Interventions sur "collection"

21 interventions trouvées.

Photo de Béatrice GosselinBéatrice Gosselin :

...devant vous ce soir. Je mesure aussi celle que doivent ressentir les familles des victimes, dont certaines sont présentes dans les tribunes de notre hémicycle – je tiens à les saluer. Le moment est solennel. Mme la ministre l’a souligné, ce texte est historique. Il n’a aucun équivalent dans notre histoire législative. Jamais le Parlement n’avait été amené à se prononcer sur la sortie d’œuvres de collections publiques pour les rendre à des particuliers, du fait des persécutions antisémites commises pendant la période nazie. Ce texte pose pourtant une question essentielle : celle de la réparation des spoliations d’œuvres d’art intervenues pendant cette période. Ces spoliations ne peuvent être dissociées de la politique d’extermination des juifs d’Europe, à laquelle se sont livrés le régime nazi et ...

Photo de Béatrice GosselinBéatrice Gosselin :

...ctime, mais aussi, plus globalement, les témoins silencieux de la barbarie qui a frappé notre continent voilà plusieurs décennies. Leur restitution, c’est une part de l’identité, de la mémoire et de la dignité de ces hommes et de ces femmes victimes de la barbarie nazie que l’on restitue ; c’est une reconnaissance symbolique de la spoliation et des crimes dont ils ont été victimes. La sortie des collections de ces quinze œuvres s’impose pour permettre leur retour auprès des ayants droit de leurs légitimes propriétaires. Mme la ministre nous a rappelé voilà un instant le parcours de ces œuvres. Le travail effectué par ses services, par les musées et, pour deux des quatre articles, par la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations, la CIVS, démontre que ces œuvres ont été spoliées ou...

Photo de Béatrice GosselinBéatrice Gosselin :

...ce, qui prolonge le discours de Jacques Chirac au Vél d’Hiv du 16 juillet 1995. Enfin, il manifeste notre détermination à trouver des « solutions justes et équitables » pour réparer les spoliations d’œuvres d’art, comme nous y invitent les principes de Washington, auxquels nous avons souscrit en 1998. Il dit clairement que la Nation considère que les œuvres spoliées n’ont pas leur place dans ses collections. C’est une question éthique. C’est pourquoi j’espère que nous voterons, mes chers collègues, ce texte à l’unanimité, comme l’a fait voilà trois semaines l’Assemblée nationale. Ce texte peut marquer un véritable tournant dans la réparation des spoliations d’œuvres d’art, à la condition que nous poursuivions nos efforts dans les années à venir. Je crois que, dans un certain sens, il nous oblige ...

Photo de Lucien StanzioneLucien Stanzione :

...des œuvres devant être vendues. Il existe donc des incertitudes sur le nombre de ventes réalisées après-guerre, et le passé de certaines œuvres demeure toujours flou. Par ailleurs, quelque 2 000 œuvres sont compilées, et il leur est attribué un statut adapté, appelé MNR, pour « Musées nationaux récupération », qui impose qu’elles soient conservées par les musées sans pour autant faire partie des collections publiques. L’État n’en est pas le propriétaire, mais seulement le détenteur provisoire. Depuis la fin des années 1990, une nouvelle dynamique est insufflée par le contexte historique, lequel mérite un bref rappel. En effet, à la chute du mur de Berlin, les archives allemandes sont ouvertes et les archives américaines déclassifiées. Cela donne lieu à une nouvelle médiatisation de la question des...

Photo de Lucien StanzioneLucien Stanzione :

...st possible de créer un statut spécial à l’image des MNR ou d’adopter une loi-cadre pour toutes les restitutions, ce qui permettrait de réduire les délais de traitement de ces dossiers, qui ne sont pas anodins, vous l’avez souligné, madame la ministre. Dans le cadre du projet de loi que nous étudions aujourd’hui, deux œuvres ont fait l’objet d’une spoliation par les nazis avant d’entrer dans les collections publiques, alors que les autres ont été achetées par l’État pendant l’Occupation. Elles relèvent donc toutes d’une logique systématique de spoliation des biens des familles juives durant la Seconde Guerre mondiale. La facilitation des restitutions se heurte à certains principes généraux de notre dispositif juridique. Je pense ici aux dispositions de l’article L. 451-5 du code du patrimoine, sel...

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

...adame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans La Tête d ’ obsidienne, André Malraux écrit : « L’art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort ; le musée est le seul lieu du monde qui échappe à la mort. » Cette part d’immuable et d’immortalité de l’œuvre d’art prend tout son sens lorsqu’il s’agit de restituer des œuvres d’art aux ayants droit de collectionneurs juifs spoliés par les nazis et, très souvent, déportés. Je tiens à saluer ici la volonté politique qui anime à ce sujet le Gouvernement depuis 2018 et le consensus qu’a suscité ce projet de loi, adopté à l’unanimité à l’Assemblée nationale et en commission de la culture du Sénat. Le groupe RDPI du Sénat votera bien évidemment en faveur de ce texte. Toutefois, ce premier pas, extrêmement lo...

