Monsieur le président, je vous remercie d'avoir accepté cet échange que j'ai sollicité en vue d'une restitution sur « l'état des volontés » des territoires d'outre-mer en ce qui concerne l'organisation et les modalités de leur libre administration locale.
Le président du Sénat, Gérard Larcher, a en effet initié un groupe de travail sur la décentralisation avec l'ambition - selon ses termes - de « repenser en profondeur l'organisation des pouvoirs locaux » et de formuler des propositions en ce sens. Il m'a fait l'honneur de me charger du volet outre-mer en ma qualité de président de la délégation sénatoriale aux outre-mer. C'est dans cette optique que j'ai souhaité entendre chacun des exécutifs des grandes assemblées territoriales en vue d'une restitution des orientations reflétant aussi fidèlement que possible la diversité des visions institutionnelles ultramarines.
J'espère, sans trahir cette hétérogénéité, que des grands axes se dégageront de ces échanges constituant des articulations autour desquels pourront se construire chaque projet et concrétiser chaque volonté locale. À mes yeux, c'est dans les statuts de ses collectivités du Pacifique que la République trouve une large part de sa créativité et de sa souplesse institutionnelle. C'est pourquoi je suis aussi heureux d'ouvrir ce cycle d'auditions par les collectivités du Pacifique. J'ai souhaité associer mon collègue Robert Laufoaulu à notre échange de ce jour. Je le sais très attentif de près ou de loin à tout ce qui touche à Wallis-et-Futuna dont il est l'indéfectible porte-parole avec la mesure et la fermeté qui caractérisent sa grande personnalité.
Avant d'entamer notre échange, permettez-moi une parenthèse pratique. Au courrier que je vous ai adressé était jointe la trame de questions adressées à l'ensemble des exécutifs et je vous propose qu'elle nous serve de fil conducteur et qu'elle guide nos échanges dans l'esprit général dans lequel elle s'inscrit, bien conscient que certaines questions ne s'appliquent pas strictement à la situation de Wallis-et-Futuna. Ces grands sujets qui intéresseront l'exécutif national sont les suivants : la décentralisation, la différenciation territoriale et la déconcentration des services de l'État dans nos territoires. Nous évoquerons également la forme que pourrait prendre une possible réforme de la Constitution.
Je sais que les îles Wallis-et-Futuna dispose d'un statut particulier, et je vous propose de nous rappeler la répartition des compétences entre l'État et votre collectivité. Le statut actuel est-il bien adapté à votre territoire ? Souhaiteriez-vous réviser la répartition de certaines compétences ? Enfin, la démocratie locale, c'est-à-dire la consultation de la population de Wallis-et-Futuna, est-elle suffisante ou souhaiteriez-vous la développer davantage dans certains secteurs ?
Monsieur le président, je vous cède la parole.
M. Atoloto Kolokilagi, président de l'assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna
Je vous remercie, Monsieur le président. Je suis accompagné de MM. Atelea Vaitootai, président de la commission des affaires sociales et de la fonction publique et de la commission de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche, et Napole Polutele, ancien député, président de la commission du développement, des affaires économiques et du tourisme et de la commission de l'enseignement, de Mme Nivaleta Iloai, conseillère territoriale et ancienne présidente de l'assemblée, et de deux collaboratrices, Mmes Sandrine Ilalio et Olga Gaveau.
En juillet 2017, la question de la réforme institutionnelle a été lancée par le chef de l'État, avec une première étape constituée par le projet de loi 3D (décentralisation, différenciation, déconcentration), comportant une modification de la Constitution et qui a été présentée en mai 2018 en conseil des ministres. Ses objectifs sont de poursuivre une décentralisation adaptée aux besoins de chaque territoire. Les nouvelles relations entre l'État et les collectivités territoriales devront s'appuyer sur un principe fort de différenciation, c'est-à-dire qu'à des situations différentes doivent être apportées des réponses différentes. Ce projet de loi doit permettre l'autorisation de nouvelles expérimentations sur le fondement des articles 37-1 et 72 de la Constitution, et formuler des propositions en matière de dévolution du pouvoir réglementaire aux collectivités territoriales. Wallis-et-Futuna est la seule collectivité d'outre-mer qui n'ait pas encore expérimenté la décentralisation. Le mode de gestion du territoire s'apparente à l'administration directe des institutions locales par l'État lui-même. Nous avons un préfet, qui exerce les fonctions de représentant de l'État mais est aussi l'exécutif du territoire. L'urgence pour nous est le transfert de l'exécutif à une entité locale, selon des modalités à convenir entre les élus de l'assemblée territoriale et les trois rois.
