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...e président de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de féliciter notre nouveau ministre de la culture, Franck Riester, et de lui souhaiter pleine réussite dans l’exercice de ses fonctions. Mes chers collègues, nous examinons donc aujourd’hui en nouvelle lecture la proposition de loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information. Le 26 juillet dernier, par un vote quasi unanime, le Sénat a adopté, sur proposition de sa commission de la culture, une motion tendant à opposer la question préalable à ce texte. Actant un différend irréconciliable, la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 26 septembre n’a pas pu trouver un accord. Les députés ont donc examiné en nouvelle lecture la présente proposition de loi le 9 o...
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la culture, monsieur le président de la commission des lois, nous voici de nouveau réunis pour examiner, en nouvelle lecture, la proposition de loi et la proposition de loi organique relatives à la lutte contre la manipulation de l’information, après l’échec, logique, des deux commissions mixtes paritaires. En première lecture, conjointement avec Mme la présidente de la commission de la culture, je vous avais proposé, au nom de la commission des lois, de rejeter ces textes, par l’adoption de deux questions préalables. En effet, la création d’une nouvelle procédure de référé, visant à faire cesser la diffusion « des allégations ou impu...
...exploité par les fake news ? Pourquoi le complotisme séduit-il ? Pourquoi une telle défiance envers les élites politiques ou intellectuelles ? Je ne suis pas sûr qu’une nouvelle procédure répressive, réclamée par le Président de la République et le Gouvernement, soit la réponse la plus efficace à ces mouvements qui tentent de décrédibiliser la parole publique. Les vraies manipulations de l’information sont délibérées, mais surtout clandestines : elles ne sont évidentes ni pour le public ni pour les victimes de ces manipulations. Elles ne peuvent donc être appréhendées par un dispositif judiciaire exigeant de rapporter la preuve contraire et a priori des allégations proférées. Je rappelle que le juge des référés est le juge de l’évidence, de l’illégalité manifeste. En quarante-huit heure...
...e ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord féliciter M. Riester pour sa nomination en qualité de ministre de la culture. Vous l’avez compris, monsieur le ministre, les chantiers sont particulièrement nombreux. Nous ouvrons l’un d’entre eux avant d’attaquer le projet de loi de finances. Vous n’êtes pas sans savoir que la proposition de loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information soulève quelques questionnements au Sénat, non pas tant sur l’objectif politique, très légitime, que sur la réponse juridique, à la fois parcellaire et inadéquate, qui lui est apportée. C’est pourquoi nous, membres du groupe socialiste et républicain, avons déposé, comme en première lecture, une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité sur ce texte. Je vais vous en exposer les motif...
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente et rapporteur de la commission de la culture, monsieur le rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, le 26 septembre dernier, sénateurs et députés réunis en commission mixte paritaire ont fait le constat d’un différend irréconciliable sur les textes relatifs à la lutte contre la manipulation de l’information. En nouvelle lecture, le 9 octobre, la chambre basse a apporté des modifications fort peu significatives à ses travaux initiaux. Aucun des écueils mis en lumière par la Haute Assemblée en première lecture n’a fait l’objet d’un réexamen approfondi. Les observations que nous avions formulées s’inscrivaient pourtant dans une démarche réellement constructive. Il n’y avait et il n’y a toujours de no...
... juridique, il existe déjà la plainte pour diffamation, cette dernière étant l’imputation d’un fait précis de nature à porter atteinte à l’honneur et à la réputation. Mes chers collègues, que voulez-vous de plus ? En réalité, vous cassez le droit en vigueur. Finie la justification d’un fait précis : ce texte permettra de supprimer des contenus de manière aléatoire. C’est ce qu’on appelle museler l’information, et, effectivement, cela sent curieusement les années trente ! Ce texte vague et largement interprétable n’est pas acceptable. Il représente un danger pour nos libertés institutionnelles, pour les libertés individuelles, et, in fine, pour la démocratie. Je crains que l’on ait pris l’habitude de vouloir museler le peuple et son droit à défendre ses aspirations profondes, aujourd’hui sa vo...
...rs des élections en Ukraine, au Bundestag, du référendum néerlandais, du référendum sur le Brexit et des élections américaines, ont prouvé que les démocraties occidentales, même les plus grandes, n’étaient pas intouchables. Ensuite, la tentative d’ingérence dans l’élection présidentielle française de 2017 nous a fait prendre conscience plus concrètement de notre vulnérabilité. La manipulation de l’information, entendue comme la diffusion intentionnelle et massive de nouvelles fausses ou biaisées à des fins politiques hostiles, est liée à la combinaison de deux facteurs : d’une part, les capacités de diffusion rapide offertes par internet et les réseaux sociaux ; d’autre part, la crise de confiance qui dévalue la parole publique dans nos démocraties. « Une idée fausse, mais claire et précise, aura tou...
