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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai à cœur de vous présenter cette proposition de loi, cosignée par Fabien Gay, Cathy Apourceau-Poly et l’ensemble des membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. Ce texte, fruit de plus de deux années de rencontres, de travail et d’échanges sur le terrain, vise à renforcer le statut des travailleurs des plateformes numériques, ces « tâcherons du clic », comme je les appelle, soumis au management algorithmique. Ces travailleurs se sont d’ailleurs trouvés en première ligne durant la crise épidémique du Covid-19, bien malgré eux, en plein confinement, alors que leur activité n’était pas toujours essentielle, parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix. Ce sont les chauffeurs de V...
...rôlés par les algorithmes. Il ne s’agit donc pas de travail indépendant, puisque la dépendance économique et la subordination sont à présent attestées. Les décisions de justice l’ont d’ailleurs démontré : prenons-en pour exemple le dernier arrêt rendu à ce propos par la Cour de cassation, le 4 mars 2020, concernant Uber. La délibération a été très claire : il n’y a aujourd’hui aucun doute sur le statut de ces travailleurs fictivement indépendants, qui sont la proie de pratiques de salariat déguisé. Au travers de ce texte, nous proposons de prendre acte de la décision des juges et d’en accélérer l’application, les procédures pouvant être très longues. Quelles seraient les conséquences de l’adoption de notre proposition de loi ? Elle éviterait aux travailleurs de devoir choisir entre renoncer e...
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de Pascal Savoldelli, que j’ai cosignée avec les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, vise à créer un statut protecteur de certains travailleurs, qui, depuis l’apparition des plateformes numériques, restent des oubliés du droit du travail et de la protection sociale. En effet, ces travailleurs, que l’on qualifie généralement, qu’ils soient livreurs à vélo ou chauffeurs de VTC, de « travailleurs de plateformes », se voient nier la qualification de travailleur salarié au prétexte que leurs donneurs d’ord...
..., au-delà de la simple fonction d’interface, certaines plateformes organisent le temps de travail, la rémunération et les conditions de mises en relation, hiérarchisant les contenus selon les utilisateurs. Le niveau d’intervention de ces plateformes et l’importance des revenus tirés de leur activité justifient l’attention que nous leur portons. Les travailleurs dont nous parlons ne sont pas sans statut : travailleurs indépendants, ils bénéficient du régime de protection sociale propre à cette catégorie. C’est pourquoi je souscris à l’avis de l’inspection générale des affaires sociales : plutôt que de créer un statut ad hoc, il convient d’agir sur le terrain de la protection sociale. La réflexion que nous menons actuellement devrait bénéficier à l’ensemble des indépendants, dont le régim...
...uridiques. Au demeurant, le salariat n’apparaît pas comme une revendication majoritairement partagée par les travailleurs concernés. Nous touchons là à un modèle de société décloisonnée réclamé par les nouvelles générations, qui y trouvent plus d’indépendance et de liberté. À charge pour nous d’étudier les moyens de protection sociale associés. En particulier, nous devons dépasser la question du statut et universaliser certains droits sociaux. Mes collègues rapporteurs de la mission d’information et moi-même avons distingué quatre types de plateformes. Premièrement, des plateformes de services organisés fournissent des prestations hors ligne standardisées, délivrées par des professionnels, notamment dans les secteurs de la conduite – Uber, Kapten, Bolt – et de la livraison de marchandises – D...
...ualification en contrat de travail. Les travailleurs des plateformes exercent un travail indépendant, défini en opposition au salariat classique, mais une partie de ces indépendants, dont les profils sont très divers, ont pour point commun d’être dans la dépendance économique vis-à-vis des plateformes numériques. Cette situation m’inspire deux constats essentiels. D’abord, le problème n’est pas statutaire. Les travailleurs des plateformes sont visibles partout, sauf dans les statistiques : il n’existe guère de recensement exhaustif, mais les chiffres des travaux menés vont de 100 000 à 200 000 personnes. Certains travailleurs indépendants des plateformes tirent de cette activité des revenus d’appoint, ayant parallèlement une activité principale salariée ou suivant des études ; d’autres sont de...
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question du statut des travailleurs de plateformes numériques est malheureusement destinée à nous occuper longtemps ; elle est symptomatique d’une forme de capitulation à tous les niveaux, y compris à l’échelon politique. Une réalité sociale et économique se déploie : elle correspond à un modèle alternatif à celui qui fonde notre pacte social. Ce nouveau modèle est très « ancien monde », puisqu’il obéit à des logi...