J'ai en effet été surpris par le fait que, conformément à votre statut, le préfet ait le pouvoir exécutif et définisse le budget.
Monsieur le président, Monsieur le sénateur, je vous adresse mes salutations. Cette réforme constitutionnelle représente une opportunité supplémentaire de travailler sur l'évolution institutionnelle de notre territoire, qui est le seul qui est resté en l'état depuis 1961. La vague de décentralisation des années 1980 ne nous a en effet pas touchés. Nous sommes restés sur le principe d'une administration directe par l'État, avec des modalités de collaboration précisée dans le statut de 1961 et une répartition des différentes compétences, notamment pour notre assemblée territoriale, définie par l'article 40 du décret n°57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l'assemblée territoriale, du conseil territorial et de l'administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna.
Cette coopération entre l'État et le territoire arrive « à l'essoufflement ». Nous rencontrons depuis quelques années un certain nombre de difficultés, qui ne cessent de se répéter, à des degrés plus ou moins importants. Des décisions sont ainsi votées par délibération de l'assemblée territoriale, mais ne prennent pas effet car le préfet ne les met pas en oeuvre sous forme d'arrêtés. Si ceux-ci ne sont pas publiés, une crise institutionnelle pourrait se poser, car les élus de la collectivité considéreraient qu'ils ne sont pas entendus par le préfet, détenteur du pouvoir exécutif. Il y a ici matière à réflexion. Placer le statut de Wallis-et-Futuna sous l'article 74 de la Constitution semble discutable, puisque tous les territoires passés sous ce statut des collectivités d'outre-mer exercent la libre administration de leur collectivité. Wallis-et-Futuna est quant à lui toujours régi par l'ancien système des années 1960-70. La présente réflexion constitue donc une opportunité d'impulser un changement de fond. Nous travaillons actuellement avec le président de l'assemblée territoriale, les élus et les chefferies sur la possibilité d'une réforme visant à transférer l'exécutif du territoire aux élus locaux ou à une institution au sein de laquelle ils siègeraient. Ce travail a été présenté la semaine dernière aux autorités du territoire. Nous avons bon espoir qu'il puisse aboutir rapidement. Il fera ensuite l'objet de présentation aux différentes institutions, y compris aux chefferies.
Un consensus me semble se dessiner autour de cette demande de transfert de l'exécutif aux instances territoriales.
Le président de la Nouvelle-Calédonie nous expliquait que pendant toute la période de crise sanitaire, l'ensemble des décisions a été pris conjointement avec le Haut-commissaire. Que pensez-vous de cette idée ? Par ailleurs, dans le cadre de ce nouvel exécutif, comment associerez-vous les trois royaumes ?
Si un consensus s'est établi entre le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et le Haut-commissariat, il faut cependant noter qu'une réunion de différents collèges a également été organisée à Nouméa. S'agissant de Wallis, nous avons formé un comité de suivi composé des autorités coutumières, de l'assemblée, du préfet et de la mission catholique.
Dans le projet que vous proposez, quelle serait la composition du nouvel exécutif et ses relations avec les trois rois ?
Nous sommes en phase de travaux, jusqu'à la fin de l'année, pour définir ces éléments. Ces travaux sur le transfert de l'exécutif ont été initiés au début de l'année. Un point sera effectué au mois d'août ou de septembre.
Avez-vous déjà une idée des compétences que vous souhaiteriez exercer à la place de l'État ?
Nous vous transmettrons les réponses au questionnaire que vous nous avez envoyé.
Vous nous demandiez comment nous allions travailler avec les trois royaumes. Le groupe de travail propose d'associer aux décisions à prendre tous les acteurs : préfet, État, assemblée territoriale et trois royaumes.
Concernant d'abord la décentralisation, à la question « la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales vous paraît-elle adaptée à la situation de votre territoire ? », notre réponse est négative. Le représentant de l'État est l'exécutif du territoire. Wallis et Futuna sont encore soumis au régime de l'administration directe par l'État.
La deuxième question concernait les compétences qui seraient mieux exercées par la collectivité ou à l'inverse par l'État. Le pouvoir exécutif doit revenir à une entité locale. La répartition des autres compétences par la loi statutaire paraît satisfaisante, en raison du manque de capacités locales, tant en ressources humaines que financières, par exemple en matière de santé, d'enseignement, de circonscriptions territoriales, etc. S'il fallait toutefois transférer ces compétences à l'exécutif local, l'État devrait accompagner ce transfert.
