Interventions sur "détention"

41 interventions trouvées.

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

… mais on ne leur en donne pas les moyens. » Plutôt que de prendre des mesures qui ne feront qu’aggraver les conditions de détention, il est au contraire urgent, selon nous, de réfléchir globalement au système pénal que nous souhaitons pour notre pays. Les études sur le sujet sont unanimes : la seule manière de lutter contre la surpopulation carcérale, et donc contre les conditions de détention indignes, est d’engager un grand plan de décroissance carcérale. Cela irait à rebours des choix des gouvernements successifs, qui ont...

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne :

...hers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner la proposition de loi déposée par notre collègue François-Noël Buffet, qui vise à faire cesser une situation insupportable pour le pays des droits de l’homme. Prenant acte des divers arrêts et sanctions visant notre République, cette proposition a deux objets principaux. Le premier, c’est de garantir à tous les détenus des conditions de détention compatibles avec le principe de dignité de la personne humaine. Le second, c’est de créer une voie de recours effective lorsque sa dignité est bafouée. Mes chers collègues, nous partageons le même constat sur toutes les travées depuis de nombreuses années : la situation carcérale, notamment au sein des maisons d’arrêt, n’est plus supportable dans un pays comme le nôtre. Depuis le début des anné...

Photo de François BonhommeFrançois Bonhomme :

...inons aujourd’hui intervient après l’arrêt de condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme à l’encontre de la France du 30 janvier 2020. La France a alors été condamnée à indemniser trente-deux personnes incarcérées dans un certain nombre d’établissements pénitentiaires de métropole et d’outre-mer. La Cour européenne des droits de l’homme a notamment relevé des conditions indignes de détention de ces prisonniers, considérant qu’elles étaient constitutives d’un mauvais traitement au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. Pour cette instance juridictionnelle, le minimum requis pour assurer la dignité que l’on est en droit d’attendre n’est pas respecté en France : possibilité d’utiliser les toilettes de manière privée ; aération disponible ; accès à la lumi...

Photo de Brigitte LherbierBrigitte Lherbier :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre d’une proposition de loi importante. Certes, les individus placés en détention ont commis des actes répréhensibles. Ces personnes doivent subir une véritable sanction, mais attenter à leur dignité nous semble inadmissible. Fermer les yeux sur des conditions de détention dégradantes n’honore ni notre pays ni notre justice. De nombreux rapports dénoncent à juste titre la surpopulation carcérale, l’impossibilité d’utiliser des sanitaires de manière privée ou la prolifération ...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...une simple audition ou d’un débat. Ce formalisme ne nous apparaît pas nécessaire et peut même constituer un frein important dans certaines situations. Monsieur le garde des sceaux, permettez-moi de vous répondre en citant l’arrêt de la Cour de cassation du 25 novembre 2020, que j’ai évoqué brièvement précédemment : « Lorsque la description faite par le demandeur de ses conditions personnelles de détention est suffisamment crédible, précise et actuelle, de sorte qu’elle constitue un commencement de preuve de leur caractère indigne, il appartient à la chambre de l’instruction, dans le cas où le ministère public n’aurait pas préalablement fait vérifier ces allégations, de faire procéder à des vérifications complémentaires afin d’établir la réalité. « Encourt en conséquence la censure » – j’insiste s...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...t la Cour : « Saisie d’une description du demandeur, qui évoquait une cellule infestée de punaises et de cafards, l’absence de chaise, la saleté repoussante des douches et le sous-dimensionnement de la cour de promenade, la chambre de l’instruction devait en apprécier le caractère précis, crédible et actuel, sans s’arrêter au fait que cette description ne renverrait qu’aux conditions générales de détention à la maison d’arrêt de Fresnes, ni exiger du demandeur qu’il démontre le caractère indigne de ses conditions personnelles de détention. » J’en conclus que les amendements n° 2 et 1, dont vous voyez bien que le second est l’amendement de repli du premier, sont strictement conformes à cet arrêt, en tendant à donner toute latitude aux personnes concernées de saisir le juge judiciaire, d’une manière...

