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Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il s’agit d’un article important puisqu’il traite du préjudice écologique, que nous connaissons bien. En effet, c’est au Sénat, sur une proposition de loi que j’avais signée et dont le rapporteur était Alain Anziani, que le principe de la consécration dans le code civil du préjudice écologique a été adopté à l’unanimité. Je le rappelle, le code civil est en quelque sorte, selon l’expression d’un grand juriste, la Constitution de la société civile. Il s’agit...
Le régime de réparation, tel qu’il est pour l’instant conçu dans le code civil – nous parlons sous le regard de Portalis – est complètement inadapté à la prise en compte de la réparation du dommage écologique. En effet, la nature n’étant pas une personne – traditionnellement, le régime de la réparation dans le code civil exige qu’un préjudice soit personnel pour être réparable –, elle ne peut être une victime ; donc s’il n’y a pas de victime, on ne peut réparer le dommage. Un raisonnement spécieux, bien sûr… En même temps, le code civil pose un autre problème : en droit de la réparation, le juge est confronté à la fois à une liberté, celle de décider si le dommage est réparé en nature ou sous forme monétaire, et à une contrainte, pui...
Je viens d’écouter Bruno Retailleau avec beaucoup d’attention et d’intérêt et je partage complètement ses propos. Simplement, je me pose une question à propos de la précision et de la définition d’un dommage « anormal ». Tel est mon problème. Il me semble plus intéressant de faire mention à un « préjudice grave et durable ». La notion juridique de la gravité de la faute me semble plus forte et plus claire que celle d’anormalité, qui laissera au juge une marge extrêmement large d’interprétation.
Je suis désolé d’indiquer à mon cher collègue Daniel Dubois que suis défavorable à son amendement. Cet amendement vise deux objectifs. Premièrement, il s’agit de remplacer la formulation « toute personne responsable d’un dommage » par « toute personne qui cause un préjudice écologique ». Or cette formulation pose un réel problème, car elle reste dans l’incertitude, introduite à l’Assemblée nationale, portant sur le régime de responsabilité applicable. Avec la formule « toute personne qui cause un préjudice écologique », on ne sait pas si l’on est dans un régime de responsabilité sans faute, pour faute ou encore du fait d’autrui ; surtout, il y a une vraie incertitu...
Je veux simplement ajouter un mot pour rassurer Daniel Dubois : le préjudice écologique doit servir à réparer un dommage qui n’est pas anodin, évidemment. Or, dès lors que l’on s’est interrogé sur la qualification du préjudice écologique, après l’adoption de notre proposition de loi, le garde des sceaux de l’époque avait constitué un groupe de travail sous la présidence d’un professeur de droit, M. Jégouzo. Ce groupe devait étudier les problèmes que nous n’avions pas trai...
L’avis est défavorable. Cet amendement vise à préciser que le titre ne s’applique pas aux dommages environnementaux qui font l’objet d’un régime particulier de réparation résultant de conventions internationales. Il est donc, au mieux, satisfait, dans les cas où la réparation du préjudice est déjà prévue, et, au pire, dangereux, dans les cas où un régime spécial ne prévoit qu’une réparation du préjudice personnel subi – par exemple, dans le cas de l’amiante –, là, la réparation du préjudice à l’environnement n’existerait plus ; or notre but est précisément de réparer ce préjudice « pur ».
Il s’agit de préciser que la réparation du préjudice écologique s’effectue en nature. Je vous fais grâce de l’exposé des motifs, car vous aurez compris quel est l’objet de l’amendement.
Nous sommes toujours dans le code civil, plus précisément dans les conditions de réparation du préjudice écologique, qui doit s’effectuer en priorité en nature. Avec cet amendement, nous proposons de faire référence à l’article L. 110–1 du code de l’environnement, dont nous venons de discuter longuement, afin de sécuriser le dispositif, puisque cet article définit justement de manière assez précise les conditions de la réparation en nature.
Je vais répondre en deux temps, puisque, même si les trois amendements sont en discussion commune, ils méritent des réponses différentes. Monsieur Vasselle, votre amendement n° 77 rectifié a pour objet de prévoir que la réparation du préjudice ne peut se faire qu’en nature. Le dispositif que vous proposez est à mon sens incomplet, car il n’est pas accompagné d’un plan B pour les cas où la réparation en nature ne serait pas possible. J’ajoute que cet amendement me semble mal justifié. Nous sommes bien dans un régime visant la réparation du dommage, c’est-à-dire que nous sommes non pas dans le triptyque « éviter-réduire-compenser », mai...
Nous sommes dans la partie du texte de loi concernant les préjudices qu’il est impossible de réparer en nature. Dans ces cas-là, il est prévu que le juge peut allouer des dommages et intérêts. Dès lors qu’une telle impossibilité est constatée, il ne me semble pas logique de ne pas en tirer les conséquences et de prévoir que le juge puisse ne rien faire. Il est donc plus cohérent de préciser que « le juge alloue des dommages et intérêts, affectés à la réparation ...