Le dispositif d'habilitation actuel ne permet pas une adaptation efficace des lois et des règlements. Le préfet est habilité à engager tous les ministères de la République. L'assemblée territoriale n'est consultée qu'en cas de projet de loi ou de décret empiétant sur son domaine de compétence.
Nous sommes favorables au renforcement de la démocratie locale. Ceci nécessite le vote d'une loi organique.
Les deux îles de Wallis et de Futuna sont relativement éloignées. Saint-Barthélemy avait souhaité évoluer, vis-à-vis de la Guadeloupe, pour obtenir sa propre relation directe avec l'État. Dans votre cas, parvenez-vous à une entente sur la répartition physique de l'exécutif entre les deux îles ?
Nous ne sommes pas concernés par la décentralisation. Nous disposons de nos spécificités, nos coutumes et notre religion. Nous vivons ainsi depuis des siècles. Futuna a deux rois, et Wallis un seul. Il s'agit de la constitution locale traditionnelle. Cette entente entre nos deux îles a vocation à perdurer.
Votre principale préoccupation concerne la relation entre l'État et votre territoire. Lorsque nous votons des lois à Paris, nous rencontrons beaucoup de difficultés à faire entendre les voix des outre-mer, et les lois ne sont pas toujours adaptées à nos territoires. Le Gouvernement a permis des solutions dérogatoires en nous permettant d'expérimenter. Que pensez-vous de l'habilitation et de la différenciation territoriale ?
Les spécificités de nos territoires ne sont effectivement pas considérées, et nous sommes moins avantagés que d'autres, Si je prends l'exemple du dispositif d'aide de continuité territoriale, je constate qu'un taux unique s'applique sur les billets d'avion pour tous les outre-mer. Mais une réduction de 30 % ne représente pas la même charge pour la collectivité si le billet est à 400 euros ou à 3 000 euros.
Concernant l'applicabilité et l'adaptabilité des lois votées au niveau national, le dispositif actuel qui permet la consultation de nos territoires et la prise en compte de la spécialité législative qui les protège des autres dispositions votées en métropole me semble positif. Cette spécialité législative me semble constituer, en soi, une protection.
Je partage ce constat, à une nuance près pour mon île : nous sommes toujours consultés dans l'urgence, et sur la question de savoir si nous sommes favorables ou non sans nous donner, au stade de la consultation, la possibilité d'apporter des modifications. Cela conduit le conseil exécutif à donner son accord avec la loi pour autant qu'elle n'empiète pas sur les compétences qui ont été précédemment transférées. Il appartient ensuite aux parlementaires de se battre pour obtenir l'adaptation de ces lois. La continuité territoriale s'opère par ailleurs entre la France et un territoire, à condition qu'il n'y ait pas d'escale. Or nos deux territoires en supposent. La continuité territoriale telle qu'elle est définie par la loi est donc bancale.
Il se pose la question de savoir à quel moment la différenciation doit être prise en compte dans le processus législatif. Il nous est proposé, par le dernier article de la loi, de laisser le Gouvernement légiférer par ordonnance pour appliquer la loi à nos territoires. Cette disposition peut être parfois gênante.
Concernant la différenciation, la première question était la suivante : « Quel est le projet de différenciation territoriale de votre collectivité et quel enjeu représente-t-il pour votre territoire ? » La prise en compte de l'organisation sociale et coutumière est fondamentale, en ce qu'elle est le socle de la culture des Wallisiens et Futuniens.
La deuxième question était la suivante : « Les transferts de compétences envisagés devront-ils être assortis de la compétence normative pour la mise en oeuvre de ce projet ? Dans l'affirmative, quelles matières vous semblent-elles essentielles ? » Le transfert de la compétence normative est essentiel. Il permet en effet de responsabiliser les institutions locales, mais aussi une adaptation rapide, au gré des nécessités du développement local et des spécificités de Wallis et Futuna.
S'agissant d'une possible réorganisation des institutions locales, celle-ci est en effet incontournable.
En ce qui concerne l'évolution du cadre constitutionnel, celle-ci n'est pas nécessaire pour l'heure.
Je comprends parfaitement la nécessité de la prise en compte des coutumes et traditions ainsi que de votre organisation locale.
Concernant l'État, de manière générale, depuis 1982 et les lois de décentralisation, l'État a confié des compétences aux régions, aux départements et à son représentant, le préfet. Or il a également recréé dans nos territoires des agences régionales et départementales ainsi que des directions régionales et départementales, dans tous les domaines (environnement, urbanisme, santé, etc.). Cette multiplication des services de l'État a porté atteinte à l'efficacité de la représentation de l'État et de notre rôle d'élu. Le guichet unique constitue-t-il une bonne solution ? Considérez-vous au contraire qu'il soit nécessaire de développer dans votre territoire cette multiplicité d'agences et de direction ?