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

Il en tient compte, de même qu’il a tenu compte de l’arrêt de la CEDH et de la décision du Conseil constitutionnel. Ces deux amendements visent à assouplir les critères de recevabilité des requêtes en prévoyant que le détenu pourrait présenter de simples indices de conditions de détention indignes. Pour ma part, je suis attaché à l’équilibre de la proposition de loi telle qu’elle a été dessinée, à l’origine, par son auteur et ses cosignataires, ainsi que par les amendements que nous avons adoptés au cours des travaux de notre commission. Nous voulons éviter que les JLD et les JAP soient submergés par des demandes, …

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...sceaux, mais je connais quand même beaucoup de fonctionnaires de cette administration, je reçois chaque année les représentants de ses syndicats dans mon département et je vais visiter les établissements –, il ne nous apparaît pas réaliste de lui demander de statuer dans les trois jours et, dans ce délai, de trouver la bonne solution pour une personne qui se trouve dans des conditions indignes de détention. Nous proposons pour notre part un délai de dix jours : il n’est pas exorbitant, je crois même que c’est une mesure de bon sens. Je ne vois donc pas pourquoi vous n’accepteriez pas cet amendement.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Les conditions indignes de détention sont un sujet dont nous parlons à vrai dire très courtoisement ; nous avons raison de le faire ainsi. Néanmoins, c’est une réalité humaine insoutenable et, lorsque se produisent des faits de cet ordre, il n’est pas exorbitant de demander que les délais soient raccourcis. L’objet de cet amendement est justement de réduire le délai laissé par le juge à l’administration pénitentiaire pour mettre fin...

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

...on de la commission et la vôtre, monsieur Sueur. Vous défendez à travers votre proposition de loi et les amendements que vous avez déposés une logique selon laquelle le transfèrement n’est plus une option. Dans ce cas, je peux concevoir que l’on définisse un délai inférieur à dix jours. Pour le président Buffet, auteur de la présente proposition de loi, le délai pour mettre fin aux conditions de détention indignes est forcément compris entre dix jours et un mois, car l’administration pénitentiaire peut avoir besoin d’un temps plus long afin d’étudier différentes solutions et trouver un établissement pour le transfèrement. Nous ne pourrons pas tomber d’accord sur ce point, car vous renforcez les critères pour obtenir le transfèrement, ce qui le rend quasiment impossible – pardonnez-moi ce mot un p...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je vois que M. Frassa s’en souvient très bien. Il est écrit dans le texte que le juge ne peut pas enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures déterminées pour mettre fin aux conditions indignes de détention. J’ai été un peu surpris de lire cela… Je me suis vu aussitôt rétorquer que, s’agissant de l’administration pénitentiaire, le juge judiciaire ne peut faire aucune injonction, prérogative du seul juge administratif. J’ai bien entendu cet argument. Vous pouvez me le répéter si cela vous fait plaisir, pour reprendre ce mot, il ne me convaincra pas. Le présent amendement tend à ouvrir la possibilit...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...t pour neutraliser la perspective d’une libération, choix qui reste possible dès lors que le juge en décide, en vertu même de la présente proposition de loi. Or cette solution n’est pas satisfaisante et risque de dissuader la personne détenue d’effectuer un recours. Les personnes se parlent beaucoup dans les prisons. Dire à un détenu qu’il risque d’être transféré à 500 kilomètres de son lieu de détention initial est extrêmement dissuasif pour l’exercice du recours, comme l’écrit remarquablement Mme Simonnot et le disent avec force les représentants de l’Observatoire international des prisons. Une fois le requérant transféré, il est probable qu’un autre prendra sa place – sauf à faire tous les travaux de construction, de reconstruction, de canalisation, chers à M. le garde des sceaux !