La consécration de la réparation du préjudice écologique pur par l’article 2 bis du projet de loi constitue une grande avancée de notre droit. Elle permettra de sécuriser la jurisprudence en la matière, qui ne se heurtera plus à l’exigence, par le droit commun de la responsabilité civile, du caractère personnel du dommage. La réparation du préjudice sera nettement améliorée. Si nous saluons l’excellent travail de nos collègues Bruno ...
Concernant ces dispositions extrêmement importantes, puisqu’il s’agit de savoir qui a un intérêt à agir dans le domaine du préjudice écologique, j’avoue sans rougir que je me suis appuyée sur les travaux d’un juriste, Laurent Neyret, qui a beaucoup travaillé sur ces questions. Aujourd’hui, le texte, tel qu’il est proposé, liste un certain nombre d’organismes qui ont un intérêt à agir, c’est-à-dire qui seraient légitimes à demander réparation. Tout le problème d’une liste, c’est qu’elle comporte nécessairement des lacunes. D...
Enfin, j’ai bien senti qu’il y avait une crainte d’explosion des contentieux dans ce domaine. Néanmoins, le juge apprécie l’intérêt à agir, et, en cas d’action abusive, il existe des garde-fous, notamment une possibilité de condamnation à ce titre. Par conséquent, à mon sens, nous serions bien avisés de conserver la pureté du code civil en précisant simplement que l’action en réparation du préjudice écologique est ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir et en laissant le soin au juge d’apprécier ces dispositions.
Mme Jouanno a présenté l’essentiel de l’objet, mais j’insiste quand même sur le fait que, dans le cas des marées noires du type Erika, des communautés, des groupes économiques ont subi des préjudices extrêmement importants. Je pense notamment à l’aquaculture, mais la liste est assez importante. Tel que le texte est rédigé, il ne fonctionnera pas bien. Il faut aller vers plus de simplicité, en reprenant une notion déjà parfaitement connue en droit : ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir, la personne devant démonter en quoi elle a intérêt à agir. À mon avis, cette solution...
La commission est défavorable à ces deux amendements, qui visent à ouvrir l’intérêt à agir d’une action en réparation du préjudice à « toute personne ayant qualité et intérêt à agir ». Tout d’abord, ce dispositif est à la fois contraire au texte de l’Assemblée nationale, qui prévoyait une liste limitative et une ouverture, et au texte de notre commission. Ensuite, avec cette rédaction, on ne se prémunit pas contre le risque de laisser un intérêt à agir à des personnes qui n’en ont pas les moyens, ou qui ont des stratégies ...
J’invite le groupe Les Républicains à faire de même, mais je souhaite présenter quelques remarques. Tout d’abord, les travaux du professeur Neyret sont excellents et si la consécration de la notion de préjudice écologique dans le code civil intervient ce soir, elle lui devra beaucoup. Ensuite, avec le préjudice écologique, il s’agit de reconnaître un préjudice qui a un double caractère. D’une part, il est objectif, et non pas subjectif. En termes de droit civil, cela signifie qu’il n’atteint aucun sujet de droit, la nature n’étant pas un sujet de droit en tant que tel. D’autre part, il est collectif, ...
Il s’agit d’un amendement rédactionnel. L’article tel qu’il est rédigé parle de réparation des dommages éventuellement subis, or il s’agit plutôt d’un préjudice à réparer.
Je veux juste préciser que nous l’avons rectifié à la demande de M. le rapporteur. Il est effectivement plus logique de parler de préjudice écologique que de dommage éventuellement subi.
Nous proposons une sanction dissuasive effective grâce à un système d’amende civile. Celui-ci est destiné à sanctionner la « faute lucrative » grave, c’est-à-dire les situations dans lesquelles une personne physique ou morale décide sciemment d’infliger un préjudice à l’environnement, parce que le bénéfice financier qui en découle, comparativement aux frais de réparation et aux sanctions éventuellement prononcées, demeure incitatif.
À travers cet amendement, vous proposez une révolution, qui a peut-être échappé à l’objectif réel que vous souhaitez inscrire dans le texte. Vous voulez réprimer les fautes lucratives qui enrichissent celui qui les commet par une amende civile. Un tel mécanisme est donc totalement étranger à la réparation intégrale du préjudice, puisqu’il revient à faire payer plus que nécessaire pour rétablir le statu quo ante. En outre, il mord sur la répression pénale des infractions environnementales. Comment appliquera-t-on le principe non bis in idem, qui a agité nos débats au début de l’après-midi, et qui interdit de punir deux fois pour le même fait ? Paradoxalement, vous risquez d’affaiblir la répression, ce qui...