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Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, le débat sur la défense antimissile balistique, demandé en octobre par lettre du président du groupe socialiste, M. Jean-Pierre Bel, semble arriver aujourd’hui tel Grouchy à Waterloo, c’est-à-dire un peu tard ! En effet, cette lettre faisait suite à la publication, le 15 octobre dernier, par le service de presse de la présidence de la République, d’une déclaration sur le sujet. On y rappelait « le soutien de principe de la France à la nouve...
...le a cette vertu intéressante qu’elle permet de diffracter cette nouvelle lumière stratégique et d’éclairer d’un jour différent nos propres contradictions. Elle nous force à nous poser les questions de fond : qui s’agit-il de défendre ? de quelle menace ? avec quels moyens et avec quels alliés ? Ce qui m’amène à ma seconde série d’observations, concernant l’appréciation de la défense antimissile balistique en soi. Premièrement, il ne s’agit pas de construire une défense pour répondre à une menace immédiate du territoire national. En effet, on ne peut pas laisser croire à nos concitoyens qu’un pays proliférant – n’en nommons aucun, c’est préférable –, soit actuellement en capacité de lancer sur le territoire européen des missiles intercontinentaux équipés d’ogives nucléaires. À supposer qu’un gouv...
Le concept américain repose sur une triade : les armes nucléaires, dont les États-Unis déclarent vouloir réduire le rôle, les armes conventionnelles de nouvelle génération, Prompt Global Strike, dont le rôle serait appelé à s’étendreet, enfin, la défense antimissile balistique, qui permet aux États-Unis avec un budget représentant, à lui seul, l’équivalent de tous les autres, d’arroser leurs industries de haute technologie. M. Daniel Reiner l’a très bien expliqué, je n’y reviens pas. C’est en même temps pour les États-Unis le moyen de se subordonner leurs alliés, si tant est qu’ils font l’objet d’une menace : le Japon et la Corée du Sud sans doute par rapport à la Cor...
...en créant un syndrome « ligne Maginot ». Il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre de voir que les pays partisans de la défense antimissile en Europe sont ceux qui consacrent le moins d’efforts à leur défense. Quels sont les faits nouveaux qui pourraient justifier l’adhésion de la France à la défense antimissile ? Le premier fait nouveau est l’évolution de la menace, du fait de la prolifération balistique. Loin de moi la volonté de contester que la Corée du Nord et l’Iran ont fait un certain nombre de progrès dans les domaines, notamment, de la séparation des étages et du carburant solide. D’autres pays vendent des missiles et, par conséquent, contribuent à une certaine menace, bien que, à mon sens, le territoire national ne soit pas aujourd’hui menacé. Le deuxième fait nouveau concerne nos indus...
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord me féliciter de la tenue de ce débat, dû à une demande de nos collègues socialistes, sur la défense antimissile balistique. Mais nous débattons après coup, après que la décision a été prise il y a quinze jours, au sommet de l’OTAN, à Lisbonne. Je sais bien, monsieur le ministre d’État, qu’un concours de circonstances indépendant de votre volonté explique cette situation, mais, dans ces conditions, je suis sans illusion sur la portée du débat que nous consacrons aujourd’hui aux orientations de notre politique de déf...
...ste pas à nous interroger sur le point de savoir si, oui ou non, la France doit prendre une part active au système anti-missile que l’OTAN a décidé de bâtir. Comme le président de Rohan, je dis que la réponse à cette question est « oui ». Premièrement, il s’agit de nous doter d’un nouvel outil militaire. En dehors du cercle des puissances majeures, on observe le développement rapide de capacités balistiques. Les technologies maîtrisées par certains pays dans le domaine de la courte et de la moyenne portées sont plus avancées que le Livre blanc de 2008 ne le prévoyait. À Lisbonne, le Président de la République a explicitement évoqué la menace iranienne. Sur ce point, je tiens à dire qu’il faut veiller à ne pas diaboliser l’Iran. Ce pays a, à sa tête, des dirigeants dangereusement caricaturaux, mais ...
