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Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, mes chers collègues, au cours de ses vœux aux corps constitués et aux agents de la fonction publique du 11 janvier 2008 à Lille, le chef de l’État déplorait, s’agissant du classement de sortie de l’ENA, l’École nationale d’administration, que « le résultat d’un concours passé à vingt-cinq ans oriente toute une vie professionnelle ». Il annonçait vouloir « la création d’un véritable marché de l’emploi public, où les affectations ne dépendront plus d’une gestion centralisée et désincarnée des corps, mais d’un libre choix par celui qui recrute et par celui qui “candidate”, dans l’intérêt bien comp...
...équité ont été respectés au cours des différentes phases de sélection ? Si une administration refuse de recruter un élève, le comité pourra-t-il le lui imposer contre sa volonté ? À la fin de la période probatoire assurée par le stage de pré-affectation, le comité ad hoc pourra-t-il être saisi d’un refus de titularisation ou d’affectation définitive émis par l’employeur et la direction de l’ENA ? Pour justifier sa volonté de supprimer le concours de sortie de l’ENA, le Président de la République met en avant l’argument selon lequel le résultat du concours orienterait définitivement toute une vie professionnelle. Ce jugement mérite d’être nuancé, car les exemples sont nombreux, depuis 1945, d’anciens élèves ayant atteint les plus hautes responsabilités sans pour autant être sortis dans ...
...e bénéficier de leur expérience et de leur talent d’autres administrations et d’autres corps que ceux qui les ont recrutés. Il faut également qu’ils puissent accomplir une vocation dans un autre cadre si leurs aptitudes et leurs mérites, comme leurs goûts, le leur permettent. Le tour extérieur pour les grands corps de l’État a été institué aussi à cette fin. Ce n’est pas le concours de sortie de l’ENA qui crée entre les élèves ayant suivi une même formation un sentiment d’inégalité : c’est l’existence des grands corps de l’État, qui jouissent d’un prestige incontesté, attirent les meilleurs éléments d’une promotion et facilitent l’accès, dès le début d’une carrière, aux plus hauts emplois. Sauf à modifier de manière radicale le statut de ces corps, ce qui ne semble guère d’actualité, le conco...
... servir l’intérêt général. En exposant l’administration au risque de la cooptation ou du favoritisme, on contredit l’objectif proclamé par le Président de la République, qui souhaite justement ouvrir les responsabilités les plus élevées à toutes les catégories de la population, singulièrement à celles qui sont les plus défavorisées. Relisez l’exposé des motifs de l’ordonnance de 1945 relative à l’ENA : « Les administrations organisent chacune de leur côté le recrutement et la carrière de leurs agents. Les conditions exigées pour des emplois cependant comparables varient d’une administration à l’autre. Le rythme des concours est laissé à l’appréciation de chaque service. Il en résulte une spécialisation et un cloisonnement excessifs. » L’un des mérites de l’ENA a été de mettre fin aux recrute...
Il est vrai – et il y a longtemps qu’on le dit – que l’ENA est moins une école de formation qu’une école de classement. Le classement, certes, a quelque chose d’arbitraire, mais c’est l’arbitraire de la destinée. Lui préférer celui de l’employeur, des employeurs publics, c’est un changement quasi métaphysique, en tout cas historique. L’ENA a mis longtemps à naître. Une semblable école fut, des siècles durant, le rêve des réformateurs, voire des révoluti...
Puis, autre petit malheur, il y eut le déménagement de l’ENA à Strasbourg, voulu par le Premier ministre Édith Cresson, ce qui posa quelques problèmes pour le recrutement des maîtres de conférence. En effet, ne l’oublions pas, l’ENA, comme toute école, avait un corps enseignant composé, comme il se doit, d’anciens élèves et de jeunes hauts fonctionnaires. Quoi qu’il en soit, l’école ne mourut pas de son transfert dans la magnifique commanderie Saint-Jean. ...
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, une fois n’est pas coutume, je vais m’employer à défendre l’ENA, peut-être parce que j’ai beaucoup attaqué les énarques au cours de ma vie politique.