...rs… S’agissant des rapports entre les travailleurs et les plateformes, le droit a aussi son mot à dire. Deux décisions de la chambre sociale de la Cour de cassation, du 28 décembre 2018 et du 4 mars 2020, ont requalifié en contrat de travail le lien entre une plateforme numérique et un travailleur indépendant. Dans la décision de cette année, la Cour de cassation a même qualifié de « fictif » le statut d’indépendant du plaignant, soulevant de nombreuses interrogations, y compris de votre part, madame la ministre : dès le lendemain, vous avez annoncé la création d’une mission conjointe avec le ministre de l’économie et des finances sur les travailleurs des plateformes numériques, leurs droits et leurs protections. Certains manques ont servi de base à la chambre sociale de la Cour de cassation d...
...nouveauté met en question les catégories juridiques existantes et implique une réflexion approfondie. Cet encadrement des relations est actuellement renforcé, mais nous devons garder à l’esprit l’objectif de concilier l’indépendance de ces travailleurs, le modèle économique des plateformes et la protection des droits sociaux. Si elle souligne certains problèmes, la proposition de loi relative au statut des travailleurs des plateformes numériques, coécrite par les sénateurs Pascal Savoldelli et Fabien Gay, n’en résout pas l’ensemble, tant s’en faut. Ainsi, elle prévoit un statut pour ces travailleurs à mi-chemin entre le salariat et le régime indépendant et introduit de nouveaux droits sociaux. Ce statut intermédiaire n’est pas souhaitable, car il entraînerait des effets contraires aux objectifs...
...nce et par celle de leurs parents, maltraités par un management avilissant, et, en conséquence, à la recherche d’une grande autonomie de travail et d’une sortie de la précarité. Au départ, ils ont été séduits, parfois, par la liberté vantée par les plateformes. Mais où est la liberté lorsqu’on travaille sept jours sur sept et dix heures par jour pour moins que le SMIC horaire ? En détournant le statut d’autoentrepreneur en salariat déguisé pour échapper à leurs obligations en termes de salaire et de protection sociale, Uber, Deliveroo et toutes ces grandes plateformes ne proposent en réalité qu’un horizon : la liberté d’exploiter. Les maîtres de forges ont été remplacés par un iPhone avec une application et des algorithmes, mais la réalité est la même : ce sont les nouveaux forçats du travail....
C’est pourquoi nous avons construit cette proposition de loi autour de l’assimilation de ces travailleurs au statut de salarié tout en leur ménageant une large autonomie. Contrairement à ce que vous avez dit, madame la ministre, un sondage réalisé par le CLAP montre que 66 % des livreuses et livreurs soutiennent la proposition de loi que Pascal Savoldelli, l’ensemble des membres du groupe CRCE et moi-même défendons. Le droit social donc, ni plus ni moins, mais d’une part, en prévoyant des adaptations pour que...
... dernier. Nous attendons aussi avec impatience, madame la ministre, le résultat de la mission Frouin. Comme l’ont dit Michel Forissier et Catherine Fournier, nous nous tenons à la disposition de M. Frouin, car nous avons des choses à dire en la matière. Cette mission, dont les travaux portaient d’abord sur la représentation des travailleurs des plateformes, a ensuite été étendue à la question du statut des travailleurs. Autant de textes qui ont le mérite d’aborder un sujet effectif : l’histoire des plateformes. Si l’importance de ce sujet est sans commune mesure avec sa visibilité médiatique, puisqu’il ne concerne que 100 000 à 200 000 travailleurs, nous devons tenir compte de ces personnes. Chaque texte contribuera à faire bouger les lignes. Cette proposition de loi est une initiative intére...
...ons pas obtenu de réponse au cours des auditions et qui mettent à mal l’efficience du dispositif proposé. Ce texte, vous l’avez dit, madame la rapporteure, est une proposition de loi d’appel. Il va nous permettre d’aborder un sujet d’importance. Mes collègues Michel Forissier, Catherine Fournier et moi-même préconisons pour notre part de sortir du principe de requalification et de la question du statut pour universaliser certains droits sociaux qui sont d’importance. Cette proposition de loi ne se situant pas dans cette lignée, nous ne pourrons pas répondre favorablement à votre appel, mais le débat est toujours important. S’il convient de lutter contre les précarités, il ne faut pas brider, notamment en cette période, les leviers accélérateurs de l’activité que sont certaines plateformes.