… bis repetita : nous voici de nouveau réunis pour examiner la proposition de loi visant à lutter contre la manipulation de l’information, cette fois en nouvelle lecture. C’est le cours normal de la procédure législative dans notre pays, et c’est une très bonne chose. Après l’échec de la commission mixte paritaire, ce débat devrait être l’occasion pour le Sénat d’étudier une proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, améliorée par plusieurs amendements. Ainsi, le texte soumis à notre examen cet après...
...e l’année. Le Gouvernement a jugé que satisfaire cette exigence lui imposait d’en passer par une proposition de loi, dans le cadre de la procédure accélérée, qui lui permettrait d’aller vite et, partant, d’échapper à une évaluation scrupuleuse des conséquences du texte. Il y a toujours péril à intervenir par la loi sur des matières touchant aux fondements de notre démocratie, comme la liberté de l’information, surtout de façon aussi expéditive. En l’espèce, les craintes nombreuses et légitimes exprimées par différents acteurs auraient dû amener le Gouvernement à plus de concertation, d’attention et de circonspection. Las, monsieur le ministre, insensible aux réserves et craintes exprimées, vous avez demandé au groupe majoritaire de l’Assemblée nationale, bien docile, de tenter de parachever une propo...
...l’analyse de ce texte. Aujourd’hui, force est de constater que rien n’a changé… ou si peu. La commission mixte paritaire n’a proposé aucune avancée significative. Permettez-moi, dans un premier temps, de citer un récent rapport établi par le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie et l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire, qui souligne notamment : « Les manipulations de l’information ne sont pas un phénomène nouveau. Leur actualité récente est liée à la combinaison de deux facteurs : d’une part, les capacités inédites de diffusion rapide et de viralité offertes par internet et les réseaux sociaux, couplées, d’autre part, à la crise de confiance que vivent nos démocraties et qui dévalue la parole publique, allant jusqu’à relativiser la notion même de vérité. » Comme précisé e...
...nt étudié au niveau européen, comme cela a été dit. La Commission européenne vient de publier un code de bonne conduite, qui donnera lieu à une évaluation en décembre prochain. La dimension transfrontalière de la désinformation en ligne est évidente et rend nécessaire cette approche. Notre groupe regrette donc la précipitation du Gouvernement, qui place notre pays dans une logique de contrôle de l’information, que nous refusons d’entériner. C’est pourquoi nous voterons les motions tendant à opposer la question préalable.
...ropagation des fausses informations dont aucune définition satisfaisante, en dépit des efforts de l’Assemblée nationale, n’a pu être trouvée. Plus probablement, face à l’impossibilité de trancher en moins de quarante-huit heures une question mettant en jeu la liberté d’expression, le juge ne prendra pas les mesures de restriction prévues, ce qui reviendra à décerner un brevet de respectabilité à l’information douteuse. À l’opposé, si le juge décide d’appliquer plus sévèrement le référé, il prendra le risque d’interférer dans le débat public en pleine campagne électorale, période durant laquelle la liberté d’expression est par tradition républicaine encore plus respectée. De manière générale, monsieur le ministre, les manipulations d’aujourd’hui sont complexes, multiformes, élaborées comme de vraies ...
...presque déjà dans « l’après ». Il faudrait que le Gouvernement, plus particulièrement, mais aussi et surtout l’ensemble des élus que nous sommes, apprécient à sa juste valeur le fait que, pour l’instant, le principal rempart à la fausse information est le travail professionnel d’une presse reconnue et pluraliste. C’était ainsi dans le passé, et c’est encore dans cette presse que l’on va chercher l’information aujourd’hui, malgré tous les dérèglements auxquels nous assistons, car on y trouve toujours des journalistes professionnels et une déontologie. C’est pourquoi, d’ailleurs, je suis favorable au renforcement de cet aspect de la presse. Nous sommes cependant à un moment où les citoyens ne croient plus dans cette presse, pas plus qu’ils ne croient dans les élus politiques. Ceux qui organisent le déb...
Mes chers collègues, la commission des lois vous propose de rejeter une nouvelle fois la proposition de loi organique relative à la manipulation de l’information en raison du caractère dangereux pour les libertés publiques de la nouvelle procédure de référé anti-fake news, de son caractère inabouti et potentiellement inefficace contre les vraies menaces. En juin 2018, monsieur le ministre, vous avez déclaré que si la question des fake news était un véritable enjeu démocratique – sur ce point, nous sommes tous d’accord –, ce n’était pas à tr...
