Interventions sur "fautif"

14 interventions trouvées.

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les textes que nous examinons portent sur la question de l’irresponsabilité pénale et de la place du fait fautif de l’auteur. Ce sujet est extrêmement délicat, car il est aux confins du droit, de la médecine et de la santé. Nous avons beaucoup travaillé au Sénat sur le terrorisme, et sur cette tendance – on l’a vu lors du précédent débat – à « psychiatriser » les actes terroristes. C’est d’ailleurs à la suite des multiples attaques au couteau survenues en janvier 2020, et des déclarations d’irresponsabilit...

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

...xamen ; enfin, les victimes n’en sortent ni apaisées ni satisfaites. Ce genre de procès finit toujours par être celui de la justice. C’est la raison pour laquelle notre commission des lois a adopté un texte qui ne modifie pas le dispositif de l’article 122-1, mais qui, en quelque sorte, dans le continuum de la loi Dati de 2008, va ouvrir aux victimes le droit à un procès, dans les cas où le fait fautif de l’auteur a partiellement aboli son discernement. Selon une jurisprudence constante, c’est dans pareil cas que les difficultés surgissent. Il ne s’agit pas de juger les fous, mais de savoir qui et comment on juge de l’existence d’un trouble psychiatrique exonératoire de responsabilité. Il ne s’agit donc pas de juger la folie, mais de repenser, dans les rares cas où la responsabilité pénale est...

Photo de Guy BenarrocheGuy Benarroche :

...plexes mis en avant par l’actualité. Sans nier l’émotion de ces derniers mois suscitée l’affaire Sarah Halimi, je regrette que notre chambre n’ait su éviter certains écueils dans le travail accompli sur la proposition de loi que nous discutons aujourd’hui. Certes, le sujet et son traitement sont délicats. Le questionnement au cœur des débats est bien celui de la prise en compte, ou non, du fait fautif entraînant l’abolition du discernement, bien sûr sous-tendue par l’envie, le besoin même des victimes de voir l’affaire jugée publiquement. L’article 1er de la présente proposition de loi tente de répondre du mieux possible, mais, me semble-t-il, de manière incomplète, à cette problématique. Il introduit la recherche du fait fautif dans l’abolition du discernement, mais seulement au niveau du co...

Photo de Ludovic HayeLudovic Haye :

...e nos rapporteurs de ne pas conserver la révision de l’article 122-1 du code pénal initialement envisagée – dans une rédaction d’ailleurs différente de celle que proposait, un mois plus tôt, la mission d’information du Sénat – s’entend. Désormais, l’article 1er prévoit donc que, lorsque le juge d’instruction estime que l’abolition temporaire du discernement résulte au moins partiellement du fait fautif, il renvoie devant la juridiction de jugement, qui statuera sur l’irresponsabilité pénale et, le cas échéant, sur la culpabilité. Des interrogations ont pu être exprimées en commission sur la portée de cette réécriture. Il faut rappeler que la compétence des juges du fond pour statuer sur l’irresponsabilité de l’auteur des faits, notamment la compétence des cours d’assises et de leur jury, est ...

Photo de Nathalie DelattreNathalie Delattre :

...n. » De l’autre côté, la thèse des auteurs du pourvoi, la famille de Sarah Halimi, fait valoir que le seul fait de consommer des stupéfiants, même sans avoir la conscience de leurs effets potentiels sur le discernement, devrait exclure la prise en considération de l’abolition du discernement. À l’inverse, l’acte volontaire de consommation de stupéfiants devrait être constitutif d’un comportement fautif excluant l’irresponsabilité. Cette seconde solution est bien sûr compréhensible ; est-elle trop radicale pour qu’un juge la retienne ? Sans doute. Si l’on ne peut laisser à une juridiction la responsabilité d’un tel revirement, c’est au législateur de se pencher sur la question. Il revient donc au Parlement de déterminer comment exclure du champ d’application de l’irresponsabilité pénale les ca...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...e. Dans les deux cas, les avocats des parties civiles ont invoqué la prise antérieure de stupéfiants pour contester l’abolition du discernement au moment des faits et donc l’irresponsabilité pénale. En application de l’article 122-1 du code pénal, cette détermination relève de l’appréciation souveraine des juges. Toutefois, celle-ci est contestée sur un point précis : la prise en compte du fait fautif de l’auteur de l’acte, autrement dit la consommation de stupéfiants ou d’alcool antérieurement à la commission de l’infraction. En la matière, la jurisprudence est constante. Elle montre que ce fait fautif n’a jamais été reconnu, puisque l’intention de l’auteur s’apprécie au moment des faits. Mais il s’agit là d’un vieux sujet de controverses en doctrine et, surtout, dans l’opinion publique. C’...

Photo de Alain MarcAlain Marc :

...océdure du domaine de l’expertise judiciaire. Ces améliorations sont les bienvenues. Celle qui permet d’écarter tout conflit d’intérêts de la part de l’expert nous semble particulièrement pertinente. En outre, le texte de la commission contient une disposition visant à ce qu’un procès pénal se tienne lorsque l’abolition temporaire du discernement de la personne mise en examen résulte de son fait fautif. La responsabilité pénale serait déterminée lors de ce procès afin de faire droit au besoin de procès des victimes. Bien entendu, l’objectif est louable et nous tenons à ce que la place des victimes soit respectée. Toutefois, nous craignons que cette solution n’entraîne encore davantage de frustration : tenir un procès pour finalement déclarer l’auteur irresponsable ne sera pas plus facile pour ...

