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...ensure mémorielle alla jusqu’à l’interdiction, durant des décennies, de la diffusion du fameux et beau film de Stanley Kubrick intitulé Les Sentiers de la gloire. Dès l’origine, ce fut une question délicate et politiquement sensible : quel sort réserver aux soldats français fusillés pour l’exemple entre 1914 et 1918 – surtout la première année ! –, après avoir été condamnés par la justice militaire pour désertion, mutinerie, refus d’obéissance ? Fallait-il les réhabiliter ? Si oui, comment ? Cette revendication a connu un regain en novembre 1998 lorsque Lionel Jospin, alors Premier ministre, avait souhaité, lors d’une cérémonie sur le plateau de Craonne, que les soldats « fusillés pour l’exemple, au nom d’une discipline dont la rigueur n’avait d’égale que la dureté des combats, réintègrent...
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la question des fusillés pour l’exemple constitue un volet particulièrement douloureux de la Grande Guerre. Elle renvoie à la condamnation par les tribunaux militaires et à l’exécution par l’armée de ses propres soldats, reconnus coupables de manquements à la discipline militaire : refus d’obéissance, abandon de poste, désertion à l’ennemi, ... Cette question est difficile, car elle nous confronte à des histoires personnelles bouleversantes, comme celle du soldat Lucien Bersot, condamné et exécuté pour n’avoir pas voulu porter le pantalon taché de sang d’un c...
… encore moins à un nombre précis de fusillés. Ils visent, selon les cas, à évoquer la dimension exemplaire que revêtait la condamnation, c’est-à-dire l’idée qu’elle doit dissuader les autres soldats d’agir pareillement, le caractère démonstratif de l’exécution, qui, conformément au règlement militaire alors en vigueur, donne lieu à un cérémonial très codifié en présence de la troupe, ou encore le fait que certains fusillés ont été arbitrairement désignés parmi d’autres coupables pour être, en quelque sorte, des victimes expiatoires. L’exposé des motifs de la proposition de loi faisant référence à « plus de 600 fusillés pour l’exemple », on peut considérer que sont ici visés tous les fusillés ...
...é fusillés pour n’avoir su sortir assez vite de la tranchée ? Parlons-nous de ceux qui, après avoir essuyé l’horreur de l’assaut contre une tranchée ennemie, ne pouvaient se retenir de regarder leurs officiers en murmurant « assassin, assassin ! ». Est-ce cela « l’exemple » justifiant le fait de fusiller nos propres compatriotes ? Est-ce cela le prix de la discipline dans les rangs ? Une justice militaire intransigeante quand elle était exercée, des conditions de guerre épouvantables, des circonstances terribles, voilà les raisons pour lesquelles ces hommes furent fusillés. Il s’agissait d’exécuter pour dissuader. On a brisé des vies. Dans le rapport remis au Gouvernement par le comité d’historiens présidé par Antoine Prost sur la question des fusillés pour l’exemple est cité un cas qui m’a spéci...
...les désigner est unique, la réalité de leur condition est multiple. Certains, ayant refusé, selon les mots du Premier ministre Lionel Jospin, « d’être des sacrifiés », ont été victimes, lors de leur passage devant le conseil de guerre, d’une absence d’instruction préalable, ainsi que de témoignages exclusivement à charge et réduits à la portion congrue. D’autres, plus d’une centaine, civils comme militaires, ont été jugés coupables non pas d’avoir flanché face à la violence quotidienne et vaine des combats, mais de s’être livrés à des actions d’espionnage ou d’avoir commis des crimes de droit commun, parfois des crimes de sang. C’est cette diversité des cas personnels qui rend ce sujet si difficile à aborder de façon globale ; elle rend symboliquement compliquée une réhabilitation collective. Dan...
...e la Grande Guerre que nous examinons une proposition de loi chargée d’émotion qui renvoie à un événement tragique de notre histoire. Le cas des « fusillés pour l’exemple » de 1914-1918 fait partie de ces chapitres douloureux qui resurgissent régulièrement parce qu’ils n’ont pas été dépassionnés totalement. Nous savons que c’est un sujet qui a longtemps partagé, d’un côté, les tenants de l’ordre militaire coûte que coûte et, de l’autre, ceux qui ont mis en avant les circonstances atténuantes des « fusillés pour l’exemple ». Les seconds finiront par l’emporter. En effet, les lois d’amnistie de 1919, puis de 1921, ainsi que la loi du 9 août 1924 tendant à permettre la réhabilitation des soldats exécutés sans jugement, ont rapidement posé la question du sort injuste de ces soldats victimes des affre...
...main et barbare dans lequel les soldats français ont évolué, le chef de l’État a souhaité « qu’aucun des Français qui participèrent à cette mêlée furieuse ne soit oublié ». Cependant, les déclarations ne suffisent pas. Et c’est bien là tout le sens cette proposition de loi ! Le groupe écologiste salue cette initiative. En effet, ce texte vise environ 600 fusillés pour manquements à la discipline militaire : refus d’obéissance, abandon de poste, révolte, voie de fait sur supérieur, désertion à l’ennemi. Le rapport énonce que ni les soldats exécutés pour des crimes de droit commun ni les civils coupables d’espionnage ne sont concernés. Ces « fusillés pour l’exemple », condamnés à mort par des conseils de guerre et exécutés au front, ont servi de levier de répression pour instaurer un climat de terr...