Nous n'avons qu'un seul interlocuteur représentant l'État, le préfet. Ceci me semble plus clair. Le préfet exerce également le contrôle d'égalité des lois. Nous ne rencontrons donc pas cette difficulté liée à la multiplicité des interlocuteurs et des services. Nous explorons néanmoins toutes les pistes dans le cadre de la réflexion que nous menons eu égard à l'exécutif.
Le maintien d'un guichet unique de l'État vous semble donc être la bonne solution.
Je souhaiterais revenir sur les spécificités du territoire. Le statut de 1961 n'était pas un statut de territoire d'outre-mer. Wallis-et-Futuna n'était pas entré dans le prêt-à-porter des territoires d'outre-mer. Dès cette date, la logique de nos structures traditionnelles, qui présidera ensuite, en 2003, la réforme des collectivités d'outre-mer, a été reconnue. Le président Jacques Chirac avait alors dit qu'il voulait du sur-mesure pour les territoires d'outre-mer. Telle est la difficulté qui se pose aujourd'hui dans une réflexion d'évolution de notre statut. Celle-ci n'est pas nouvelle ; depuis 1998, nous avons mené au moins trois tentatives de réforme du statut du territoire. Nous avons toujours été bloqués par les réticences des chefferies, qui se sentent menacées et craignent de se voir retirer des compétences et des reconnaissances qui leur ont été accordées en 1961. Les travaux qui iront dans le sens d'une réforme du statut n'en tenant pas compte sont donc voués à l'échec.
Aujourd'hui, le point relatif à l'exécutif me semble toutefois faire l'objet d'un accord. Du fait de notre autonomie, l'exécutif devra être confié à une instance indépendante de celle qui légifère, à savoir l'assemblée territoriale. Lorsque nous aurons séparé la représentation de l'État du chef du territoire, la situation se clarifiera certainement, à condition néanmoins de bien distinguer l'organe législatif de l'exécutif. Le rôle de l'État sera de garantir la légalité des décisions de l'instance délibérative. S'agissant de la place des chefferies, elles ont été intégrées dans le conseil du gouvernement en 1961, tandis que les circonscriptions jouent le rôle de communes. Il me semble nécessaire d'aller plus loin encore dans cette réflexion. La question de la fusion des articles 73 et 74 se pose dans ce cadre. Il est nécessaire de prendre davantage en compte les spécificités des territoires, en mettant en place une structure et des statuts correspondant à leurs réalités.
Je partage ces propos. J'en déduis qu'il est nécessaire de rassurer les chefferies quant au fait qu'elles ne perdront pas ce qui caractérise le territoire. Je comprends aussi que la priorité est la relation avec l'État et le transfert de l'exécutif.
L'idée d'un article unique pour l'ensemble des outre-mer me semble être une bonne solution, si celui-ci respecte les particularités de chaque territoire. Il s'agirait alors d'un véritable statut « à la carte ».
Notre travail en cours a pour objectif d'aboutir à une évolution du statut simple et efficace.
Concernant la présence des services déconcentrés de l'État sur le territoire, celle-ci ne paraît pas adaptée aux besoins locaux. Certains services sont essentiels mais n'existent pas, comme le service militaire adapté.
S'agissant de l'organisation des services de l'État, celle-ci doit être modifiée. Il conviendrait ainsi de séparer les effectifs de l'État des personnels du territoire.
Sur ces deux points, je comprends votre position. Les outre-mer se battent pour le maintien du service militaire adapté (SMA), qui a permis la formation de quantité de nos jeunes en difficulté. Nous devons en effet nous battre pour l'extension du service militaire adapté à Wallis-et-Futuna. Concernant l'organisation des services de l'État, dans bon nombre d'autres territoires d'outre-mer, les fonctionnaires de l'État et les fonctionnaires territoriaux sont strictement séparés. Il est donc utile de savoir que tel n'est pas le cas à Wallis-et-Futuna.