...s différenciait de cette proposition de nos camarades ; je n’y reviens pas. Lors la discussion, en janvier dernier, de la proposition de loi d’appel, nous avons défendu l’idée, alors trop mal connue, de la coopérative d’activités et d’emploi (CAE). Je vous renvoie sur ce point à l’excellent rapport de Jérôme Giusti et Thomas Thévenoud pour la Fondation Jean-Jaurès. La CAE offre la possibilité du statut original d’entrepreneur salarié associé. Celui-ci a été inventé en 2014 pour répondre aux besoins de l’économie collaborative et des plateformes, pour contrer les excès de l’autoentrepreneuriat et pour offrir de l’autonomie et des droits sociaux aux salariés. En regroupant les entrepreneurs salariés, la CAE répond au besoin de représentation, et cela, comme l’a rappelé Monique Lubin, sans nécessi...
...ndéniablement importants sur le monde du travail. La dématérialisation des entreprises de services et l’indépendance accrue des travailleurs se heurtent aux formes de travail traditionnel. Ces deux aspects soulèvent la question de l’évolution de la protection des droits des travailleurs au sein de ce nouveau modèle. Derrière le terme vague « ubérisation » se profile une nouvelle configuration du statut de salarié. Cette forme inédite d’emploi questionne certains acquis de notre droit du travail. La liberté octroyée aux travailleurs des plateformes du numérique est parfois un moyen de contourner les structures de protection salariale. En effet, le travailleur, bien que déclaré autoentrepreneur, reste au service d’une structure numérisée. S’il ne faut pas extrapoler la place des travailleurs num...
...200 000 travailleurs des plateformes numériques en disant qu’ils représentent peu de monde, cela ne signifie pas pour autant que nous les dénigrons, que nous ne les respectons pas, que nous ne nous en occupons pas, que nous ne les considérons pas. Absolument pas ! Simplement, nous ne pouvons pas réduire ces travailleurs à un contexte aussi étroit, alors que nous sommes en train de réfléchir à un statut global. Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas régler le problème. En tout cas, ce n’est pas mon propos, et je tiens vraiment à le préciser. Au contraire, dans notre rapport, mes collègues Frédérique Puissat, Michel Forissier et moi-même nous sommes attachés à réfléchir aux conditions de travail de ces personnes.
Mon grand-père, d’origine italienne, travaillait à la tâche. Voilà comment cela se passait : l’accord entre l’ouvrier et l’exploitant se faisait d’homme à homme. Il n’y avait pas de contrat ni de problème de statut mais, au moins, mon grand-père pouvait discuter, avec son dictionnaire français-italien, du coût de vingt mètres de carrelage, de la réalisation de tel pavillon ou de telle maison en pierre meulière. Il existait encore des relations humaines ! Les tâcherons pouvaient discuter la valeur de leur travail. Au niveau des plateformes, la situation est bien pire, puisque les travailleurs ne peuvent même...
...rdre pour n’importe quel motif : juridiquement, le donneur d’ordre doit en effet être informé par écrit que sa chaîne de sous-traitance n’est pas vertueuse. Le dispositif, appliqué au champ général de l’économie, me semble constituer un progrès intéressant par rapport, notamment, aux dégâts de l’autoentreprenariat. Madame Fournier, je salue le fait que vous l’ayez dénoncé dans votre rapport : ce statut crée des poches sans modèle économique et conduit à des situations inacceptables.
...ité et, d’autre part, à leur garantir une rémunération décente. Les utilisateurs de plateformes à titre professionnel seraient solidairement responsables de ce devoir de vigilance. Cet amendement va dans le sens d’une meilleure protection des travailleurs des plateformes, mais n’est pas compatible avec ma position, dans la mesure où il a pour objet de maintenir les travailleurs concernés dans un statut d’indépendance qui ne peut être que trompeur. Au contraire, le groupe auquel j’appartiens souhaite étendre aux travailleurs concernés les protections du salariat, notamment une rémunération au moins égale au SMIC, alors qu’il n’est fait mention dans le dispositif de cet amendement que d’un salaire décent. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. À titre personnel, j’y suis évid...
... serait sage de le retirer, et je vous livre un argument plaidant en ce sens : nous, parlementaires, devons être attentifs à la question de la sécurité des travailleurs. C’est bien de cela qu’il s’agit, et non pas du devoir de vigilance : deux exemples récents l’attestent, avec la condamnation d’Amazon et de Renault, non pas pour avoir manqué à leur devoir de vigilance, mais par méconnaissance du statut protecteur – nous avons réussi à obtenir ce dernier – qui s’applique aux travailleurs de ces deux sociétés. Et il est bien qu’ils aient fait valoir leurs droits.