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, Hitler rêvait de réunir à Linz les plus grands chefs-d’œuvre pillés dans les territoires occupés, à commencer par les galeries d’art et les collections privées des juifs de France, sur fond de rafles et de déportations. À l’époque où Paris était la première place mondiale du marché de l’art, la plupart des galeries appartenaient à des juifs, à l’image de la galerie Zborowski, rue de Seine, du nom du marchand d’art et ami de Modigliani. Le gouvernement du maréchal Pétain a non seulement laissé le champ libre aux spoliations, mais il les a auss...

Photo de Toine BourratToine Bourrat :

...nées sur le marché de l’art. S’est alors écoulée une longue période de silence et d’oubli. Des voix se sont cependant élevées dans plusieurs pays, au milieu des années 1990, pour appeler les musées et les administrations à reprendre leurs recherches. En 1998, quelque 44 États énoncèrent les grands principes de la restitution des œuvres d’art spoliées, s’engageant notamment à passer en revue les collections des musées. En France, le discours prononcé en 1995 par le Président Jacques Chirac, dans lequel celui-ci reconnaissait la responsabilité de la France dans la déportation des juifs, donc son devoir de réparation envers ceux qu’elle n’avait pas protégés, a déclenché une prise de conscience, qui s’est traduite par les travaux de la mission Mattéoli, puis par la création de la Commission pour l’in...

Photo de Toine BourratToine Bourrat :

...a culture a consacré davantage de moyens aux recherches. Nous sommes ainsi passés de 6 restitutions entre 1954 et 1993 à 116 depuis cette dernière date, via notamment la création en 2019 d’une mission spécifique, dont notre commission a auditionné le responsable, M. David Zivie. Son témoignage fut particulièrement éclairant quant à la difficulté des investigations, notamment concernant les collections publiques de l’État. Jusqu’à présent, les restitutions ont porté sur les œuvres dites « MNR », parce qu’elles ne font pas partie des collections publiques – l’État français en est le simple détenteur provisoire, non le propriétaire. En revanche, en vertu du principe d’inaliénabilité des collections publiques, il n’était pas possible de restituer les œuvres ayant été achetées par des musées fran...

Photo de Toine BourratToine Bourrat :

...Un grand nombre d’institutions muséales ont lancé des recherches approfondies sur les itinéraires des œuvres ; nous pouvons les en féliciter. En l’espèce, le dessaisissement décidé par la France est d’autant plus remarquable qu’il concerne plusieurs œuvres majeures. Ainsi le tableau Rosiers sous les arbres, conservé au musée d’Orsay, est-il la seule œuvre de Gustav Klimt présente dans les collections nationales. Notre rapporteure, Béatrice Gosselin, dont je salue la qualité du travail et la sensibilité de l’écoute, souligne la nécessité d’allouer des moyens suffisants à la recherche de la provenance des œuvres et de former davantage de personnels affectés à cette mission, y compris au niveau territorial, afin que ce travail puisse être mené à bien dans des délais raisonnables. N’oublions pa...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

Dans ce document, auquel je tiens aujourd’hui, comme d’autres, à rendre hommage, elle insiste sur l’importance cruciale des recherches systématiques de provenance, qu’il s’agisse des œuvres stockées parmi les MNR ou de tout autre bien acquis par nos musées entre 1933 et 1945. Il y va de l’éthique de nos collections. Quelque 43 œuvres ont ainsi pu être restituées depuis 2012 grâce à des recherches proactives. Un vaste travail de recherche de provenance est effectué en ce moment même par nos musées, celui du Louvre notamment ; il faut saluer ce travail. Les œuvres que ce projet de loi prévoit de restituer à leurs ayants droit s’inscrivent dans cette histoire longue et tragique ; particulières sont l’histoi...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

C’est ce que je suis en train de dire, mes chères collègues : ces deux types de restitutions recouvrent des situations tout à fait différentes. Néanmoins, la réflexion que nous menons dans un cas doit enrichir notre appréhension de l’autre. S’il y a bien là deux réalités différentes, en effet, un seul et même impératif se fait jour : la recherche de la vérité, de la justice, de l’éthique de nos collections et de la concorde entre les hommes, les peuples et les générations à travers l’art. Rendre ce qui a été mal acquis honore et grandit notre politique culturelle. Un tel élan prend heureusement toujours plus d’ampleur ces temps-ci. Ce projet de loi y participe ; c’est pourquoi les écologistes voteront résolument pour.