Mme Leila Aïchi. Les mutins de la Grande Guerre ont rejeté l’absurdité et la barbarie dans laquelle la nation se trouvait. Ils ont bravé une autorité militaire devenue absurde. À ce titre, ils étaient aussi des héros.
...rs ! Brancardiers ! À moi ! Au secours ! D’autres suppliaient qu’on les achève. C’était affreux à voir. […] le bombardement commençait et il fallait rester là, à attendre les obus, sans pouvoir bouger jusqu’au soir huit heures, où on venait nous relever. » Avec un siècle de recul, nous devons comprendre que les hommes visés par cette proposition de loi, condamnés pour manquements à la discipline militaire, n’étaient ni des lâches ni des traîtres. Les témoignages et les analyses en ce sens abondent et ne font que rappeler la détresse dans laquelle ces hommes, au service de la France, se trouvaient. Mes chers collègues, aujourd’hui, force est de constater que l’image des fusillés est déjà « réhabilitée » dans la conscience collective. Or il s’agit simplement ici de permettre à la loi de s’adapter a...
madame Didier. D’ailleurs, presque immédiatement après la guerre, pendant deux ans, de 1933 à 1935, alors que certains des acteurs militaires étaient encore en activité, une cour spéciale composée de magistrats et de militaires a réhabilité un certain nombre de fusillés, mais pas tous. En d’autres termes, quinze ou vingt ans après les faits, à une période où l’on n’était plus sous la pression de la guerre, non seulement cette cour à la composition mixte n’a pas réhabilité collectivement les soldats fusillés, mais elle n’en a pas non p...
...tobre 1914, on en compte 60, et on était alors loin des mutineries. Mes chers collègues, souvenons-nous : en octobre 1914, la guerre n’a commencé que depuis deux mois, les forces allemandes percent les lignes françaises sur la Marne. Le général Gallieni mobilise alors les Parisiens et réquisitionne les taxis pour défendre Paris, la capitale, la patrie et la République ! Il est vrai que les chefs militaires disent aux autorités civiles : « Nous ne tenons pas ! » Il est vrai également que c’est à ce moment-là que sont survenus un certain nombre de désertions et de problèmes dus à la débâcle. Est-ce que vous pouvez dire à des chefs militaires qui défendent la République : « Vous n’avez pas à prendre de mesures pour sauver Paris, pour sauver la France, pour sauver la République ? »
… mais ce que je sais, c’est qu’une réhabilitation collective de tous les soldats fusillés pour l’exemple laisserait entendre que tout ce qui a été fait par les autorités militaires et civiles de l’époque est une erreur, une faute. Or cette condamnation rejaillirait sur tous nos chefs militaires et sur l’ensemble de la République. Oui à des réhabilitations au cas par cas, comme il y en a déjà eues durant l’entre-deux-guerres, et comme il y en aura encore, j’en suis sûr ! Mais non à la réécriture de l’histoire ! Ne disons pas que la République s’est trompée pendant des anné...
... mémoire commune. Peu connue du grand public, cette question est douloureuse pour les familles de fusillés, mais elle est aussi très délicate d’un point de vue symbolique et politique, en ce qu’elle touche à l’honneur des combattants, au patriotisme, à nos armées. De quelle façon revenir sur le cas des quelque 740 soldats français fusillés entre 1914 et 1918, dont 600 pour des motifs strictement militaires, après avoir été condamnés par la justice militaire pour désertion, mutinerie, refus d’obéissance, espionnage ou même crime de droit commun ? Faut-il vraiment les réhabiliter aujourd’hui au sens juridique du terme de façon indistincte ? Sinon, comment procéder pour ceux qui auraient fait l’objet d’une injustice manifeste ? Je comprends tout à fait qu’une procédure de réhabilitation collective s...
Ces hommes furent également victimes de procédures judiciaires militaires iniques. C’est donc pour cet ensemble de raisons, et parce qu’il est de nature à rassembler et à apaiser les esprits, que le groupe communiste républicain et citoyen votera pour l’amendement à la proposition de loi de notre collègue Guy Fischer. Son adoption constituerait un geste fort de notre assemblée, qui conforterait la reconnaissance officielle réalisée par le pouvoir exécutif ces derniè...
...leur histoire dramatique. Pensons à King and country de Joseph Losey, dont le titre français est d’ailleurs Pour l’Exemple. Les Français sont aujourd’hui majoritairement favorables à une telle réhabilitation. Néanmoins, sur les plans juridique et historique, la réhabilitation est avant tout un acte consistant à annuler des peines prononcées et des jugements rendus par les tribunaux militaires. Elle renvoie donc au fonctionnement de la justice en temps de guerre. Dès le début des hostilités, des conseils de guerre spéciaux ont été chargés de juger de manière expéditive des soldats accusés de désertion, de refus d’obéissance et d’abandon de poste en présence de l’ennemi. La préoccupation essentielle était alors de prévenir la contagion au sein des troupes et de préserver l’autorité de...
Lorsque l’on engage le pays tout entier pour se défendre, il est important que les principes sur lesquels se fonde l’action militaire soient respectés. Cependant, monsieur le secrétaire d'État, votre démarche est très pertinente. Vous avez accepté, comme le Président de la République l’a souhaité, d’ouvrir une salle dédiée, car il ne doit pas y avoir, dans notre pays, de mémoire perdue. Ce chemin risque d’ailleurs d’être un chemin de croix, car la France sait très bien être amnésique quand cela l’arrange. Je souhaite cependan...