...emblent pas complètement au nôtre, l’ont fait – et c’est bien cela qui est paradoxal – : je pense notamment à la Russie, mais pas seulement. Je ne les citerai pas ici, mais je puis vous dire que ce ne sont pas, en général, des exemples en matière de liberté d’expression. Ces États, parmi lesquels la Chine, sous couvert de lutte contre les fausses informations, se dotent d’un arsenal pour museler l’information. C’est bien là le danger de lois telles que celle que nous examinons : si des anti-démocrates étaient aujourd’hui au pouvoir en France, ils pourraient s’en servir à des fins bien différentes de celles que vous envisagez. Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons cette motion tendant à opposer la question préalable.
...suspicion sur les résultats. Tous les pays européens s’en préoccupent désormais, telle la Belgique qui, la semaine dernière, a décidé, néanmoins, de ne pas légiférer sur le sujet, alors que des élections générales s’y dérouleront en 2019. Nous devons avoir une conscience du terrain d’affrontement mondial qu’est devenu l’Internet. Les Européens n’ont pas l’entière maîtrise des réseaux mondiaux de l’information, et apparaissent comme singulièrement démunis face aux manipulations politiques menées sciemment par certaines puissances étrangères. C’est pourquoi une initiative destinée à s’attaquer à cette question ne pouvait que trouver un écho favorable au Sénat. Les deux commissions ont donc mené un travail très approfondi, précis et rigoureux. Nous avons rencontré plus de soixante interlocuteurs, notamm...
...ont aussi inefficaces. Même une procédure de référé n’aura qu’une efficacité incertaine face à des contenus dont la vitesse de propagation est fulgurante. Surtout, contrairement à un procès en diffamation, il n’y aura pas de renversement de la charge de la preuve. Ainsi, la personne agissant en référé et invoquant l’existence d’une fausse information devra rapporter la preuve du caractère faux de l’information en question. Or il n’est que très difficilement possible de rapporter la preuve contraire de certaines affirmations ou allégations, même infamantes : comment prouver, par exemple, que l’on n’a pas commis une fraude fiscale ou que l’on ne dispose pas d’un compte offshore ? Inefficaces, ces deux textes sont surtout dangereux, enfin. La philosophie même du titre Ier de la loi ordinaire me p...
..., à Charlie Hebdo ou à d’autres quotidiens ou hebdomadaires. Sans préjuger de l’utilisation qui pourrait en être faite, cette proposition de loi est porteuse en elle-même d’un risque de censure, qui menace la liberté d’expression, d’information et de la presse. En la matière, je crois qu’il faut faire preuve de prudence et ne pas insulter l’avenir. Si le débat relatif à la manipulation de l’information mérite vraiment d’être posé, les solutions à apporter sont constitutionnellement chancelantes, du point de vue du droit fondamental que constitue la liberté d’expression et de communication. Par ailleurs, ce texte paraît porter atteinte au principe constitutionnel de la liberté du commerce et de l’industrie, ainsi qu’à celui de la liberté d’entreprendre, et ce pour des motifs divers. Tout d’abo...
...r le président, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la présentation de ses vœux à la presse, le 3 janvier dernier, M. le Président de la République avait annoncé une évolution juridique du cadre visant à lutter contre la diffusion de fausses informations. Si la rumeur est souvent qualifiée de plus vieux média du monde, force est de reconnaître que l’ère des nouvelles technologies de l’information et de la communication lui offre un champ d’épanouissement sans équivalent auparavant. Avec l’avènement d’internet et des réseaux sociaux, le débat public a connu de profondes mutations. Sur le fond, l’immixtion croissante de fausses informations n’est pas sans conséquence sur la qualité de son contenu. Sur la forme, nous pourrions également faire le constat d’une éviction de plus en plus fréque...
...ouvelles, a toutefois permis de contenir le phénomène pendant plusieurs décennies, en dépit des évolutions du paysage médiatique. Aussi, pourquoi vouloir aujourd’hui de nouveau légiférer, au risque, nous dit-on, d’attenter à la sacro-sainte liberté de la presse ? Tout d’abord, parce qu’avec la mondialisation accélérée de nos sociétés et la révolution en cours dans le domaine des technologies de l’information, notre régime de l’information est désormais entré dans une tout autre dimension. La liberté et la qualité globale de l’information, que nous étions en mesure de garantir par le droit et par l’autorégulation, sont aujourd’hui mises à mal par de nouveaux acteurs refusant de respecter ces règles. Nous l’avons constaté à maintes reprises ces dernières années, la numérisation à marche forcée de nos ...