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

...permet tout de même de remédier au problème de surpopulation carcérale, je n’y vois pas quelque chose d’horrible ! Si une maison d’arrêt est particulièrement surpeuplée tandis qu’un autre établissement, dans la même région, présente un taux d’occupation plus satisfaisant, il est parfaitement légitime que l’administration pénitentiaire procède à un transfèrement afin d’améliorer les conditions de détention. La commission considère qu’il serait bien dommage de se priver de cette possibilité, qui vise simplement à répartir de manière plus optimale les détenus en fonction des places disponibles. Je le répète, la suppression visée par l’amendement retire tout simplement la possibilité à l’administration pénitentiaire de transférer un détenu ; en conséquence de quoi la commission a émis un avis défavor...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...ux. Vous savez très bien que la libération d’un détenu est décidée par le juge et ne peut l’être que par lui, heureusement. Pour revenir à votre hypothèse, cela m’étonnerait donc qu’il décide la libération d’un détenu dangereux. Étant de droit commun, le transfèrement est toujours possible. Nous ne parlons que des décisions subséquentes au fait qu’un détenu engage une procédure pour conditions de détention indignes. J’en viens maintenant à l’amendement n° 9, qui vise à instaurer des mesures d’astreinte. Étant en désaccord avec un certain nombre d’aspects du présent texte – pas tous –, nous avons déposé une proposition de loi alternative dont le titre est le même mais comporte en plus l’adverbe « effectivement ». La mesure que nous proposons figure justement parmi celles qui peuvent rendre les cho...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...pprécier les conséquences – vous avez défendu assez de personnes pour le savoir, monsieur le garde des sceaux. Parmi ces conséquences se trouve la vie familiale du détenu : à la suite de l’amendement déposé par Mme Benbassa, nous sommes d’accord que ce point figure déjà dans le texte. J’y ajouterais la vie sociale du détenu ; le respect de ses droits à la réinsertion dans la société, le but de la détention n’étant pas d’y rester mais d’en sortir, et pas par une sortie « sèche » ; ses droits à la santé, si toutefois un traitement est suivi – quel hôpital, par exemple – ; et les droits de la défense. Tout cela est déjà demandé par beaucoup d’instances. Nous demandons simplement, j’y insiste…

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

...e transfèrement sauvegarde la vie privée et familiale du détenu et respecte son droit à la réinsertion, à la santé et à la défense. Le texte élaboré par la commission prend déjà en compte la dimension des liens familiaux, et la procédure proposée est respectueuse des droits de la défense. Concernant les aspects sanitaires et sociaux, il serait surprenant que le détenu qui souffre de conditions de détention indignes trouve de plus mauvaises conditions dans l’établissement où il serait transféré. L’avis est donc défavorable. Quant à l’amendement n° 11, il tend à proposer une notion d’« examen approfondi de la situation familiale et sociale » du détenu, qui est très vague. Quels seraient alors les critères appliqués par le juge ? Un détenu dont la situation sociale est très difficile ne pourrait-il b...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

La question du transfèrement a déjà été beaucoup abordée. Ce sera certainement le terme le plus employé de ce débat… Je crains que le droit pour les personnes faisant l’objet de conditions de détention indignes de saisir le juge judiciaire pour un transfèrement ne se traduise par une espèce de mouvement perpétuel par lequel on ferait passer les détenus d’un établissement à l’autre. Vous avez dit que 800 à 900 détenus se retrouvaient à dormir sur des matelas posés par terre et humides, dans des conditions lamentables. Il y aura toujours ces 800 matelas en dépit des transfèrements. Des détenus ...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

L’objet de cet amendement est très simple : dans ces conditions de détention indignes, la visioconférence n’est pas forcément l’outil le plus adapté. Par conséquent, nous proposons de restreindre la visioconférence aux cas de force majeure.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...sé, elle ne répond pas aux différentes condamnations de la Cour européenne des droits de l’homme. Dans son arrêt du 30 janvier 2020, que j’ai déjà cité, la Cour européenne des droits de l’homme pointait un problème structurel en matière de surpopulation carcérale en France et exigeait l’adoption de mesures générales visant à supprimer le surpeuplement et à améliorer les conditions matérielles de détention. Au 1er février dernier, les prisons françaises comptaient 63 802 détenus. Chaque mois, ce sont 1 000 détenus de plus qui viennent remplir ces prisons. L’inflation carcérale que connaît la France depuis plusieurs décennies est avant tout le fruit des politiques pénales antérieures. Je connais la diversité des gouvernements qui se sont succédé, et je ne ferai aucun simplisme à cet égard. Précéde...

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa :

...re de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, qui vise à réduire le nombre de courtes peines. Cependant, monsieur le garde des sceaux, si l’on en croit vos récentes déclarations, le Gouvernement serait tenté de proposer une réforme des règles relatives aux crédits de réduction de peine, ce qui pourrait avoir l’effet inverse en augmentant le temps passé en détention. Le Gouvernement, par votre voix, pourrait donc utilement nous éclairer sur la stratégie qu’il compte suivre en matière de gestion de la population carcérale.