...ous voudrions que la représentation nationale soit éclairée devant ce risque de perte d’autonomie dans la décision pour la France. Qu’en est-il de la mise en place d’un outil de commandement et de contrôle – le fameux C 2 – pour cette nouvelle défense ? Qui commandera réellement le système ? On nous dit que la décision est prise sur la base d’un projet réaliste, adapté à l’évolution de la menace balistique que font peser certains programmes mis en œuvre au Moyen-Orient. Pouvez-vous nous dire quelle est la réalité de l’évolution de cette menace ? À mots mal couverts, tout le monde semble comprendre que c’est de l’Iran qu’il s’agit. Sans nul doute pourrez-vous nous éclairer sur l’urgence qu’il y a à décider. Nous attendons de vous, cela va de soi, des réponses précises, et non les mêmes explications...
... et doit faire l’objet d’études complémentaires au sein de l’OTAN au cours de l’année 2011. C’est un sujet dont l’importance, à mon sens, ne fera que s’accentuer dans les années à venir. Nous devons ce débat à l’initiative du groupe socialiste, mais permettez-moi, mes chers collègues, de remercier avant tout le président de Rohan d’avoir inscrit l’examen de la question de la défense anti-missile balistique à l’ordre du jour de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées voilà déjà plusieurs mois. Cela nous permet aujourd’hui d’être beaucoup mieux informés sur un sujet parfois complexe, dans ses dimensions tant techniques que stratégiques. Nous avons entendu et questionné, en commission, des personnalités comptant parmi les plus qualifiées, notamment le général Abrial,...
...t de participer au système autrement qu’en simple financeur. Autrement dit, il s’agit d’être un acteur de cette défense anti-missile qui va influer sur le paysage stratégique international dans les décennies à venir. Comme l’indique le rapport de la commission, il faut que nous posions très clairement les conditions de notre engagement. Au plan stratégique, tout d’abord, la défense anti-missile balistique n’est pas une protection absolue ; elle ne peut pas être non plus un substitut à la dissuasion, dont elle est seulement un complément. Notre excellent collègue Jean-Pierre Chevènement vient une nouvelle fois de nous rappeler que, dans l’histoire du monde et des guerres, le glaive a toujours vaincu le bouclier. Je crois, mes chers collègues, qu’il nous faut aujourd'hui disposer à la fois du glaiv...
... président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, mes chers collègues, à ce stade du débat, mon intervention recoupera forcément celles de mes prédécesseurs, dont je partage de nombreuses analyses, notamment celles de MM. Josselin de Rohan et Xavier Pintat. Je vous prie donc d’excuser le caractère redondant de certains de mes propos. La défense anti-missile balistique, ou DAMB, vise à se protéger des attaques par missiles balistiques, que ces attaques menacent des troupes déployées sur des théâtres d’opérations ou des populations à l’échelle d’un territoire. Depuis des mois, partisans et opposants d’un tel système de défense placent le débat sur un plan théorique, dans le droit fil de l’éternel débat entre l’épée et le bouclier. En France, les opposants à la...
...s développées pour l'alerte avancée serviront directement à la protection contre les missiles. Il fallait sans doute explorer encore plus avant cette piste et, dans ce cadre, tenter de favoriser les industries européennes d'abord. Toutefois, l'alerte avancée, sorte de vigie de la dissuasion nucléaire, ce n'est pas la même chose que la défense anti-missile américaine adoptée à Lisbonne. La menace balistique et nucléaire iranienne justifie-t-elle la mise en place d’un système de missiles anti-missiles ? Il y a sur ce sujet aussi une inflexion. Jusqu'ici, on disait qu'un Iran nucléaire était inacceptable ; aujourd'hui, on admet implicitement que c'est envisageable. Mais c'est le rôle de la dissuasion de faire échec à une telle menace, le jour où elle existera. Un seul missile iranien sur l'Europe et ...