La plupart des services de l'État déconcentrés sont localisés en Nouvelle-Calédonie. Cette ancienne pratique est sans doute liée aux relations anciennes que nous avons avec ce territoire. Il convient de rappeler que Wallis-et-Futuna est une entité juridique et une collectivité de la République à part entière. Même si nous ne représentons qu'une infime partie de la population, nous devons bénéficier de cette représentation sur le territoire, que nous n'avons cessé de demander. En matière de contrôle sur la législation relative aux énergies, par exemple, les services sont localisés en Nouvelle-Calédonie. C'est le cas de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Il me semble donc important d'évoluer vers une meilleure représentation des services de l'État sur notre territoire.
Je comprends parfaitement vos remarques. Vous avez besoin d'une réponse sur place, mais ne serait-il pas plus intéressant de doter l'organisation représentative de l'État de la capacité à répondre dans tous les domaines ? La multiplication des administrations a en effet pour effet d'alourdir l'organisation.
Le guichet unique me semble être la solution la plus souhaitable en termes de communication.
Concernant les services de l'État basés en Nouvelle-Calédonie et dont dépend Wallis-et-Futuna, selon l'accord de Nouméa, les services communs à ces deux territoires devaient être séparés. Il me semble nécessaire de rappeler ce principe.
S'agissant du guichet unique sous la tutelle du préfet, la personne nommée préfet doit être bien informée des spécificités du territoire. Le mode de recrutement du préfet et des fonctionnaires de l'État sur le territoire doit dès lors être revu. Il s'agit de ne pas envoyer dans un territoire aux caractéristiques singulières des personnes qui n'y ont pas été préparées.
Nous nous sommes battus à Saint-Barthélemy pendant des années pour obtenir cette prise en compte par rapport à la Guadeloupe. Aujourd'hui encore, en matière de santé, nous sommes inclus dans le système guadeloupéen. S'agissant du sujet de la spécificité, nous militons effectivement pour que les hauts fonctionnaires nommés outre-mer soient mieux formés.
Je vous laisse la parole pour la dernière partie concernant la révision constitutionnelle.
Ce constat sur les hauts fonctionnaires est identique depuis des années et nous pose problème.
Dans l'optique d'une révision constitutionnelle, la priorité doit être donnée à la décentralisation ou à l'évolution statutaire. Dans le cas particulier de Wallis-et-Futuna, il s'agit de l'évolution statutaire.
S'agissant de la fusion des articles 73 et 74 de la Constitution, l'organisation des départements et des collectivités d'outre-mer est différente. Il existe un risque que les collectivités de l'article 74 soient noyées « dans la masse ».
Concernant le possible regroupement de l'ensemble des territoires sous l'appellation de collectivités d'outre-mer, celui-ci ne représente aucun inconvénient pour Wallis-et-Futuna.
La définition des statuts des territoires par une loi organique permettrait par ailleurs de mieux cibler les besoins d'adaptation propres à chaque collectivité. Les exemples calédonien et polynésien en témoignent.
En ce qui concerne la consultation des populations sur les demandes de transfert de compétences, cet outil favorise effectivement la démocratie. La participation de tous aux choix d'avenir et de développement d'un territoire nécessite une information suffisante des populations.
Vos réponses sont pleines de bon sens et rigoureuses. Saint-Barthélemy dispose d'un statut basé sur une loi organique récente et a été précédé par un long travail d'information et de préparation de la population, qui s'est traduit par des votes favorables extrêmement élevés. La bonne information de la population à ces sujets la rassure. Ce besoin est encore plus net chez vous, compte tenu des spécificités propres à toutes les chefferies et de l'organisation traditionnelle de votre vie sur vos territoires.
Souhaitez-vous soulever d'autres points ?
Concernant une évolution du statut, notre travail se poursuit encore, dans le sens d'une évolution simple et efficace.
Quand la réflexion en cours au niveau du territoire sera achevée, nous aurons peut-être besoin d'un éclairage juridique. Je voudrais donc rappeler l'engagement du président du Sénat dans le sens d'une éventuelle aide aux travaux d'évolution statutaire des territoires. Celle-ci serait utile.
Le président du Sénat est très attaché aux outre-mer. J'aurai le plaisir de lui rappeler cet engagement dans le cadre du groupe de travail qu'il préside sur la décentralisation.
J'ai eu la satisfaction, au cours de ces six dernières années, de faire progresser les sujets d'outre-mer à la tête de la délégation sénatoriale. Mon mandat prendra fin en septembre mais j'espère que ces travaux seront poursuivis. J'aurai plaisir à appuyer votre démarche que j'encourage. Sur nos îles, nous n'avons d'autre choix que d'innover, nous battre et faire comprendre à l'État français les spécificités qui sont les nôtres.
Nous vous remercions également. Nous continuerons à travailler sur le questionnaire pour compléter nos réponses.