurs du principe de précaution, posé dans le principe 15 de la déclaration de Rio de 1992, traduite en droit interne au travers de la loi Barnier de 1995. En 2005, la Charte de l’environnement a fait un pas supplémentaire, en intégrant le principe de précaution au bloc de constitutionnalité. Pourtant, presque dix ans après, ce principe fait encore largement débat, comme en témoigne cette proposition de loi constitutionnelle. Je voudrais d’abord revenir, loin des caricatures qui ont pu être faites du principe de précaution, sur ses conditions d’application concrète. ...

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

...érimentation. En effet, telle qu’elle est rédigée, la refonte de l’article 7 laisse planer un doute entre « expertise » et « expérimentation ». Or l’expérimentation peut aussi être source de dommages graves et irréversibles pour l’environnement. C’est le cas d’ailleurs pour ce qui concerne les gaz et huiles de schiste, de même que pour les OGM. Soyons prudents ! Insérer ce concept nouveau dans la Charte de l’environnement créerait de sérieuses difficultés. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre la proposition de loi constitutionnelle.

Photo de Michel TestonMichel Teston :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le débat sur la proposition de loi constitutionnelle visant à modifier la Charte de l’environnement pour exprimer plus clairement que le principe de précaution est aussi un principe d’innovation intervient dans un contexte médiatique relativement passionnel, faisant suite à l’arrêt de la cour d’appel de Colmar du 14 mai dernier, qui a relaxé cinquante-quatre personnes accusées d’avoir détruit volontairement, en 2010, une parcelle expérimentale de soixante-dix porte-greffes de...

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Chacun ne le sait que trop, il est plus facile d’inquiéter que de rassurer. Le principe de précaution doit être mis en œuvre avec objectivité, en évitant de lui donner une portée qu’il n’a pas et de l’instrumentaliser à tout propos. Il renferme aussi une exigence de recherche et d’expertise, d’ailleurs réaffirmée par l’article 9 de la Charte. Il ne saurait être hâtivement traduit par une sorte d’impératif d’interdiction systématique de tout ce qui n’est pas conforme à l’utopie du risque zéro. La Charte de l’environnement est un progrès majeur de notre ordre juridique. Voulue par le Président de la République Jacques Chirac, qui en avait pris l’engagement devant les Français lors de la campagne de l’élection présidentielle de 2002, e...

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

...ue des cultures d’OGM, de l’exploitation du gaz de schiste, ou de la production d’électricité nucléaire. De telles mesures relèvent de choix politiques, que l’on peut soutenir ou combattre – je les combats !–, mais ne résultent pas d’une obligation juridique relevant du principe de précaution. La proposition de loi constitutionnelle de notre collègue Jean Bizet ne retire rien à l’article 5 de la Charte, qui fait référence au principe de précaution. Elle se borne à le compléter. L’interprétation de ce principe devrait dorénavant tenir compte d’un nouveau principe constitutionnel, le principe d’innovation. C’est une explicitation, car le principe de précaution, dans son acception la plus rigoureuse, implique nécessairement que la recherche soit stimulée pour apporter des solutions à des risques d...

Photo de Michel BersonMichel Berson :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la révision constitutionnelle du 1er mars 2005 a inscrit dans le préambule de notre loi suprême la Charte de l’environnement, qui, à son article 5, définit le principe de précaution. Dix ans après cette révision, la constitutionnalisation du principe de précaution, déjà consacré dans notre droit par la loi Barnier de 1995, fait toujours l’objet d’un vif débat. La controverse continue entre partisans et détracteurs non pas de ce principe, mais de son inscription dans la Constitution. Certes, face aux...

Photo de Michel BersonMichel Berson :

En janvier 2008, dans le rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, Jacques Attali préconisait d’abroger l’article 5 de la Charte de l’environnement ou, à tout le moins, de préciser très strictement la portée du principe de précaution. L’article 5, soulignait-il, « risque d’inhiber la recherche fondamentale et appliquée, dans la mesure où une innovation qui générerait potentiellement un dommage dont la réalisation serait “incertaine en l’état des connaissances scientifiques” pourrait ouvrir des recours en responsabilité, t...