Photo de Dominique VérienDominique Vérien :

...tait : une maladie mentale a-t-elle été exacerbée par la drogue ou est-ce la drogue qui a conduit à la maladie mentale ? Il s’agit là d’un débat seulement médical. S’agissant de la justice, une seule chose à retenir : le meurtrier n’avait plus de discernement au moment des faits, celui-ci ayant été aboli par sa consommation volontaire de cannabis, c’est-à-dire de son propre fait, en l’occurrence fautif. Nous voici donc au point qui nous préoccupe. L’article 122-1 du code pénal, qui permet de déclarer un auteur pénalement irresponsable, devait-il s’appliquer à une personne dont le discernement a été altéré de son propre fait ? Que ce soit de son fait ou non, l’auteur était irresponsable au moment du meurtre et cela, nous ne pouvons rien y faire. Devrait-on le juger pour des faits qu’il n’a pas ...

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Madame Assassi, monsieur Sueur, vous ne serez pas étonnés que l’avis de la commission soit défavorable. Madame Assassi, j’ai bien entendu vos propos lors de la discussion générale, mais ce texte n’emporte pas de contournement de la procédure de l’article 122-1, qui va rester intégralement en l’état ; il est seulement prévu un renvoi devant les juridictions du fond en cas de fait fautif ayant causé l’abolition temporaire du discernement. Nous n’avons donc aucune volonté de contourner les dispositions de l’article 122-1, l’ensemble du bloc de l’instruction tel qu’il existe aujourd’hui, avec les expertises, sera maintenu, y compris le débat issu de la loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, dite loi « Dati »...

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Votre amendement est totalement contraire à l’esprit du texte que nous avons voté en commission. Précisément, l’idée n’est pas de transférer toutes les personnes irresponsables devant la juridiction de jugement, mais seulement celles dont un fait fautif a causé l’abolition temporaire. Si l’on enlève « temporaire » du dispositif, celui-ci devient totalement déséquilibré. Dès lors, autant supprimer l’article 122-1 ! La commission a fort bien fait d’émettre un avis défavorable sur votre amendement, dont l’adoption déséquilibrerait le texte. Je vous propose donc de le retirer.

Photo de Jacqueline Eustache-BrinioJacqueline Eustache-Brinio :

Cet article concerne la notion de « fait fautif », laquelle nous semble complexe à circonscrire et susceptible d’ouvrir la voie à de multiples interprétations juridiques non dépourvues de conséquences. Cette formulation pourrait ainsi être entendue comme renvoyant nécessairement à une infraction pénale ; or la loi pénale étant d’interprétation stricte, cela risquerait de poser quelques difficultés. Une consommation excessive d’alcool à son d...

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

...procès, qui est un moment important, pour la victime, pour sa famille ou pour ses proches. À ce titre, la ligne de crête dégagée par la commission est la bonne, qui consiste à cibler les situations dans lesquelles une sorte de choix volontaire a présidé, chez celui qui a commis le délit ou le crime, à l’abolition de son discernement. Cet amendement vise à retirer du texte la mention d’un « fait fautif ». Que cherchons-nous ? Nous voulons savoir si le fait générateur est la volonté de celui qui, par la prise immodérée d’alcool ou de stupéfiants, a aboli son discernement. Peu importe la cause, que le fait soit fautif ou non, que sa volonté soit liée ou non à une infraction. Or « fait fautif » renvoie directement à une infraction pénale ; c’est ce que nous ne voulons pas. Les exemples avancés pa...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...tupéfiants et d’alcool » et qu’elle a « en conséquence estimé nécessaire d’agir sur les facteurs déterminants de l’irresponsabilité, en faisant de l’état d’ivresse alcoolique ou sous l’emprise de stupéfiants une circonstance aggravante pour l’ensemble des crimes et délits ». Légiférer en ce sens, ce serait oublier que la prise de drogue ou d’alcool ne constitue pas nécessairement un comportement fautif, et qu’elle peut être non pas la cause, mais la conséquence de l’abolition du discernement. Une mauvaise observance des soins, un arrêt du traitement, une consommation excessive d’alcool ou de stupéfiants peuvent faire partie de la maladie plutôt qu’en être la cause. Ces situations sont d’ailleurs très fréquentes dans le cas des psychoses où les traitements administrés peuvent avoir des effets i...

Photo de Guy BenarrocheGuy Benarroche :

...placé en hospitalisation sous contrainte et des mesures de sûreté, pouvant aller jusqu’à 20 ans, peuvent être prononcées à son égard. Ces mesures, en plus de soigner l’individu, ont pour objet d’évaluer sa dangerosité et d’empêcher la récidive. Je crains qu’en l’état cette proposition de loi ne puisse améliorer la situation, et l’amendement retenu à l’article 1er pour supprimer le qualificatif « fautif » n’est pas de nature à améliorer son équilibre. Au contraire, ce texte risque d’introduire un déséquilibre. Aujourd’hui, notre système judiciaire fonctionne. Certains juges, s’appuyant sur des expertises, ont déjà retenu la responsabilité de personnes, qui, du fait de l’ingestion d’alcool ou de stupéfiants, plaidaient l’irresponsabilité. C’est pourquoi, soucieux de préserver l’équilibre de l’ar...