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...e, d’abord. Nous regrettons que, malgré une longue gestation, le Gouvernement ait, de nouveau, choisi une proposition de loi plutôt qu’un projet de loi. Cette voie prive le Parlement d’une étude d’impact qui, en l’espèce, était plus que nécessaire. Nous regrettons également que, malgré nos demandes, nous n’ayons pu prendre connaissance des observations de la Commission européenne que par voie de presse. Tout le monde en disposait, sauf les rapporteurs du Sénat ! Et je passe sur les réponses écrites envoyées moins d’une semaine avant le passage en commission, alors que le questionnaire avait été adressé près de deux mois auparavant… J’en viens au fond. Cette proposition de loi s’attaque indéniablement à une question légitime. Si le phénomène est encore peu documenté, chaque utilisateur des rése...
...e est cependant de constater, une nouvelle fois, que nous avons délibérément choisi de remettre une fraction essentielle de notre souveraineté entre les mains d’acteurs mondialisés réticents à toute forme de régulation, et même de discussion, avec des autorités démocratiquement élues, comme l’illustrent jusqu’à la caricature les développements sur les droits voisins des éditeurs et des agences de presse. Ces acteurs ne se contentent pas d’être puissants, riches, et souvent méprisants : ils ont conçu un écosystème qui encourage, diffuse, promeut la haine. J’en veux pour preuve les travaux de la sociologue turque Zeynep Tufekci, auxquels je vous renvoie : elle a montré que les algorithmes d’une plateforme comme YouTube, c’est-à-dire Google, nourris de milliards de données personnelles collectées ...
...essé un policier mobilisé pour le protéger ». Plus tard, il reconnaissait lui-même que le mot « attaqué » était inapproprié et le tribunal, dans une litote, a considéré que le message « appara[issait] exagéré en ce qu’il évoqu[ait] le terme d’attaque et de blessure ». Néanmoins, il a considéré que chaque électeur avait la possibilité de se faire une opinion plus juste en lisant les articles de la presse écrite et, surtout, qu’il n’est pas possible de déterminer si la promotion de cette information a été assurée par des outils automatisés. Enfin, la société Twitter France a fait valoir son défaut de qualité à agir en précisant que la société Twitter International Company, de droit irlandais, est seule responsable du traitement des données. Aujourd’hui, cette information fausse est toujours dispon...
...t. C’est non pas moi qui le dis, mais la Quadrature du Net, et ses membres connaissent le sujet : « Ainsi modifié, le texte n’a presque plus de substance, de sorte qu’il devient inutile de l’adopter. » Je peux très bien comprendre que l’on soit contre l’article qui constitue le fond de ce texte, mais j’ai du mal à concevoir que l’on soit pour et contre à la fois. Cet article a été adopté avec empressement à l’Assemblée nationale non pas seulement par LaREM et le Modem, mais par une très large majorité, seule l’extrême gauche ayant voté contre. Permettez-moi de citer Éric Ciotti pour le groupe Les Républicains : « Le texte en discussion est opportun, voire nécessaire. Il faut se protéger, réguler, bannir les propos de haine et de violence. Ce qui compte, c’est que nous obtenions des résultats. ...
...elles à partir de fermes à trolls. C’est là qu’est le scandale ; c’est là qu’est la censure. Il est urgent de défendre les victimes, pas de protéger les plateformes. Quatrième réflexion : certains objectent que ce texte risque de porter atteinte à la liberté d’expression. Comment peut-on soutenir cette position, alors que le mécanisme va exactement dans le même sens que celui qui s’applique à la presse depuis 1881 ? La loi précise que la presse n’a pas le droit de livrer de contenus haineux ou de diffamer. La presse se conforme depuis toujours à ces principes ; elle contrôle ses contenus et personne n’a jamais dit qu’on lui confiait le rôle du juge. Pourquoi y aurait-il deux poids deux mesures ? L’erreur de raisonnement consiste à distinguer les éditeurs, c’est-à-dire la presse, et les héberg...