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

...t les garde-meubles. » Et il ajoute : « Les Allemands ont emporté pour 500 milliards d’œuvres. Ils furent beaucoup aidés dans cette belle opération par des experts, des commissaires-priseurs et des marchands français. » Mes chers collègues, comme le dit notre rapporteure, Béatrice Gosselin, dont je salue la qualité du travail, cette loi est la première qui restitue des œuvres conservées dans des collections publiques, mais acquises hors du cadre de la légalité républicaine. Elle porte aussi, comme le dit encore notre collègue, reconnaissance et réparation des « spoliations dont le régime de Vichy s’est rendu coupable ». J’ajoute que le Parlement de la République française n’a jamais reconnu par la loi les exactions commises par le gouvernement du maréchal Pétain. L’ordonnance prise le 21 avril 19...

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

...ut un peuple. Je salue le travail colossal mené par la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations, la CIVS, qui, depuis sa création en 2000, en a fait beaucoup. Le retour des biens culturels n’est pas une question facile, reconnaissons-le, tant elle met en présence des enjeux multiples et souvent contradictoires. Ce n’est pas rien que d’ébranler le principe d’inaliénabilité des collections, mais c’est nécessaire afin d’établir un équilibre entre l’éthique et la protection des collections. Le Sénat a toujours joué un rôle moteur dans la réflexion sur les modalités d’une gestion plus éthique de nos collections publiques : en 2002, avec la restitution par la France de la Vénus hottentote grâce à notre ancien collègue Nicolas About, mais aussi en 2010, avec la restitution des têtes m...

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

Le Sénat a également été à l’origine de la création d’une Commission scientifique nationale des collections destinée à encadrer les déclassements de biens appartenant aux collections et à définir une doctrine générale en matière de déclassement et de cession. Nous ne pouvons que regretter que celle-ci ait été supprimée, sur l’initiative du Gouvernement, par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite « ASAP ». Cette commission était pourtant une instance plus que bienvenue. ...

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

Ce texte vise à créer un Conseil national de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels extraeuropéens. La mise en place de cette instance permettrait de répondre à deux objectifs. En premier lieu, un tel conseil national contribuerait à préserver le principe d’inaliénabilité des collections en éclairant scientifiquement les décisions des pouvoirs publics, réduisant le risque que celles-ci ne soient le « fait du prince » et répondent exclusivement à des considérations diplomatiques ou à des revendications mémorielles ou communautaires. Ainsi laisserait-on davantage de temps à la réflexion et faciliterait-on la conciliation des différents intérêts, y compris scientifiques et culture...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

Les musées abritant dans leurs collections des œuvres inventoriées « Musées nationaux récupération » se sont mis tardivement à la recherche proactive des ayants droit. C’est trop récemment également que la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations a pu s’autosaisir de spoliations de biens culturels. En outre, ces restitutions dépassent le seul champ de l’objet matériel ; elles sont un enjeu essentiel de la reconnaissa...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

La repentance, en ce cas, n’est pas une réécriture de l’histoire en dehors de son contexte ; c’est la lucidité et le courage d’assumer ses fautes et de demander pardon. Je voudrais à présent revenir sur la notion d’inaliénabilité des biens culturels de nos collections publiques. Si l’on comprend les préoccupations de ceux qui ont décidé d’une telle inaliénabilité pendant la Révolution française, je plaide, quant à moi, plutôt que pour l’inaliénabilité de la propriété de tels biens, pour un glissement vers l’inaliénabilité de leur dimension culturelle. Allons plus loin : il faudrait réfléchir à une dimension universelle des biens culturels en vertu de laquell...

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

... Je dédie cette très modeste intervention de discussion générale à ma grand-tante, Victoria Matalon, qui avait émigré de Smyrne vers Marseille dans les années 1920 et qui fut déportée à Auschwitz-Birkenau avec sa famille. L’art fut l’un des piliers de la politique nazie. Moins d’une semaine après la prise de Paris, en juin 1940, des officiers allemands dressent la liste des œuvres, scellent les collections et pillent tableaux, sculptures et livres rares. Ne l’oublions pas, cette spoliation sera également organisée par le régime de Vichy, conformément à sa politique antisémite. Celle-ci atteint son paroxysme avec l’adoption de la loi du 22 juillet 1941, lorsqu’est ordonnée la confiscation de tous les biens juifs non encore bloqués. Le travail de restitution effectué lors de la Libération fut consi...

Photo de Olivier PaccaudOlivier Paccaud :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 1er prévoit de déroger au « principe d’inaliénabilité des biens constituant les collections des musées de France » ; Bernard Fialaire y a fait référence. Ce projet de loi n’est donc pas anodin ! Alors qu’une loi vise le plus souvent à tenter d’améliorer une organisation sociale, à résoudre des problèmes, ce texte a une haute portée mémorielle, morale, civilisationnelle même. Rappelons que le droit de propriété est inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, à l’a...