...es hauts fonctionnaires de l’État, qui se tient à la demande du groupe de l’UMP dans le cadre de la semaine d’initiative sénatoriale, est aussi l’occasion d’évoquer, au-delà des problèmes de recrutement et de formation, la question beaucoup plus large de la nécessaire mutation de la fonction publique. À mon sens, notre débat ne peut se limiter à parler de la suppression du classement de sortie de l’ENA : cela reviendrait à ne prendre en compte que la partie émergée de l’iceberg de la fonction publique. Quelle est la situation de notre pays en ce qui concerne ses hauts fonctionnaires ? Tout d’abord, ceux-ci bénéficient d’une formation extrêmement performante, enviée dans le monde entier. Ensuite, ils font preuve d’une impartialité convenable, qui n’est d’ailleurs pas sans lien avec la qualité d...
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je m’interroge sur le statut et l’utilité de ce débat. En effet, si j’ai bien compris – mais peut-être n’est-ce pas le cas –, la décision est déjà prise ; elle a été communiquée à l’ENA et a fait l’objet d’une communication en conseil des ministres. Je remercie le président de Rohan d’avoir suscité ce débat, mais n’eût-il pas été préférable de saisir le Parlement avant de prendre une décision sur un sujet d’une telle importance ?
Monsieur le secrétaire d’État, je vous poserai donc une question simple, à laquelle, je l’espère, vous pourrez répondre : le Parlement, qui doit se contenter aujourd'hui de débattre, aura-t-il l’occasion de statuer sur cette affaire ? Au demeurant, le sujet est vaste, car la formation des serviteurs de l’État comme de ceux des collectivités territoriales ne se réduit pas à la seule question de l’ENA. À l’instar des orateurs qui sont intervenus avant moi, je voudrais revenir sur quelques principes, dont celui, qui est fondateur de la République, de l’égalité, de la promotion de tous, de la possibilité donnée à chacun d’aller le plus loin possible. Disant cela, je songe à un ami de Gien, dans le Loiret, dont les obsèques ont lieu en ce moment même, un homme issu de la classe ouvrière qui est ...
...and corps, d’être administrateur civil ou membre d’une juridiction administrative, et d’instaurer une plus grande diversité dans les tâches exercées au cours d’une même carrière. Après avoir parlé des principes républicains, de la nécessité de carrières diversifiées, je veux maintenant aborder la formation. En effet, à cet égard, des évolutions sont certainement souhaitables. Je plaide pour que l’ENA, comme les autres grandes écoles, délivre une formation. Cette affirmation peut paraître banale, mais, aujourd’hui, sur deux années d’école, les élèves effectuent deux stages de six mois chacun dans une préfecture ou une ambassade. Ces stages sont très bénéfiques parce qu’ils sont d’une certaine durée et parce qu’ils offrent une certaine densité d’apprentissage. Si l’on crée un troisième stage, e...
...reprise ou de bons professionnels en général, serait une sorte de mixture de gestion des ressources humaines, de management et de quelques autres concepts à la mode, ce n’est pas forcément très sérieux. Le savoir, la connaissance sont des réalités et, nous le savons tous, chacun doit s’efforcer de s’en approprier une part aussi large que possible. En outre, il faut démocratiser l’accès à l’ENA ainsi qu’à toutes les grandes écoles et aux universités. Cela passe par des réformes, comme celle qu’a mise en œuvre M. Descoings. Les initiatives qui ont été prises ont été utiles. Notre collègue Yannick Bodin en parlera d’ailleurs dans un instant et abordera tout ce qui peut être fait pour favoriser cette nécessaire démocratisation. Pour ma part, je tiens à dire que la démocratisation doit êtr...
...eux de revoir le contenu des épreuves, tout en respectant bien entendu les principes républicains ? On peut également accorder davantage de bourses à ceux qui travaillent dur pour arriver à ces hautes responsabilités. L’un de nos collègues a cité Jean Zay, ce grand ministre de l’éducation nationale – de l’instruction publique, comme l’on disait sous le Front populaire –, qui a posé les jalons de l’ENA. Nul plus que lui n’était attaché à ce que chacun réussisse ; nul plus que lui n’était attaché à ce qu’on donne à chacune et à chacun les moyens de la promotion dans une véritable exigence et dans le respect absolu du principe de l’égalité.