...ustifier le rejet de toute demande de condamnation d’une plateforme par un juge français. Nous avons donc le devoir d’adapter notre droit aux évolutions du temps, mais nous devons absolument en préserver les principes fondamentaux. C’est l’objectif visé par mon groupe. Quelles sont nos préoccupations ? En premier lieu, les auteurs du texte n’ont pas jugé nécessaire de distinguer les organes de presse parmi les auteurs de contenus. Ce serait un oubli lourd de conséquences, si la future loi restait en l’état en ce domaine. Il est donc impératif que le Sénat défende la liberté de la presse en l’excluant du champ de la loi. Nous y reviendrons. En second lieu, un certain nombre de garde-fous doivent être mis en place. D’abord, il y a le fameux délai de vingt-quatre heures laissé à un opérateur p...
Par ailleurs, depuis le 1er juillet 2019, le New York Times a supprimé de sa publication les dessins de presse. Or, et vous ne l’avez pas oublié, je le sais, mes chers collègues, le 7 janvier 2015, c’est pour un dessin de presse que douze victimes sont tombées sous les balles de terroristes islamistes…
Bien entendu, mais il faut lire entre les lignes : le Conseil d’État a validé cette loi. Ici, on légifère, on débat et on essaye de construire du droit. Mais il faut toujours faire attention ! Cela dit, un amendement que nous défendrons vise à écarter de la future loi la possible atteinte à la liberté de la presse, qui est constitutive de la liberté d’expression dans notre pays. Je propose de dire d’emblée que la presse, au sens de la loi de 1881, la presse en ligne notamment, n’est pas concernée. Ne pas inscrire ce cadre dans la loi ferait prendre le risque de laisser cette liberté passer sous le joug des plateformes. Or, nous le savons, malgré toutes nos précautions, le risque de voir des algorithmes ne...
...nt, et je devine ce que l’on va me répondre : il va de soi que la loi de 1881 encadre l’ensemble du dispositif et que le présent texte ne peut pas la remettre en question. Mais cela va tellement de soi que je ne vois pas pourquoi on ne l’affirme pas d’emblée ! Cette question a déjà donné lieu à débats. Pour certains, les plateformes doivent pouvoir censurer elles-mêmes, en amont, des contenus de presse – les amendes et autres sanctions qu’elles peuvent encourir sous vingt-quatre heures vont dans ce sens –, alors même qu’elles ne jugent pas toujours du contexte. Mes chers collègues, nous pouvons tous nous retrouver pour voter cet amendement. Les seuls arguments que l’on peut m’opposer, c’est qu’il est satisfait. Or un grand nombre d’imprécisions subsistent, qui nourrissent beaucoup de doutes et...
Monsieur Assouline, vous préjugez l’avis que nous allons rendre, et je ne vais pas vous décevoir ! Votre amendement a pour objet d’exclure la presse du champ d’application de cette proposition de loi. Mais le régime de responsabilité des éditeurs en ligne n’est pas modifié : le présent texte concerne certains hébergeurs qui dépassent un seuil d’activité. En outre, sur le fond, la rédaction de votre amendement n’est pas véritablement opérante juridiquement : la loi pour la confiance dans l’économie numérique vise non pas la notion de « presse...
...endre en compte des éléments de preuve, des délais, qui sont plus resserrés en période électorale, etc. Si j’ai bien compris ce qu’a dit Mme la garde des sceaux, une fois que le présent texte sera entré en application, une plateforme privée pourrait décider de retirer des propos en l’espace de vingt-quatre heures, sans intervention du juge. En effet, ces dispositions engloberaient le champ de la presse. Or, en droit français de la presse, le retrait de parutions est rarissime, pour ne pas dire inexistant. Il suppose des atteintes graves à la vie privée. Nous avons tous en tête un certain nombre d’affaires qui ont pu se produire en la matière : elles n’ont que rarement abouti au retrait de parutions. Je le dis très solennellement : je ne m’attendais pas du tout à cette réponse de la part de Mm...
Qu’il s’agisse de la forme ou du fond, nous sommes face à un débat capital : les dispositions de cette proposition de loi s’appliquent-elles à la presse ? Pour nous, la réponse est évidemment non, et je vous encourage vivement à voter cet amendement !