Photo de Michel BersonMichel Berson :

...nément, utilement, sagement à l’approfondissement du débat public sur ces principes, un débat qui se prolongera d'ailleurs le 5 juin prochain lors de l’audition publique de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPECST, sur le principe d’innovation, qui vise en particulier à analyser ce que pourraient être demain – rêvons un instant – les fondements d’une Charte de l’innovation.

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne :

... principe de précaution, mais dans des conditions qui seraient définies par une loi simple, et non pas par une loi organique. L’application du principe de précaution doit être encadrée ; le législateur explique ce qu’il veut au travers du principe de précaution qu’il a voté. Nous suggérons donc, au travers de cette disposition qui avait déjà été proposée au moment de la discussion initiale de la Charte, d’encadrer dans des conditions définies par la loi l’application du principe de précaution.

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard, rapporteur :

...ganique ? L’article 46 de la Constitution dispose : « Les lois auxquelles la Constitution confère le caractère de lois organiques sont votées [….] » En d’autres termes, c’est la Constitution qui confère le caractère organique à une loi. A-t-on jamais vu une seule disposition du préambule de la Constitution, que ce soit la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le Préambule de 1946 ou la Charte de l’environnement renvoyer à une loi organique ? Ce serait d'ailleurs extrêmement dangereux pour la suite. Imaginez que puisse être renvoyée à une loi organique la modification de telle ou telle disposition du Préambule de 1946 ! Dès lors, le caractère supraconstitutionnel ou constitutionnel des préambules se trouverait affecté par cette disposition. Par conséquent, la formulation proposée par...

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

...ailleurs, j’observe – M. Détraigne aurait pu faire cette remarque – que le texte ne crée pas de principe d’innovation, mais précise que l’on veille à l’innovation. Il est dit, dans les dispositions relatives au principe de précaution, que l’on doit veiller aussi à « la promotion de l’innovation », ce qui n’est pas tout à fait pareil. En fait, on applique le principe de précaution inscrit dans la Charte depuis son adoption ; des lois existent qui permettent de veiller à l’application du principe de précaution, mais il y a aussi des règlements, des décisions administratives. C’est un principe de procédure, nous a-t-on dit – je renvoie sur ce sujet au rapport de notre excellent doyen Gélard –, et qui est d’application directe. On peut bien sûr faire des lois, mais prévoir une loi organique, ce qu...

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier :

...: il a donc, de toute façon, une valeur supra-légale. Cet amendement n’est donc pas forcément indispensable, mais, sur un plan pédagogique, il n’est pas inutile. L’objet principal de la proposition de loi constitutionnelle que nous examinons aujourd’hui est de rappeler que le principe de précaution est également un principe d’innovation. Personnellement, j’estime que la rédaction initiale de la Charte, que j’ai relue avant notre débat de ce soir, est excellente. Pour autant, il ne serait pas forcément inutile que, dans certains domaines, le législateur précise les modalités de mise en œuvre des principes constitutionnels. Pour conclure, cet amendement n’est pas indispensable, mais il n’est pas non plus inutile. Dès lors, autant le voter !

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Vous l’avez rappelé, monsieur Grosdidier, le principe de précaution figure dans l’ordre juridique européen : un règlement de 2002 prévoit un processus précis, en six étapes, d’évaluation et de prévention des risques connus. Force est de constater que, en réalité, l’introduction du principe de précaution, par la Charte de l’environnement, dans notre Constitution est d’une portée qui est à la fois plus exigeante et plus floue. Par conséquent, si l’on souhaite éviter que les non-juristes ne fassent du principe de précaution un principe d’abstention, il est préférable de le préciser dans une loi plutôt que d’attendre la jurisprudence. Je formulerai quelques remarques supplémentaires. Tout d’abord, le progrès sci...