...dite, il en serait fini de la fonction publique républicaine, fruit d’une longue histoire depuis 1789 et que chacun a renoncé à rappeler faute de temps. Le principe du recrutement par concours a été au cœur de cette construction, pour permettre l’égalité d’accès aux emplois publics et l’indépendance des fonctionnaires. Les critiques à l’égard de la haute fonction publique et particulièrement de l’ENA, dont elle est largement issue, ne sont pas nouvelles. Dans Les Héritiers, publié en 1964, Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron ont décrit comment l’ENA, parmi d’autres écoles françaises, était monopolisée par les « héritiers de la culture dominante ». Les deux sociologues reprochaient à un tel mode de sélection de mettre à mal le fondement de démocratisation de l’accès à ces grandes éc...
...ait pas été concevable que le Parlement, en l’occurrence le Sénat, ne puisse s’exprimer sur cette question qui, au travers du classement, pose, comme Mme Borvo Cohen-Seat l’a rappelé tout à l’heure, le problème général de l’image et du statut général de la fonction publique. Je souhaite également remercier M. Éric Woerth qui, avec le décret du 29 mars dernier, a posé le problème de la réforme de l’ENA. Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous avez la lourde mission de mettre en œuvre cette politique, sachez que, pour l’essentiel, elle me convient parfaitement. En effet, me semblent particulièrement appropriées la professionnalisation des études, la diminution de la durée des études et l’ouverture sociale avec une classe préparatoire destinée à des élèves ayant sans doute plus besoin de sout...
... Entre 1945 et 1970, il y a eu une certaine démocratisation dans le renouvellement des élites. Mais, il faut le reconnaître, cette démocratisation s’est interrompue dans les années qui ont suivi. Le constat est encore plus lourd dans les plus grandes écoles de formation des fonctionnaires : la diversité sociale y est pratiquement inexistante. Je vous en fournirai un seul exemple : cette année, à l’ENA, sur 162 parents d’élèves, seulement 4 sont ouvriers ! La conséquence est simple. Les futurs fonctionnaires actuellement scolarisés à l’ENA ne sont pas suffisamment représentatifs de la diversité de la population française.
En allant plus loin dans l’analyse, nous pouvons observer une déviance dans le recrutement actuel au sein de l’ENA. Comme cela a été rappelé, trois types de concours permettent d’intégrer cette grande école. Le concours externe s’adresse aux diplômés de l’enseignement supérieur, le concours interne concerne les fonctionnaires ou agents publics ayant au moins quatre années de services effectifs et le troisième concours est destiné aux salariés du secteur privé ou aux personnes exerçant un mandat électif local....
...vie quotidienne de tous nos concitoyens. Je regrette donc que les principes juridiques de répartition des pouvoirs fassent relever un tel sujet du décret. Je le comprends, le débat sur une éventuelle suppression du classement de sortie part d’une réflexion que nous nous faisons tous. Les résultats obtenus par de jeunes fonctionnaires âgés de vingt-trois ou vingt-quatre ans lors de leur sortie de l’ENA façonnent la suite de leur carrière. En d’autres termes, leur perspective d’évolution professionnelle est déterminée dès cet âge. Je comprends donc que le Président de la République souhaite un réexamen, voire un changement, de cette situation. De surcroît, le classement de sortie fige la carrière non seulement de ces jeunes fonctionnaires, mais également de tous les membres de l’administration....
...ise entre trente-deux ans et cinquante-cinq ans étaient en fonction partout ailleurs, en particulier dans les entreprises. Il convient donc de s’interroger au sujet de ces grands corps, d’autant que, ne l’oublions pas, ils constituent le modèle de promotion sociale proposé à l’ensemble de l’administration française, qui est puissante. Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de rappeler que l’ENA a été créée après la guerre pour la reconstruction de la France et que les fonctionnaires qui en étaient issus exerçaient une mission de service public. C’était une valeur. Comme l’a dit M. Fortassin, ces fonctionnaires n’étaient pas corrompus, qualité fantastique, comparativement à d’autres pays en Europe ou au-delà. Or que constate-t-on aujourd'hui ? Je sais bien que ce n’est peut-être pas le...