...e l’on me réponde : « Votre amendement est satisfait. La loi de 1881 prime tout. » D’ailleurs, on m’a déjà donné cette réponse, et M. le rapporteur me l’apporte une nouvelle fois, tout en faisant preuve de prudence : nos débats ont une valeur juridique, ils peuvent être invoqués dans le cadre de recours. Aussi, M. le rapporteur se tourne vers Mme la garde des sceaux, qui, elle, répond : « Non. La presse entre dans ce champ. » Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, répond à M. le rapporteur l’inverse de ce qu’il voulait entendre : ce faisant, elle me donne raison ! On a pu me reprocher de couper les cheveux en quatre, mais j’avais bien raison de procéder ainsi ! Depuis le début, j’ai suivi les débats relatifs à cette réforme. Je sais ce qui se passe d’ores et déjà sur internet : certa...
...s par cette proposition de loi. Ce cadre est vieux de plus de cent ans. On n’y touche que d’une main tremblante, car il y va de notre capacité à user de notre liberté d’expression. Il aurait mieux valu se demander comment, sur la base des principes contenus dans la loi de 1881, adapter notre législation à la révolution numérique. Personne n’aurait prétendu rendre les nouvelles messageries de la presse parisienne responsables de ce qu’elles transportaient. Pourtant, c’est exactement ce que l’on est en train de faire ! La révolution numérique bouleverse la manière d’être citoyen ; elle recompose toute la pratique démocratique, mais les citoyens doivent être responsables. En conséquence, l’enjeu fondamental, c’est la responsabilité de ceux qui écrivent et de ceux qui publient. C’est cela, la lib...
Pour répondre à Mme de la Gontrie, j’ai moi-même pratiqué le droit de la presse de manière approfondie, et je le confirme : la loi de 1881 n’est pas sur le même plan que cette proposition de loi. Je ne sais pas comment ces deux textes vont se conjuguer, comment on déterminera quelle disposition appliquer. Qu’il s’agisse des poursuites ou des délais d’action, la loi de 1881 fixe des conditions extrêmement strictes. Je pense au retrait, à la conservation des contenus et, surt...
Madame la garde des sceaux, je le confirme, une clarification s’impose ! Si, comme vous nous le dites à présent, ce texte peut concerner la presse, notre travail législatif n’est plus du tout le même. On change complètement de registre et d’échelle ! Vous devez absolument nous donner des explications. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez, au Sénat, on sait bien lire ! §C’est précisément la valeur ajoutée du Sénat dans le bicaméralisme. Aussi, j’ai lu dans le détail la proposition de loi Avia. Il m’a semblé qu’elle ne concernait que le...
Madame la garde des sceaux, malgré ces précisions, vous ne répondez pas à la question de la presse en ligne. Or nous avons besoin de connaître votre position précise. L’amendement de David Assouline a justement pour objet de nous rassurer sur ce point, étant donné l’importance de la loi de 1881 pour notre vie démocratique !
Cette proposition de loi s’inscrit dans le droit fil de l’inflation législative et de la posture. À chaque type d’événement sa loi, même si les textes en vigueur permettent d’y répondre ! Dans le cas présent, il y a la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, qu’il suffisait d’adapter. Il y a surtout l’inoxydable loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Les associations militantes l’utilisent sans modération devant la justice, ce qui prouve l’efficacité du monde ancien pour protéger la liberté d’expression et réprimer ses abus. Lorsqu’on énumère et que, dès lors, on sélectionne les haines, la situation devient plus grave encore. On retrouve là le défaut de la loi du 21 janvier 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en ...
...ts, Marie-Pierre de la Gontrie propose, in fine, de confier cette responsabilité au juge. Il s’agit là d’un enjeu régalien : aussi, les leviers d’action doivent rester entre les mains de la justice, par le biais de la procédure contradictoire. J’insiste d’autant plus sur ces enjeux que le précédent débat y a fait écho. Ceux qui, malgré la loi française, refusent de payer la production de presse qu’ils utilisent pourraient obtenir le pouvoir de censurer des contenus de presse. Madame la garde des sceaux, c’est ce que vous avez dit.